Il est incontestablement celui qui a posé les jalons de la Société Nigérienne de l’Electricité (NIGELC) pour avoir été le tout premier directeur général de ladite société qu’il dirigea pendant plus d’une décennie, précisément de Juin 1970 à mars 1985. Ingénieur électricien formé à l’Ecole supérieur d’électricité (SUPELEC) de France en 1962, Kané Boukari débuta d’abord sa carrière à la Société Africaine d’Electricité (SAFELEC) en tant que stagiaire post scolaire avant d’occuper le poste de chef de production. La SAFELEC couvrait à l’époque un certain nombre d’Etats de l’Afrique Occidentale à l’exception du Sénégal, de la Côte d’Ivoire et de la Guinée. Avec l’avènement de l’autonomie intérieure de la Loi cadre et les Indépendances de plusieurs pays africains, les mutations ont fait en sorte qu’on est passé de l’Energie AOF à SAFELEC. Au Niger, il a fallu 1968 pour voir la création de la société nationale qui va s’occuper désormais de l’électricité.
Après la création de la Société Nigérienne d’Electricité le 7 septembre 1968, Kane Boukari a été nommé chef de service technique de la NIGELEC où il s’est vu confié une tâche extrêmement importante à savoir le suivi de la Centrale Niamey II (Route aéroport). En 1970, soit deux ans après la création de la NIGELEC, Kané Boukari prit les rennes de cette société avec comme ambition d’œuvrer au rayonnement de la nigérienne de l’électricité en procédant à l’interconnexion massive aussi bien dans la capitale et que dans les autres villes du Niger. Les défis étaient énormes à cette époque-là, dans la mesure où la plupart des cadres étaient des expatriés. C’est dire que la formation des cadres nigériens figurait déjà parmi les priorités des priorités de la NIGELEC pour suivre son évolution.
En outre, l’électrification du Niger a commencé en 1952 avec notamment celle de la ville de Niamey et précisément le quartier plateau où se trouvaient les services administratifs. «Nous avons poursuivi l’activité de ce vaste chantier d’électrification du pays parce qu’à la création de la NIGELEC, il n’y avait que les exploitations de Niamey ; de Zinder ; de Maradi et d’Agadez. Tout le reste des villes du Niger ont connu un début d’électrification vers les années 80, période à laquelle je suis parti. A mon départ de la Nigelec, il y’avait au moins 19 centres. Aujourd’hui, il ya des centaines pour vous dire que les progrès sont énormes. Sous le régime de la concession, l’activité de production d’électricité était complétée par une activité Eau, c’est-à-dire que la NIGELEC s’occupait de l’eau sous le régime de la gérance pour le compte de l’Etat», a expliqué Kané Boukari. En général, l’électrification suit l’adduction d’eau. Comme on peut le voir, c’est l’eau qui devient le client de l’électricité.
Parmi les grands projets de la NIGELEC qui étaient exécutés et les actes majeurs posés au temps de cet ingénieur chevronné, on peut citer la construction de la centrale de Niamey II ; les accords signés en 1972 entre le Niger et le Nigeria pour l’interconnexion ; la mise en service de la ligne de 132 KV qui relie Birni Kebbi à Niamey en 1976 ; la Société Nigérienne du Charbon Anou Arraren (SONICHAR) qui était aussi un projet majeur pour la NIGELEC dont Kané Boubari fut d’ailleurs Administrateur délégué de 1975-1984 etc. S’agissant des difficultés de la NIGELEC, l’ingénieur électricien précise qu’elles sont dues essentiellement à un sous-investissement parce que localement, la puissance disponible n’était pas suffisante. Ces difficultés subsistent encore malgré la centrale thermique de Gorou-banda et la centrale de Goudel qui a connu l’installation d’un second groupe. « Moi qui suis à la base de la construction de cette centrale, je ne peux pas donner des raisons pour lesquelles le second groupe n’a pas été installé surtout quand on a des problèmes de production», s’étonne Kane Boukari.
Certes le développement de la ville de Niamey met la Nigelec dans une position difficile. « En effet, la course entre la demande et l’offre ne s’arrête jamais. Elle est continue. Mais il est souhaitable qu’on ne soit pas toujours dans la position du demandeur seulement parce que l’interconnexion signifie en fait partenariat » estime-t-il. Il y a des moments où c’est la production locale qui fournit l’électricité aux abonnés. « Une telle situation peut arriver, on devrait accélérer des projets comme Salkadamna et de Kandadji pour qu’ils se réalisent parce que ce sont des puissances assez intéressantes qui seront produites» a conseillé Kané Boukari avant de relever que le Nigeria qui nous fournit de l’électricité, lui-même n’en a pas assez.
Des pistes de solution pour sortir de la dépendance énergique
La réalisation des projets comme Kandadji et Salkadamna s’avère indispensable même si Kandadji n’est que 130 MW. La Nigelec doit suivre de près ces grands projets structurants dans la mesure où c’est à elle qu’il incombe d’incorporer cette énergie pour le transport et la distribution. M. Kané Boukari regrette par ailleurs le retard pris par la NIGELEC dans l’adoption de l’énergie solaire. « Quoi que l’on dise, l’énergie solaire photovoltaïque reste et demeure la clef de voûte pour sortir de la dépendance énergique chronique» dit-il, précisant cependant que l’énergie solaire est très rentable dans la petite électrification. Des pays comme le Burkina Faso ; le Mali et Sénégal sont très avancés dans le mixte énergique alors que le Niger du Professeur Abdou Moumouni Dioffo devrait les dépasser nettement. Il revient maintenant à la Nigelec de poursuivre l’interconnexion de façon à franchir la production des diesels isolés car, il faut que les campagnes nigériennes profitent de l’électrification.
Hassane Daouda(onep)