Les récentes précipitations enregistrées à Niamey ont montré une fois de plus que la ville manque en plusieurs endroits de dispositifs de drainage ou d’évacuation des eaux ; Mon Colonel, existe-t-il véritablement un schéma directeur d’aménagement pour la ville Niamey ?
Vous voulez parler plutôt de Schéma Directeur d’Assainissement puisque dans votre question vous parlez du dispositif de drainage ou d’évacuation des eaux pluviales. Oui, la ville de Niamey disposera à partir de cette année d’un Schéma Directeur d’Assainissement des Eaux Usées et de Drainage des Eaux Pluviales pour l’horizon 2025-2035, initié par le Ministère de l’Hydraulique et de l’Assainissement. Ce Schéma est le résultat des études d’actualisation du premier Schéma d’Assainissement de la ville de Niamey qui date de 1981, débutées en 2017 et validées en 2024. Fort de ce nouvel outil, la ville de Niamey inscrira toutes ses actions en matière d’assainissement dans les directives de ce document de référence.
Quant au Schéma Directeur d’Aménagement, pour le moment, la ville de Niamey n’en dispose pas et ce, depuis que celui d’octobre 1984 est arrivé à terme en 1996.
En 2007 un Plan Urbain de Référence, PUR, qui est en fait un schéma simplifié, a été élaboré pour palier l’absence d’un véritable document de planification urbaine. Mais très malheureusement les prévisions prévues dans ce PUR, en matière d’occupation et d’utilisation du sol ont été rendues caduques avant même sa mise en œuvre du fait de l’avènement des lotissements privés en 2008. Depuis lors la ville se développe hors Schéma Directeur.
Compte tenu de l’étalement spatial sans précèdent que connaît la ville et des problèmes d’aménagement qu’il engendre, les autorités de la ville de Niamey ont initié et financé sur fonds propres, un Schéma Directeur d’Aménagement et d’Urbanisme (SDAU) qui est en cours d’élaboration sous la supervision du Ministère de l’Urbanisme et de l’Habitat.
Le Schéma Directeur d’Aménagement Urbain est un outil de planification urbaine élaboré pour un horizon temporel de 20 ans. Sa mission est de fixer les orientations fondamentales de l’aménagement du territoire des agglomérations.
Certes la ville de Niamey a bénéficié au cours des dernières années de plusieurs investissements dans le domaine des infrastructures routières, même si elles sont encore insuffisantes. Maintenant quelle place occupe la voirie dans votre programme ou feuille de route ?
Effectivement, la ville de Niamey a bénéficié de quelques infrastructures routières telles que les échangeurs, les rocades, les routes. Cependant, ces ouvrages sont loin de satisfaire les besoins des populations en matière de mobilité urbaine, car elles ne résolvent pas le problème de désengorgement des artères très fréquentées et surtout qu’elles ne sont pas dotées de systèmes de drainage et de caniveaux des eaux de ruissellement. L’illustration la plus parfaite est celle du Boulevard Tanimoune sur les 100 mètres qui est complètement immergé à certains endroits par les pluies.
La voirie est notre préoccupation majeure surtout en ces temps de fortes pluviométries. Elle occupe une place prépondérante dans notre mission de satisfaction des attentes des populations, d’amélioration de leur cadre de vie et pour faire de Niamey une ville digne d’une capitale.
Cependant, nous avons constaté dès notre installation que la ville manque de moyens matériels et financiers. La Direction de la logistique et du garage municipal ne dispose pas d’engins disponibles ne serait-ce que pour les interventions d’urgence. Nous n’avons pas de niveleuses, pas de chargeuses et encore moins de bull. Tous les engins chèrement acquis sont sur cale. La ville végète dans la location, c’est non seulement coûteux mais constitue un véritable frein à tout projet de construction relative à la voirie.
Or les routes et les rues conditionnent le développement urbain, elles remplissent en dehors du transport, de multiples fonctions sociales et économiques qui régulent la vie de la ville. C’est pourquoi nous avons fait de la voirie notre priorité, qui se traduira par la recherche de financement pour la réhabilitation du garage municipal en la dotant d’engins lourds de très bonne qualité afin que dans les meilleurs délais que la ville puisse entamer le bitumage de certains boulevards et la réhabilitation de rues très dégradées de la ville.
Comment comptez-vous prendre en charge les sempiternels problèmes des voies d’accès et d’inondations qui constituent une grande préoccupation pour les habitants de Niamey en période de pluies ?
