Quelques papiers entre les mains, le visage partiellement recouvert par un hijab (voile intégral), la dame fait calmement son entrée à l’ONG Mieux Vivre avec le Sida (MVS) à Niamey. Habituée des lieux, elle se dirige vers un bureau où, on peut apercevoir deux femmes en blouse blanche. Après les salutations d’usage dans une atmosphère détendue, la porte se referme sur les trois femmes, la consultation va certainement commencer. Tous les jours, cette ONG accueille des hommes, des femmes vivant avec le VIH et qui, dans le cadre de leur traitement, sont régulièrement suivis par des professionnelles de la Santé.
Première association de lutte contre le Sida au Niger, l’ONG MVS créée en 1994 par des professionnelles de la Santé, a pour objectif général de contribuer à la réduction de l’impact des IST/VIH/SIDA par la prise en charge globale des communautés. Selon Abdou Adamou, directeur exécutif de cette ONG, MVS qui a vu le jour dans « un contexte de vide en termes de réponse à la pandémie du VIH/Sida au Niger », répond à une préoccupation des jeunes sur le VIH et au désarroi des premiers cas de séropositifs identifiés dans le pays. Faire dépister volontairement des hommes, des femmes et des enfants, suivre les personnes testées positives dans leur traitement est depuis lors, une des préoccupations de cette structure que dirige Abdou Adamou depuis 2005.
« A la date du 31 décembre 2022, la file active est de 1732 patients suivis dont 1069 femmes et 663 hommes », affirme-le Directeur Exécutif de l’ONG. Il précise qu’au Niger, le suivi des patients vivant avec le VIH se fait conformément aux recommandations de l’OMS et aux Directives nationales de prise en charge. « Les patients sont suivis tous les 3 mois en ce qui concerne les résidents à Niamey et tous les 6 mois pour ceux qui habitent hors de Niamey. Cependant, nous sommes disponibles chaque fois que le patient nous sollicite », précise le directeur de MVS.
A chaque visite de suivi, « un examen clinique et un bilan biologique sont faits ». Mieux, « au cours du suivi, 2 examens biologiques importants sont effectués à savoir la charge virale et le taux des CD4 nous permettant d’apprécier l’efficacité du traitement ARV », ajoute-t-il. L’autre réconfort, selon lui, est que « la majorité des patients respectent les ARV, les consignes du traitement et les mesures préventives. A chaque visite, le rappel leur est fait car la réussite du traitement en dépend ».
Le traitement en matière de VIH est long et dure toute la vie du patient. Abdou Adamou explique que les médicaments à leur disposition bloquent la multiplication du virus. « Le protocole thérapeutique actuel est très simplifié, puisqu’il s’agit de prendre un seul comprimé par jour. Ce médicament est actif sur les deux types de VIH (VIH1 et VIH2) et n’a pratiquement pas d’effets secondaires », affirme le directeur de l’ONG Mieux Vivre avec le Sida.
Le suivi des patients pour la réussite du traitement est une contribution très importante de l’ONG MVS dans la riposte du VIH/Sida au Niger. Actuellement, elle est la seule structure communautaire de prise en charge des PVVIH et des populations vulnérables et représente le 4ème gros site de prise en charge des PVVIH au Niger.
Les 1732 patients sous traitement ARV bénéficient d’un suivi régulier. « La qualité de ce suivi au niveau de MVS fait que 79 % de ces patients ont une charge virale indétectable en décembre 2022. Ce qui veut dire que 79 % de ces patients ne transmettent plus le VIH/Sida ni à leurs partenaires sexuels, ni à leurs enfants ou entourage », affirme Abdou Adamou.
Cet important résultat a été obtenu grâce aussi à la disponibilité des médicaments. En 2023, le Niger n’a pas de problème de rupture de médicaments antirétroviraux (ARV). « Cependant, nous avons constamment des ruptures en ce qui concerne les anti IO (anti infections opportunistes) », précise le directeur de MVS. L’ONG enregistre très peu d’abandon, mais connait des cas appelés ‘‘perdu de vue’’ et qui sont régulièrement recherchés pour les sensibiliser.
Les premières activités de MVS portaient d’ailleurs sur la sensibilisation des jeunes à Niamey, au niveau de son siège « RIVOLI » situé sur une route animée par des professionnelles du sexe. A partir de 1999, MVS a créé la première Cellule de prise en charge des personnes vivant avec le VIH/Sida au Niger. L’ONG a également mis en place, en 2002, le premier Centre de Dépistage Anonyme et Volontaire (CEDAV) au Niger et une cellule d’expertise en conseils sur les IST/VIH/Sida (ECONVISI) en 2004.
L’association a par ailleurs amorcé une décentralisation de ses activités par la création d’antennes SOS dépistage volontaires intégrant des unités de soins dans les régions de Tahoua (2003), Zinder (2004) et Agadez (2005). En 2006, des pools de formateurs régionaux en renforcement de capacités des acteurs de lutte contre les IST-VIH/SIDA ont également été créés dans les huit (8) régions du Niger. « Malheureusement, faute de financements, les antennes régionales de MVS ne sont plus fonctionnelles », explique Abdou Adamou.
L’autre difficulté de l’ONG est le fait que certains patients donnent de faux noms, de faux contacts téléphoniques. On a aussi des patients qui n’ont pas de téléphone. Ces situations ne permettent pas de retrouver le patient lorsqu’il est perdu de vue. M. Abdou Adamou pense que les patients doivent respecter les RDV et prendre correctement leur traitement. Les mesures préventives qui leur sont enseignées complètent le traitement et contribuent à l’amélioration de leur santé. Selon le directeur de MVS, le traitement ARV est un traitement à vie. « Même si on se porte très bien, on doit respecter la prise des médicaments, les RDV et les mesures préventives », précise-t-il. C’est pourquoi, M. Abdou Adamou demande aux patients de bien suivre leur traitement afin d’avoir une charge virale indétectable et de la maintenir pour leur propre santé et pour la santé des autres.
Fatouma Idé (ONEP)