
M. Mounahi Abdoulphata
Le Fonds d’Appui à la Formation Professionnelle et à l’apprentissage (FAFPA) œuvre, depuis quelques années, pour améliorer et adapter les compétences des jeunes au Niger. Monsieur le Directeur Général, voudriez-vous nous rappeler brièvement les objectifs du Fonds et où en sommes-nous par rapport à l’impact de vos actions ?
Le Fonds d’Appui à la Formation Professionnelle et à l’Apprentissage est un Établissement Public, dont le principal objectif est de contribuer, par le financement, à la mise en œuvre de la politique du Gouvernement en matière d’Enseignement et de Formation Techniques et Professionnels (EFTP) notamment dans les domaines de la formation professionnelle continue, diplômante, qualifiante, par apprentissage, de l’orientation, de l’accompagnement et de l’insertion professionnelle.
Pour ce qui est de l’impact de nos actions, on peut noter, entre autres, l’amélioration des compétences des jeunes déscolarisés et non scolarisés afin de faciliter leur insertion sur le marché du travail, la promotion de l’emploi et de l’auto-emploi des jeunes, le renforcement de la formation professionnelle locale par les appuis aux dispositifs de l’EFTP, la réduction de la pauvreté, la lutte contre le chômage et les déviances sociales et l’amélioration des conditions de vie des communautés locales par l’insertion socio-économique, la stimulation de l’économie locale par la création d’emploie et la formation des techniciens qualifiés, l’amélioration de la qualité des enseignements et apprentissage par le renforcement des capacités des formateurs des secteurs formel et non formel, l’amélioration de la compétitivité des entreprises assujetties à la TAP à travers le renforcement des capacités de leur personnel et l’amélioration des cadres de vie et de travail des ateliers d’artisans par l’appui à la labellisation.
Quelle lecture faites-vous de l’employabilité des jeunes, aujourd’hui au Niger ?
L’employabilité de la jeunesse nigérienne constitue, à l’heure actuelle, une préoccupation stratégique des plus hautes autorités de notre pays, comme en atteste le Programme de résilience pour la sauvegarde de la patrie. Cette problématique, désormais au cœur des débats socio-économiques et politiques, revêt une dimension pluridimensionnelle, englobant l’éducation et la formation, l’adéquation des compétences aux besoins du marché, la création d’opportunités professionnelles ainsi que le développement de l’entrepreneuriat. La jeunesse, en tant que vecteur essentiel de la dynamique économique nationale, demeure particulièrement vulnérable aux influences déstabilisatrices, notamment celles issues des mouvements terroristes, en l’absence d’un encadrement et d’une prise en charge appropriés.
La question de l’emploi se présente dès lors comme un enjeu délicat, en raison de la rareté des recrutements tant au niveau de l’État que dans le secteur privé, ainsi que du déficit de compétences adaptées aux métiers porteurs, freinant de facto l’esprit entrepreneurial des jeunes.
Dans ce cadre, et conformément au mandat qui nous a été confié par les plus hautes instances de l’État, le FAFPA fait de la promotion de l’employabilité des jeunes une priorité absolue. À ce titre, l’institution déploie un ensemble de dispositifs visant à accompagner les bénéficiaires de ses programmes de formation, en favorisant tant leur insertion directe sur le marché de l’emploi que le développement de leur auto-emploi et de leurs initiatives entrepreneuriales.
L’enseignement professionnel et technique est désormais, sous l’égide des nouvelles autorités du Niger, une priorité du gouvernement. Quelle est, à présent, la stratégie du FAFPA, dans le cadre de la politique du gouvernement de la Refondation ?
Dans le cadre de la politique nationale de Refondation, le Fonds d’Appui à la Formation Professionnelle et à l’Apprentissage a engagé une réorientation stratégique de ses interventions afin de répondre aux priorités définies par le Gouvernement en matière d’Enseignement et de Formation Techniques et Professionnels. Cette stratégie repose sur quatre axes majeurs.
Le FAFPA met un accent particulier sur la conception et le financement de formations orientées vers les métiers porteurs, identifiés en concertation avec les acteurs socio-économiques (BTP, agriculture, élevage, énergies renouvelables, services numériques, etc.). L’objectif est de garantir que l’offre de formation corresponde aux besoins réels du marché du travail et favoriser l’insertion professionnelle des jeunes et des femmes.
En ce qui concerne le renforcement des dispositifs de formation et d’apprentissage, le FAFPA accompagne la modernisation des dispositifs d’apprentissage traditionnel et dual, tout en renforçant les capacités techniques et pédagogiques des centres de formation publics et privés. Cela inclut le soutien à l’équipement, l’élaboration de curricula adaptés et la formation continue des formateurs et des entreprises.
Au sujet de l’inclusion et l’équité sociale, conformément aux orientations de la Refondation, le FAFPA déploie des mécanismes spécifiques pour favoriser l’accès des couches vulnérables notamment les jeunes déscolarisés et non scolarisés, les filles et femmes, ainsi que les personnes vivant en zones rurales à des formations qualifiantes et professionnalisantes.
Quant à la gouvernance et le partenariat, à ce niveau, le FAFPA œuvre à une meilleure gouvernance de la formation professionnelle à travers le renforcement du dialogue avec les partenaires techniques et financiers, les organisations professionnelles et les collectivités territoriales. L’ambition est de promouvoir une approche partenariale, inclusive et transparente, en phase avec les objectifs de développement économique et social du pays.
En résumé, la stratégie du FAFPA dans le cadre de la Refondation consiste à faire de la formation professionnelle un levier de création d’emplois, de lutte contre le chômage et de transformation structurelle de l’économie nationale, en veillant à ce que chaque intervention ait un impact direct sur l’insertion socioprofessionnelle des bénéficiaires et la compétitivité des secteurs productifs.
