Les petits commerces auxquels les jeunes filles s’adonnent dans la rue et dans les quartiers sont devenus, aujourd’hui, un fléau social. Un fléau révélateur de la crise sociale et morale qui accompagne la modernisation de la société et ses contraintes de quête du quotidien. En effet, beaucoup de jeunes filles se retrouvent sur les voies publiques de la capitale, des quartiers, surtout en cette période de vacances, pour vendre toutes sortes de produits tels que les arachides et cacahuètes, du maïs, des criquets, des biscuits, ou encore du moringa préparé. Ce faisant, elles s’exposent aussi à divers dangers.
Les vacances sont des moments où les enfants sont censés se reposer, suivre des cours de vacances, aller à l’école coranique pour approfondir leurs connaissances religieuses, partir en voyage pour découvrir de nouveaux horizons, ou aider les parents à faire des travaux ménagers. Malheureusement, beaucoup de jeunes filles n’ont pas ce privilège et se retrouvent dans les rues pour faire divers commerces. Le matin, on entend des filles proposer leurs produits aux clients « Ga talla ! » en Hausa, autrement dit « il y a à vendre ». « Nous profitons des vacances, ma mère et moi, pour vendre des biscuits afin d’économiser un peu d’argent pour préparer la rentrée scolaire. C’est avec cet argent qu’on m’achète les fournitures scolaires, les habits pour la rentrée et bien d’autres choses », confie Michou, une petite fille de 11 ans, sans se rendre compte des dangers auxquels elle s’expose.
Il y a certaines filles qui quittent leurs maisons le matin très tôt pour faire le tour du quartier, et même de la ville de Niamey, pour ne rentrer que le soir. « Je vends Omo (détergent) et savon, je sors vers 10h pour rentrer à la maison vers 12h 00 ou 14h00 mn. Le soir, après la prière de 16h 00 mn, je ressors jusqu’à 18h00 ou 19h00 des fois », confie Rakiya, une vendeuse dans le quartier Tondigamey.
« L’année passée, ma fille de 12 ans a failli perdre la vie, en traversant la route, elle a été renversée par un motocycliste. Elle s’est cassée la jambe et, jusqu’ à présent, elle boite », a fait savoir Mme Sani. Depuis lors, cette mère a pris la décision de ne plus laisser sa fille trainer dans la rue pour vendre des produits. Mme Sani lance un appel à l’endroit de tous les parents, de ne pas exposer leurs filles aux dangers de la rue. « Une fille doit rester à la maison, pendant les vacances, et aider sa mère dans les travaux domestiques, car une fille est la clé de la maison, elle est appelée à devenir une mère de famille un jour », dit-elle.
Quant à Mme Tallé, sa troisième fille a été victime d’un accident de la circulation en vendant des arachides et du ‘’Moringa’’ préparé. « Ce souvenir douloureux restera gravé dans ma mémoire, car, jusqu’à présent, elle boite malgré que l’accident date maintenant de plus de deux ans », a-t-elle notifié. Mais, malheureusement, cet accident n’a pas empêché Mme Tallé d’envoyer sa fille de 12 ans dans la rue avec des marchandises. « J’ai quatre filles. Comme ce sont les vacances j’envoie ma fille de 12 ans vendre du ‘’awara’’ et, à la fin de la journée, on peut se retrouver avec 3500 voire 4000 FCFA. Ça nous permet de couvrir nos besoins de la journée et d’économiser le reste. Mais, avant que ma fille sorte de la maison, je lui prodigue toujours des conseils. Je lui demande de faire très attention aux inconnus. Elle doit aussi rentrer avant le crépuscule », ajoute-t-elle.
Selon les explications données par Mme Haoua Abdou, sociologue, spécialiste en genre et développement, ces enfants sont exposés à toutes sortes de danger, notamment des risques d’agressions sexuelles ou viols, des accidents de la circulation et même des enlèvements, ou des disparitions. Ces filles peuvent aussi faire des « mauvaises » rencontres dans la rue ou même être influencées par des hommes mal intentionnés, à l’image des trafiquants d’enfants, ou d’organes humains, qui affûtent aussi leur stratégie. « Ces personnes mal intentionnées savent que c’est une période au cours de laquelle ils peuvent tomber sur des proies faciles. Ces enfants ont donc besoin d’une protection, d’une attention parentale et même de la société», ajoute la sociologue.
Iro. A. Hadiza (stagiaire)