Cet entretien est réalisé en prélude à l’évaluation des Plans d’Actions Annuels (PAA) 2024, des programmes 2025 des structures sanitaires et la revue à mi-parcours du Plan de Développement Sanitaire et Social (PDSS) 2022-2026 au titre de la Région d’Agadez. Ainsi, dans cet entretien, le Directeur Régional de la Santé présente le processus de ces évaluations, les indicateurs, la performance des structures sanitaires de la région d’Agadez et les défis liés à la mobilisation des ressources.
Monsieur le Directeur, la région d’Agadez est dans le processus de l’évaluation de ses documents de planification stratégique des services de santé et des affaires sociales. Pouvez-vous rappeler le but de cet exercice annuel ?
Cet exercice annuel vise principalement à évaluer le niveau de mise en œuvre des activités planifiées, analyser les progrès réalisés par rapport aux indicateurs clés, identifier les défis rencontrés et formuler des recommandations stratégiques. Ces recommandations permettent d’améliorer les services de santé et des affaires sociales dans la région. De plus, cet exercice s’inscrit dans le cadre de l’évaluation des réformes du Plan de Développement Sanitaire et Social (PDSS 2022-2026) et des actions menées dans le cadre du Plan Annuel d’Activités (PAA) 2024. Il s’agit également de renforcer l’efficacité des services sanitaires en tenant compte des besoins réels des populations.
Alors Monsieur le Directeur, dans quel contexte les techniciens ont-ils travaillé pour l’évaluation de ces documents au niveau de vos services sanitaires ?
Les techniciens ont réalisé cette évaluation dans un contexte marqué par des contraintes géographiques importantes, notamment l’étendue du territoire régional de 667 779 km² et une faible densité de population (1,07 habitant/km²). Les infrastructures sanitaires disponibles sont limitées, avec seulement 95 Centres de Santé Intégrés (CSI) et 2 Hôpitaux de District (HD), dont une proportion importante de CSI (29,3 %) fonctionne avec un seul agent. Ce qui limite considérablement leur capacité opérationnelle.
Les défis logistiques viennent s’ajouter notamment en raison de la difficulté d’accès à certaines zones éloignées, particulièrement pendant la saison des pluies. Ce qui entrave les interventions et l’acheminement des ressources essentielles. Enfin, la couverture sanitaire reste inégale, avec seulement 69,87 % de la population couverts.
Malgré ces contraintes, des efforts significatifs ont été réalisés pour structurer l’évaluation. Par exemple, des supervisions intégrées, des réunions semestrielles de revue et des analyses des données DHIS2 ont permis de collecter des informations fiables pour appuyer cette évaluation.
Quels sont les principaux indicateurs des évaluations de vos planifications et quelle appréciation faites-vous des résultats obtenus ?
Les principaux indicateurs des évaluations de nos planifications incluent entre autres : la couverture sanitaire qui est actuellement de 69,87 %, bien que cette couverture reste inégale à travers la région, avec des zones plus difficiles d’accès où les services sont moins disponibles ; le taux d’accouchements assistés par un personnel qualifié qui a connu une légère augmentation, passant de 52,4 % au T3 2023 à 53,1 % au T3 2024. Cette progression est le résultat des efforts ciblés au niveau des districts pour améliorer la formation du personnel et renforcer la disponibilité des professionnels de santé qualifiés, afin d’assurer un meilleur accompagnement des femmes durant l’accouchement. Il y a aussi les sorties foraines et les cliniques mobiles où 967 sorties foraines et 32 cliniques mobiles ont été organisées. Cela a permis d’améliorer l’accès aux soins dans les zones les plus reculées et difficiles d’accès. Il y a en outre les campagnes de vaccination qui ont contribué à améliorer la couverture vaccinale et à prévenir les maladies évitables par la vaccination.
Ainsi, les résultats obtenus sont globalement positifs, avec des progrès significatifs dans l’accès aux soins, notamment grâce à l’extension des services mobiles et forains. Cependant, certains défis persistent, tels que les ruptures de médicaments essentiels, le manque de personnels qualifiés et la couverture insuffisante en infrastructures sanitaires dans certaines zones. Ces défis nécessitent des ajustements dans la planification et un soutien supplémentaire pour garantir une couverture équitable sur l’ensemble du territoire.