Y-a-t-il, à ce jour des résultats appréciables, à mettre à l’actif du Fonds ?
Oui, à ce jour, l’on peut affirmer que le FAFPA a enregistré des résultats appréciables. En effet, plusieurs actions ont été menées, aussi bien dans le financement des formations que dans l’appui à l’équipement des dispositifs de formation et à l’insertion socioprofessionnelle des jeunes et des femmes, à ce titre des bénéficiaires (jeunes et groupements) de formation appuyés avec des kits d’installations et ou fonds d’amorçage sont aujourd’hui des chefs d’entreprises et emploient un ou plusieurs jeunes, des entreprises ayant reçu un accompagnement en renforcement des capacités ont vu leur gouvernance et leur productivité s’améliorer, des artisans ont vu leurs ateliers mis à niveau, des ateliers des centres de formation formelle ont vu leurs capacités renforcées et des formateurs de centre formel et non formel ont vu leurs compétences renforcées.
La réalisation des objectifs assignés au FAFPA demande beaucoup des moyens et des efforts. Quels sont les principaux défis liés aux missions du Fonds ?
Le FAFPA dans la réalisation de ses missions fait face à plusieurs défis majeurs. Parmi ceux-ci, l’on peut citer l’insuffisance des ressources financières et matérielles, au regard de l’ampleur des besoins de formation exprimés dans l’ensemble des régions du pays, la couverture nationale encore limitée, qui restreint l’accessibilité équitable des dispositifs de formation, notamment dans les zones rurales et d’insécurité, l’adéquation formation-emploi qui exige un effort permanent d’actualisation et d’adaptation des curricula aux évolutions du marché du travail et aux secteurs porteurs de l’économie nationale. Il y a aussi la disponibilité des ressources humaines qualifiées, aussi bien pour l’ingénierie de formation que pour l’encadrement technique des apprenants sur toute l’étendue du territoire, les défis liés au suivi-évaluation et à la mesure de l’impact, afin de garantir la pertinence, l’efficacité et la durabilité des actions financées et les contraintes structurelles et institutionnelles, notamment la coordination avec les autres acteurs publics et privés intervenant dans le champ de l’EFTP.
Ainsi, malgré les efforts considérables déployés, la réussite des missions du FAFPA demeure conditionnée à la mobilisation accrue de moyens, à une meilleure synergie institutionnelle et au renforcement continu des capacités opérationnelles.
Quels sont les rapports du FAFPA avec les autres institutions du secteur de la formation professionnelle, de l’apprentissage et de l’insertion des jeunes ?
Le FAFPA entretient des rapports étroits et complémentaires avec l’ensemble des acteurs institutionnels du secteur de la formation professionnelle, de l’apprentissage et de l’insertion des jeunes. Ces relations se traduisent principalement par la coordination des interventions. Le FAFPA œuvre en synergie avec le Ministère en charge de la Formation Professionnelle, celui en charge de l’Emploi, celui en charge de l’Artisanat, celui en charge de l’Agriculture, celui en charge du Commerce, et celui en charge de la Jeunesse afin d’assurer une cohérence entre ses actions et les politiques publiques nationales.
S’agissant du partenariat opérationnel, il collabore avec les centres publics et privés de formation, les chambres consulaires, les organisations professionnelles et les associations de jeunes, en vue de soutenir et de financer des actions de formation adaptées aux besoins du marché du travail.
En ce qui concerne la complémentarité des missions, le FAFPA apporte un appui financier et technique aux dispositifs nationaux d’apprentissage et d’insertion mis en œuvre par d’autres institutions, renforçant ainsi leur efficacité et leur portée.
L’ancrage dans les dispositifs de gouvernance à travers sa participation aux cadres de concertation sectoriels, le FAFPA contribue activement à la réflexion stratégique et au suivi-évaluation des politiques et programmes relatifs à la formation et à l’emploi.
En résumé, les rapports du FAFPA avec les autres institutions reposent sur une logique de concertation, de partenariat et de complémentarité, dans l’optique de renforcer la pertinence et l’impact des actions menées en faveur de l’employabilité et de l’insertion des jeunes.
Quelles sont, enfin, vos perspectives ?
Les perspectives du FAFPA s’inscrivent dans une dynamique de consolidation et d’innovation visant à renforcer son rôle de levier stratégique pour le développement des compétences professionnelles et l’insertion socio-économique des jeunes. Dans cette optique, le FAFPA envisage notamment l’élargissement de son champ d’intervention, à travers la diversification des secteurs prioritaires, en tenant compte des besoins émergents de l’économie nationale et des mutations du marché du travail, la mise en place de mécanismes renforcés d’adéquation formation-emploi. Il prévoit également le renforcement de la gouvernance et de la transparence, par une gestion axée sur les résultats et un suivi-évaluation rigoureux, permettant d’optimiser l’impact des ressources mobilisées, l’accroissement des partenariats stratégiques, tant au niveau national qu’international, pour mobiliser des financements complémentaires et bénéficier de transferts d’expertise technique, l’accompagnement des initiatives entrepreneuriales des jeunes et des femmes, à travers des dispositifs adaptés de formation, de financement, de l’appui conseil et de suivi post-formation et la digitalisation progressive des processus de gestion et de suivi, afin de moderniser l’action du FAFPA et de rapprocher davantage ses services des bénéficiaires.
Ces perspectives traduisent l’ambition du FAFPA de demeurer un acteur central et crédible dans la mise en œuvre des politiques publiques en matière de formation professionnelle, d’apprentissage et d’employabilité des jeunes, contribuant ainsi au succès de la Refondation nationale.
Propos recueillis par Abdoulaye Mamane (ONEP)