D’abord il faut savoir que le réseau existant se trouve en majeure partie constitué de collecteurs de surface, c’est-à-dire d’un réseau de 129 km de caniveaux ou de dalots ouverts ou fermés par des dallettes en béton et d’un réseau de collecteurs enterrés de 34 km dont les 2/3 datent d’avant 1990.
En effet, le réseau de caniveaux est destiné à évacuer les eaux pluviales mais se trouve obstrué par les déchets ménagers et les déchets de voirie dont les lixiviats s’écoulent vers le milieu naturel. Il se trouve entretenu en même temps que la voirie par la Municipalité.
Pendant la saison des pluies de nombreuses inondations se produisent chaque année dans l’espace urbain et se trouvent liées à un manque de connaissance ou de conscience de l’inondabilité, doublé d’une maîtrise imparfaite du foncier, à des problèmes de conception, de réalisation ou d’entretien des caniveaux, à un manque de coordination des projets routiers et urbains, à la montée de la nappe dans certains secteurs, ou encore à un manque d’équipement couplé à l’accroissement de l’urbanisation notamment sur les voiries secondaires.
En un mot, du fait de l’explosion démographique des années 80 à nos jours, le réseau des caniveaux et collecteurs est non seulement obsolète et mais incapable aujourd’hui de couvrir les besoins de la population.
La question de l’hygiène et d’assainissement est une autre préoccupation dans la Capitale ; quelle sera l’approche que vous allez utiliser pour que les investissements dans ce domaine soient utiles, pour le bien-être de l’ensemble des habitants de la ville de Niamey ?
Avec les moyens de bords très limités par rapport à l’immensité de la tâche, et en attendant que nous nous équipions davantage, la ville de Niamey a parmi ses tâches régaliennes et qu’elle exécute au quotidien, les activités d’hygiène et d’assainissement suivantes : le désensablement des rues, la collecte et le ramassage des ordures à travers l’organisation des séances de salubrité avec les populations le dernier dimanche de chaque mois ; le rechargement des rues latéritiques pour relier le centre de la ville à la périphérie ; le curage des équipements de drainage des eaux pluviales (caniveaux, regards, avaloirs) ; le désensablement et le balayage des rues, des lieux et places publics ; valoriser ou parrainer toutes les entreprises qui transforment les ordures ménagères en compost et ustensiles ou en pavés autobloquants etc…
Depuis votre arrivée à la tête de la Ville de Niamey, vous avez entrepris un certain nombre d’actions pour faciliter la circulation autour des centres commerciaux en l’occurrence le Grand Marché de Niamey ; quelle assurance pouvez-vous donner aux usagers par rapport à la pérennité de cette action salvatrice ?
Tout d’abord l’action en elle-même au vu du résultat ne peut qu’être salvatrice, connaissant tous les désagréments que les usagers ont rencontrés et décriés. Nous mettrons tous les moyens qu’il faut afin de pérenniser ces acquis et nous continuerons dans cette lancée y compris une brigade permanente de veille (nuit et jour).
Ainsi pour pérenniser cette action salvatrice, j’ai instruit mes services pour me recenser tous ceux qui occupent anarchiquement le domaine public autour des équipements marchands afin qu’ils régularisent d’abord leur situation et pouvoir les recaser dans les nouveaux centres commerciaux périphériques. Nous comptons aussi sur la sensibilisation permanente des concitoyens ainsi que leur prise de conscience sur les bienfaits de nos actions.
La ville de Niamey fait face à une kyrielle de problèmes tant du point de vue aménagement urbain, d’infrastructures routières que de la gestion foncière ; quel sera votre regard sur ces différentes questions ?
Effectivement, comme vous l’avez souligné la ville de Niamey fait face à une kyrielle de problèmes qui tournent autour des problèmes d’aménagement urbains, de mobilité urbaine, de gestion foncière, d’occupation anarchique du domaine public et de gouvernance. Un outil de planification à savoir le Plan de Développement Intégré (PDI) est en cours d’élaboration et permettra à terme de résoudre les défis en présence.
Au titre de l’aménagement urbain comme décliné en amont de mon intervention, nous vous informons que déjà une étude est en cours pour un SDAU (Schéma Directeur d’Aménagement Urbain) pour la ville de Niamey.
Aussi avec les partenaires de la ville de Niamey et des projets comme celui du PIDUREM beaucoup d’infrastructures routières verront le jour. Il s’agit entre autres de chaussées drainantes ; des voies bitumées etc. Vous assisterez aussi dans les jours à venir à la délimitation physique des cinq (5) Arrondissements communaux de la ville Niamey.
Interview réalisée par Hassane Daouda (ONEP)