Quels sont les défis que vous avez rencontrés en matière de mobilisation des ressources et en termes de mise en œuvre de vos activités sur le terrain ? Et comment pensez-vous améliorer les différents indicateurs ?
Les principaux défis incluent un financement insuffisant, le non-respect des engagements pris par certains partenaires techniques et financiers (PTF) et un déficit en ressources humaines qualifiées. En outre, la logistique reste un problème majeur, avec un manque d’ambulances et de véhicules pour effectuer les supervisions ou assurer la couverture des zones éloignées.
Pour surmonter ces défis, il est essentiel de renforcer le plaidoyer auprès des partenaires pour obtenir des ressources additionnelles, notamment pour la construction de nouveaux hôpitaux de district et l’achat de matériel médical. Il est également nécessaire d’améliorer la répartition des personnels de santé disponibles et de multiplier les stratégies mobiles pour compenser les défis géographiques.
M le Directeur, le défi de vos services dans cette région est principalement lié à son étendue et la difficulté d’accès à certaines localités. Pouvez-vous nous en dire plus ?
La région d’Agadez, avec sa vaste superficie et sa faible densité de population, présente des défis uniques qui entravent la prestation des services de santé. L’accès à certaines localités est particulièrement difficile, rendant indispensable le recours à des stratégies mobiles ou foraines pour atteindre les populations les plus isolées. Ces distances importantes prolongent également les délais nécessaires à l’acheminement des médicaments, des équipements et à la réalisation des supervisions régulières, compromettant ainsi l’efficacité des interventions.
Bien que 95 % des centres de santé intégrés et des hôpitaux de district soient opérationnels, beaucoup de ces structures fonctionnent avec des ressources humaines et matérielles limitées. Ce qui aggrave les inégalités en matière de couverture sanitaire. Ces réalités imposent une planification rigoureuse, un renforcement des moyens logistiques et un investissement accru pour répondre efficacement aux besoins des populations dispersées et garantir un accès équitable aux soins de santé.
Votre rencontre annuelle a aussi la mission de la nouvelle planification pour l’année à venir. Avez-vous les moyens et ressources nécessaires en perspective de l’amélioration attendue ?
La région d’Agadez bénéficie d’un cadre de planification structuré pour 2025, avec des priorités clairement définies, notamment l’amélioration de la couverture vaccinale et l’élargissement des stratégies foraines pour atteindre les populations isolées. Ce cadre est soutenu par l’appui continu de partenaires qui contribuent à des initiatives clés telles que l’approvisionnement en médicaments et l’organisation de campagnes de vaccination, renforçant ainsi les efforts pour une meilleure prise en charge sanitaire.
Pour répondre aux besoins sanitaires de la région d’Agadez et réduire les disparités géographiques, il est nécessaire de construire 4 nouveaux hôpitaux de district à Arlit, Iférouane, Tchirozérine et Aderbissinatt, afin d’améliorer l’accès aux soins dans les zones éloignées. Le renforcement des centres de santé intégrés passe également par le recrutement et le déploiement de personnels qualifiés, indispensables pour garantir des services de qualité. Par ailleurs, l’acquisition de véhicules est essentielle pour faciliter les supervisions et assurer une distribution efficace des intrants médicaux dans toute la région.
En conclusion, la région d’Agadez, bien que confrontée à des défis géographiques et logistiques importants, continue de progresser dans la mise en œuvre de son cadre de planification sanitaire pour 2025. Grâce au soutien constant des partenaires, la région bénéficie de ressources pour renforcer ses capacités, notamment en termes de médicaments et de campagnes de vaccination. Toutefois, des investissements supplémentaires dans les infrastructures, le recrutement de personnel qualifié et l’amélioration des moyens logistiques sont nécessaires pour garantir un accès équitable et de qualité aux soins de santé pour tous.
Réalisé par Ali Maman ONEP-Agadez