Le 32ème forum des Chefs d’Etat et de Gouvernement du Mécanisme Africain d’Evaluation par les Pairs (MAEP) s’est tenu hier jeudi 9 février 2023 sous la présidence de SE. Julius Maada Bio, Président de la République de Sierra Leone, Président en exercice du MAEP. Le Président de la République, SE. Mohamed Bazoum est intervenu par visioconférence lors de ce forum au cours duquel le premier rapport d’évaluation du Niger a été présenté par M. Cherif Rahmani, Responsable de l’évaluation Pays du Niger. La synthèse du rapport révèle que le Niger a globalement enregistré des progrès notables dans tous les domaines thématiques du Mécanisme. Ce rapport s’articule autour de trois (3) points essentiels à savoir les atouts indéniables ; les défis lourds de conséquences à relever et enfin les opportunités et les risques.
En termes d’atouts, le rapport de M. Cherif Rahmani souligne la position géographique stratégique du Niger qui est situé entre l’Afrique du Nord et celle au Sud du Sahara. Il y a aussi les ressources naturelles (4è producteur mondial d’uranium, producteur du pétrole, d’or, de charbon, etc.), un potentiel agricole important, un climat des affaires qui s’est fortement amélioré, des traditions millénaires, des valeurs sociales et une diversité ethnique qui fait la richesse humaine et la fraternité de la population et une population jeune, etc. A cela, il faut ajouter une constitution et des institutions stables qui ont permis au pays de réaliser sa 1ère alternance pacifique à la tête de l’Etat en 2011 et 2021.
Toutefois précise le rapport, ces atouts ne sont pas des acquis. «Ils sont pour le Niger, une responsabilité que la génération actuelle doit savoir assumer, et une opportunité qui ne manquera pas d’être contestée», souligne le rapport.
Les principaux défis qui se posent au Niger se présentent sur différents plans. Ainsi sur le plan politique, le défi majeur demeure celui de la sécurité, de la reconquête de la confiance des citoyens, de la consolidation des institutions démocratiques, de leur efficacité et de leur protection contre toutes les formes de dérives et d’instrumentalisation.
Sur le plan économique et managérial, le rapport note que le pays ‘’reste partagé entre des politiques dites pro-pauvres et de soutien aux couches les plus vulnérables et d’autres approches plus favorables à l’accumulation du capital et à la croissance’’. Les autres défis sur ce même plan demeurent encore le poids du secteur informel dans l’économie, la concurrence des produits étrangers à la faveur de la libéralisation ayant conduit à la désindustrialisation du pays, etc.
Enfin sur le plan social, les défis relevés se résument fondamentalement à la problématique de la forte et rapide croissance démographique.
A côté de ces défis, le rapport souligne des opportunités certaines sur lesquelles le Niger peut compter et exploiter pour sa prospérité. Il s’agit notamment de sa jeune population (source d’énergie, de créativité et de résilience) ; les transformations technologiques et numériques notamment ; les ressources naturelles et le potentiel en énergies renouvelables ; le mouvement d’intégration africaine et enfin les valeurs traditionnelles et la cohésion sociale des Nigériens. «La résilience des Nigériens, leur ‘’fraternité’’ et leur unité constitueront un socle d’avenir», précise le rapport.
Le dernier aspect de ce rapport porte sur les risques futurs pour le Niger. Ces risques ont pour noms une croissance démographique débridée et incontrôlée avec des jeunes mal formés ; les changements climatiques ; la situation sécuritaire de l’ensemble de la région ; la dépendance des matières premières et des minerais ; l’insuffisance des compétences nécessaires dans l’administration publique et enfin le rôle des nouveaux médias et des réseaux de communication.
Dans sa réaction sur la présentation du rapport, le Président Mohamed Bazoum a articulé son intervention autour de quatre (4) thématiques prévues par le document de base du MAEP que sont : la démocratie et la gouvernance politique ; la gouvernance économique ; la gestion et la gouvernance des entreprises et enfin le développement socio-économique à large assise. Certaines questions transversales essentielles pour le Niger ont aussi été évoquées par le Chef de l’Etat.
Des avancées notables
Ainsi à l’entame de son discours, le Président Bazoum a rendu hommage à son prédécesseur, le Président Issoufou Mahamadou qui a fait adhérer le Niger au MAEP en juillet 2012, marquant ainsi l’acceptation par le Niger des principes et valeurs de solidarité et de partage qui sous-tendent ce dispositif conçu par les africains, pour les africains. Il a ensuite félicité les cadres nigériens des Instituts Techniques de Recherche, ceux du Secrétariat National Permanent et les membres de la Commission Nationale de Gouvernance du MAEP, les experts africains, ainsi que les partenaires techniques et financiers qui ont contribué à la production de ce rapport.
Ainsi, relativement à la démocratie et la gouvernance politique, le président Bazoum a souligné le caractère démocratique de l’Etat avec en toile de fond l’attachement du peuple nigérien aux principes de la démocratie pluraliste et au respect des droits humains, consacré par la Constitution. Ce qui a permis au pays d’enregistrer des progrès politiques importants qui se sont traduits entre autres par la vitalité des partis politiques et de leur pleine participation aux compétions électorales, la limitation des mandats présidentiels qui lui a permis de réaliser sa première alternance par une transmission pacifique du pouvoir d’Etat entre deux Présidents successivement élus.
