M. Dogari Bassirou, Directeur Général de l’Economie et des Réformes
La Direction nationale de la BCEAO a organisé, le 24 décembre 2025, une journée dédiée à la diffusion des comptes extérieurs du Niger au titre de l’année 2024. L’institution de cette journée s’inscrit dans une démarche stratégique visant à renforcer la transparence et l’appropriation des données économiques. Elle poursuit deux objectifs fondamentaux, à savoir l’amélioration de la connaissance et de l’accessibilité des comptes extérieurs, ainsi que le renforcement des cadres de dialogue existants entre les secteurs public et privé, en offrant un espace d’échanges et de réflexion sur les défis et opportunités économiques reflétés à travers le profil des comptes extérieurs et leur évolution.
La cérémonie d’ouverture a été présidée par le directeur général de l’Économie et des Réformes, M. Dogari Bassirou, représentant le ministre délégué auprès du Budget, en présence de la directrice de l’Agence principale de la BCEAO à Niamey, Mme Oumou Bembello, représentant le directeur national de la BCEAO pour le Niger. Au cours de cette journée, un accent a été mis sur les enjeux liés au rapatriement des recettes d’exportation de biens et de services qui constituent un maillon essentiel du financement des économies, de la consolidation des réserves de change et du renforcement de la liquidité bancaire. Les instructions d’application du règlement R06, entrées en vigueur le 1er août 2025, ont également fait l’objet d’une attention particulière afin d’en garantir une appropriation effective par l’ensemble des acteurs concernés, et surtout une mise en œuvre rigoureuse au service de l’efficacité des échanges économiques avec l’extérieur.
Dans leurs allocutions respectives, les deux intervenants ont insisté sur l’importance de cette journée qui offre l’opportunité de sensibiliser les acteurs économiques, les chercheurs et les autres utilisateurs sur l’importance des statistiques de la balance des paiements et de la position extérieure globale. Il s’agit également d’une occasion pour aborder le nouveau règlement des relations financières extérieures des États membres de l’UEMOA, dénommé R06, adopté en décembre 2024 à Bamako par le Conseil des ministres de l’Union, en remplacement du règlement R09 de 2010, afin de mieux l’adapter aux profondes mutations économiques, aux recommandations des acteurs et aux exigences accrues de conformité.
L’importance de la balance des paiements a également été mise en exergue tout au long des différentes interventions. Ainsi, il a été noté qu’elle constitue un outil d’analyse économique essentiel pour l’élaboration de politiques nationales efficaces. En effet, elle est un instrument central d’évaluation de l’intégration d’un pays à l’économie mondiale et de ses performances macroéconomiques externes. Elle permet notamment de mettre en lumière un déficit structurel des transactions courantes, en lien avec une structure fortement extravertie et une dépendance accrue de l’économie nigérienne vis-à-vis de l’extérieur, ainsi qu’une dynamique erratique du solde global. Cette rencontre a aussi permis de présenter les résultats de la balance des paiements 2024. Ainsi, au plan national, l’année 2024 a été marquée par le démarrage des exportations de pétrole brut sur le marché international, une campagne agricole hivernale 2024 excédentaire et la reprise des activités économiques après la levée des sanctions communautaires. Le Niger s’est montré résilient, avec une croissance économique de 10,3 % et de bonnes perspectives pour les prochaines années.
Dans son allocution, le directeur général de l’Économie et des Réformes a insisté sur la nécessité de mener des débats riches, susceptibles de déboucher sur des propositions pertinentes afin d’améliorer substantiellement le profil des comptes extérieurs du Niger.
Abondant dans le même sens, la directrice de l’Agence principale de la BCEAO à Niamey, Mme Oumou Bembello, représentant le directeur national de la BCEAO, a exhorté les participants à faire preuve davantage de diligence dans l’exercice consistant à remplir le questionnaire relatif à l’enquête sur la balance des paiements et aux autres enquêtes menées par la Banque centrale dans le cadre de la conduite de la politique monétaire. Mme Oumou Bembello a également rassuré les participants quant au bon usage et à la confidentialité des informations recueillies auprès de leurs structures. « Elles seront publiées de manière agrégée et ne sauraient en aucun cas être utilisées à d’autres fins, notamment à des fins de contrôle fiscal ou économique, conformément aux dispositions du règlement relatif aux relations financières extérieures des États membres de l’UEMOA », a-t-elle assuré.
