
La foire exposition des produits fabriqués ...
Les femmes handicapées locomotrices ne se contentent guère de rester à la maison ou d’aller mendier dans les rues. Ces jours-ci, on constate une véritable prise de conscience de leur part ainsi qu’une grande envie de participer de manière digne à l’animation de la vie socioéconomique. Derrière cette volonté, les femmes vivant avec un handicap veulent démontrer au monde entier que le handicap n’est pas une fatalité comme on veut le faire croire. Elles veulent prouver qu’être handicapé n’est pas synonyme de dépendance vis-à-vis des autres mais que le handicapé n’est pas « une personne incapable mais plutôt une personne différemment capable» comme le disait Muniba Mazari.
En effet, dans leur quête d’indépendance ou d’autonomie financière, ces femmes ont développé les talents qui sont en elles pour apprendre à transformer des choses. C’est dans ce sens qu’elles confectionnent une panoplie de produits tels que des vêtements sur mesure, des produits de soins de beauté, des sacs, des articles d’hygiène féminine, des couches pour bébés et pour femmes enceintes, des équipements adaptés pour femmes handicapées lors de la maternité, des articles de sport comme le ballon de tennis de table, ainsi que d’autres produits artisanaux.
Lors de la foire des personnes handicapées tenue, il y a quelques semaines à Niamey, elles étaient nombreuses, ces femmes handicapées mais très battantes à avoir fait étalage de leurs savoir-faire à travers les produits exposés.

Mme Kadi Issa Amadou Salifou, une femme handicapée et présidente des femmes handicapées locomotrices, explique que les femmes handicapées des cinq communes participent à des formations spécialisées dans des ateliers situés dans chaque commune de la capitale. Elles y ont appris beaucoup de choses grâce auxquelles elles vivent autrement leur vie que par le passé. La formation au métier est devenu un créneau porteur d’espoir d’une vie meilleure. « Nous visons à toucher les femmes des différentes municipalités et à les rassembler pour leur offrir une formation de qualité, à la fois dans les zones urbaines et rurales. Nous avons désormais un grand nombre de formatrices au Niger. Alors qu’auparavant, des formatrices venaient de l’extérieur pour dispenser la formation. Grâce à l’intervention du CICR, nous sommes maintenant capables de former nous-mêmes d’autres femmes », indique-t-elle.
Les femmes, dit-elle, font face à des défis liés à la baisse des ventes de leurs produits car, malgré un travail acharné, l’intérêt pour leurs produits diminue. L’année dernière les acheteurs ne se bousculaient pas devant les stands de vente. Mais cette année, il y a eu une légère amélioration.
Par ailleurs, Mme Hadiza Issa, une femme en situation de handicap habitante du quartier Koira Tégui, est venue présenter et commercialiser ses créations artisanales. Ainsi, elle fabrique des calebasses, du savon liquide, des foulards, des nappes, des pulls et des chaussettes. Elle estime cependant que le lieu de la foire est éloigné et isolé, ce qui entrave le développement de ses ventes. « C’est un soulagement pour nous d’avoir un emploi. Cela nous évite de tomber dans la mendicité, comme on peut le voir en ville. Lorsqu’on exerce un petit métier, on parvient à subvenir à ses besoins. Le CICR s’est engagé à nous aider et nous espérons vivement que tout se passera bien pour que nous puissions travailler en étroite collaboration », souhaite-t-elle.
En outre, la vaillante femme reste préoccupée par le manque de soutien des Nigériens quant à l’achat des produits locaux, soulignant que les Nigériens devraient encourager la promotion et la consommation des produits locaux pour soutenir l’économie du pays. « Nos produits sont de bonne qualité et souvent supérieurs à certains produits importés. Nous espérons sincèrement que la population nous apportera son soutien pour promouvoir nos produits », a-t-elle confié.
Mme Loubabatou Laouali, originaire de Diffa et participante à la foire des personnes handicapées a parcouru plus d’un millier de kilomètres pour présenter des variétés de produits de sa région, tels que des nattes, de l’encens, des pagnes, du poisson frais et séché. « Les autorités et les projets nous sensibilisent à chaque fois à ne pas pratiquer la mendicité. Nous avons des compétences spécialisées dans différents domaines, c’est pourquoi voir des personnes sans handicap mendier nous contrarie », relève-t-elle.
Aujourd’hui, cette femme dénonce l’attitude de ces personnes valides qui s’adonnent à la mendicité. « C’est pourquoi nous nous permettons même de conseiller et d’éduquer ces personnes. De la même manière que chacun cherche à gagner de l’argent pour satisfaire ses besoins, nous aussi cherchons à gagner de l’argent pour satisfaire les nôtres. De la même façon que les autres paient leurs impôts, nous voulons également contribuer aux impôts en travaillant et en participant au développement de notre pays », déclare-t-elle.
Mme Loubabatou Laouali affirme que certains articles qu’elles ont fabriqués sont si bien réalisés que certains acheteurs se demandent s’il s’agit réellement de produits fabriqués localement. De plus, elle souligne que les femmes handicapées sont en mesure de confectionner des produits de même qualité sinon supérieur à ceux qui proviennent d’ailleurs. Elle a donc émis un appel aux autorités et à la population du Niger à les encourager dans le magnifique travail qu’elles accomplissent. « Nous concevons des produits de haute qualité, pourtant les consommateurs préfèrent souvent faire leurs achats ailleurs, malgré la qualité supérieure et la durabilité de nos produits. Les ventes sont en baisse, les visiteurs défilent à la foire sans effectuer d’achats. Nous aimerions que les clients non seulement jettent un coup d’œil à nos produits, mais qu’ils les achètent également. Chacun devrait pouvoir trouver un produit qui correspond à son budget », assure-t-elle.

Mme Barka Madougou, originaire de la région de Zinder est également venue participer à cette foire pour personnes handicapées où elle expose et vend des pagnes, des lèches, du fromage, de l’Alkaki, du toukoudi, du biscuit local (gréba) et des épices. Même si elle parvient à vendre quelques produits de temps à autre, sa seule préoccupation demeure le manque de clientèle qu’elle impute à une communication déficiente et à une visibilité faible de la foire. Il serait plus judicieux d’installer la foire ailleurs, par exemple au stade Général Seyni Kountché, afin qu’elle soit plus visible car, beaucoup ne savaient pas où elle se tenait. Mme Barka Madougou a exhorté les autorités à accroître leur soutien aux personnes en situation de handicap, soulignant que celles-ci méritent prioritairement toute assistance. Elle a également souligné les efforts considérables déployés par ces personnes en situation de handicap dans la création et la commercialisation de leurs produits et a appelé les autorités compétentes à promouvoir activement ces produits pour en faciliter la vente.
Assad Hamadou (ONEP)