Le Chef de l’Etat a également évoqué la ratification de plusieurs instruments internationaux et leur intégration dans le dispositif juridique national, l’adoption de politiques et stratégies nationales et la mise en place de plusieurs Institutions et mécanismes pour consolider les acquis démocratiques, protéger et promouvoir les droits et libertés de la population sans discrimination.
Au titre de la gouvernance et gestion économique, le Président Bazoum a relevé que l’Etat du Niger a entrepris des réformes économiques majeures. Celles-ci ont eu entre autres pour résultats, «une croissance assez forte et soutenue du PIB avec un taux moyen d’environ 5,6% entre 2018 et 2020, assortie d’une inflation contenue et une tendance à un recul du déficit budgétaire», selon les mots du Chef de l’Etat.
Des efforts pour aller de l’avant
Le Président Bazoum garde toutefois une claire conscience des défis qui restent à relever sur le plan de la gouvernance économique. Des défis qu’il a décidé de relever à travers 5 grands engagements. Il s’agit premièrement de la lutte contre la corruption et l’impunité. «A ce sujet, nous avons accru les moyens de la Haute Autorité à la Lutte contre la Corruption et les Infractions Assimilées (HALCIA) pour qu’elle accomplisse son travail de moralisation de la gestion des deniers publics», a-t-il précisé.
Le deuxième engagement est celui de l’accélération de la décentralisation financière et du renforcement des capacités humaines et techniques des administrations régionales et communales. Le troisième engagement est celui de la réduction de la forte dépendance financière de l’économie nigérienne du concours de ses partenaires pour son équilibre budgétaire. Sur ce point, le pays mise sur l’essor attendu du secteur pétrolier, la modernisation des administrations fiscale et douanière, l’élargissement de l’assiette fiscale, l’intensification de la lutte contre la corruption et l’amélioration du climat des affaires.
Quant au quatrième engagement, il porte sur la réduction du déficit structurel de la balance commerciale. Enfin le cinquième engagement est relatif à la maîtrise de l’énergie électrique. Ainsi à travers la Stratégie nationale d’accès à l’électricité (SNAE) qui est en cours de mise en œuvre, le Niger vise à faire passer le taux d’électrification de 20% aujourd’hui à 80% à l’horizon 2035 avec un objectif intermédiaire de 40% en 2025.
Au titre de la gouvernance des entreprises, le Président de la République a relevé les importantes avancées enregistrées par le pays au cours de ces dix dernières années. En effet, rappelle le Chef de l’Etat, le Niger a occupé le 22e rang à l’échelle du continent dans le classement «Doing Business», 2020 tandis que son classement à l’échelle mondiale s’est amélioré de 11 places entre 2019 et 2020. «Ces performances sont le fruit, non seulement, de la stabilité politique de la dernière décennie, mais aussi des réformes économiques et institutionnelles mises en œuvre», a estimé le Président Bazoum.
Sur le plan du développement socio- économique, le Chef de l’Etat souligne que l’exploitation optimale des potentialités économiques du pays, conformément aux axes stratégiques du Plan de Développement Economique et Social (PDES 2022-2026), commande au gouvernement de focaliser ses efforts sur le développement du capital humain, l’inclusion et la solidarité, la consolidation de la gouvernance, de la paix et de la solidarité, et la transformation structurelle de notre économie.
Relevant que le Niger fait partie des pays qui enregistreront une forte croissance économique à partir de 2023, le Chef de l’Etat a annoncé sa volonté de mettre à profit cette opportunité pour développer plusieurs secteurs économiques notamment l’agriculture, les infrastructures, l’énergie, les industries, les nouvelles technologies, etc. «Nous mettrons un accent particulier sur la modernisation de notre secteur rural à travers la mise en place d’un programme de pôles agro-industriels basés notamment sur un partenariat public-privé. Cela se traduira par la création d’unités dans chacune de nos régions, en fonction des avantages comparatifs de celles-ci, intégrant des centres ruraux de collecte et de transformation des produits agricoles», a-t-il détaillé, avant de préciser que l’inclusion et la solidarité sont parmi les fils conducteurs de ce Programme.
Le Président Bazoum a par ailleurs tenu à souligner la pertinence de la prise en compte et en charge de certaines questions qu’il a qualifiées de «hautement prioritaires». Il s’agit entre autres de la prévention et la gestion des effets pervers du changement climatique, l’accès aux services sociaux de base (santé, eau, énergie et surtout l’éducation)
Le Président de la République a enfin souligné l’importance du MAEP qui dit-il, vise l’instauration d’une culture d’évaluation de la gouvernance de nos Etats, entre pairs soucieux d’un développement socio-économique harmonieux profitable aux populations, résultant de transformations structurelles. «Nous avons apprécié à travers le Rapport, la certification des actions menées au Niger dans les quatre domaines de gouvernance du MAEP. Nous avons également pris bonne note des recommandations pertinentes susceptibles de nous permettre d’aller de l’avant», a conclu SE. Mohamed Bazoum.
Par Aïchatou Hamma Wakasso(onep)