Solde global de la balance des paiements, exportations, revenu primaire, revenu secondaire, recommandations
La balance des paiements est un outil important d’aide à la décision et de formulation de politiques économiques. On note qu’au cours de l’année 2024, le solde global de la balance des paiements du Niger est ressorti déficitaire de 114,7 milliards de FCFA, après 299,3 milliards en 2023, soit une amélioration de 184,6 milliards. Quant au solde courant, il s’est consolidé de 48,5 %, à la suite de l’amélioration de la balance des biens et services, malgré une détérioration du compte de revenu primaire.
Concernant les exportations, il a été indiqué qu’elles sont passées de 601,6 milliards de FCFA en 2023 à 918,9 milliards en 2024, soit une hausse de 52,7 %, en raison principalement des expéditions de pétrole brut. Cette performance a toutefois été atténuée par les secteurs uranifère et aurifère. S’agissant des importations, elles se sont inscrites en baisse de 22,7 %, en raison de la fin des travaux du pipeline d’exportation du brut. Toutefois, le déficit du revenu primaire s’est établi à 211,5 milliards de FCFA en 2024 contre 119,4 milliards un an plus tôt, en lien principalement avec la hausse des revenus des investissements versés aux investisseurs étrangers, notamment dans le secteur pétrolier.
Pour ce qui est du revenu secondaire, il est ressorti à 255,2 milliards de FCFA en 2024, soit un recul de 17 milliards par rapport à l’année précédente. Cette contre-performance est due à une baisse des transferts publics et privés, notamment des aides budgétaires. Quant au compte de capital, il s’est situé à 209,2 milliards de FCFA en 2024 contre 176,7 milliards en 2023, en raison essentiellement des dons-projets reçus par l’État et les autres secteurs.
Il ressort également de cette présentation que l’excédent des échanges financiers a atteint 519,3 milliards de FCFA en 2024, contre 1 238,3 milliards en 2023, en lien essentiellement avec la décélération des investissements directs étrangers et des autres investissements. En effet, les flux nets d’investissements directs étrangers se sont chiffrés à 204,5 milliards de FCFA en 2024 contre 617 milliards en 2023, en rapport avec l’achèvement des projets pétroliers.
Le même document soumis à l’appréciation des participants a révélé que l’examen de l’évolution des principaux postes de la balance courante du Niger montre que, à l’exception du revenu secondaire (transferts courants), tous les autres postes présentent des soldes négatifs. À cet égard, le document souligne que des mesures devraient être envisagées pour assurer une meilleure maîtrise du déficit courant. Ces mesures s’articulent autour de plusieurs axes, notamment le soutien accru aux PME/PMI par la facilitation de l’accès aux financements et le recours maîtrisé aux partenariats public-privé afin de renforcer l’offre nationale sans accroître excessivement l’endettement public, dans le but de dynamiser la production locale et les exportations. A cela s’ajoutent la diversification et la transformation structurelle de l’économie à travers le développement des filières agricoles et agro-industrielles, combinées à la promotion de l’industrie manufacturière, afin de réduire la dépendance aux importations de biens de première nécessité et d’améliorer la balance commerciale du pays. La mise en place d’un cadre attractif pour les investissements directs étrangers, notamment dans le cadre de la ZLECAF, afin de renforcer l’intégration commerciale et la compétitivité externe du pays, le développement ciblé de l’offre nationale de services, notamment dans les domaines du transport, de l’ingénierie, de la santé, de l’éducation ainsi que des bâtiments et travaux publics, afin de substituer progressivement les prestations importées et de réduire la demande extérieure nette de services. La poursuite des politiques visant à promouvoir les industries culturelles et touristiques, l’amélioration de la qualité et de la fiabilité de la production statistique, le renforcement de la collaboration entre les acteurs statistiques et la sensibilisation continue des différentes parties prenantes sur l’importance de ces statistiques constituent aussi des axes majeurs de ces recommandations.
Rahila Tagou (ONEP)
