La Commission Nationale des Droits Humains (CNDH) a rendu publique, hier matin à Niamey, une déclaration relative «aux évènements du 15 mars 2020 et aux entraves dont elle a dit avoir été victime dans l’exercice de ses missions». La déclaration a été lue par le rapporteur général de la CNDH, M. Moussa Hamidou Talibi Moussa, en présence du président et des autres membres de de l’institution.
Dans la déclaration, la CNDH a rappelé les différentes démarches qu’elle a entreprises conformément à son mandat constitutionnel, notamment l’entretien avec les acteurs de la Société Civile initiateurs du meeting projeté à la Place de la Concertation. L’objectif, explique la déclaration, «était d’amener ces leaders à sursoir à toute action tendant à braver tout arrêté d’interdiction et à privilégier la saisine des autorités judiciaires compétentes en lieu et place d’une confrontation ouverte avec les Forces de maintien de l’Ordre».
A la suite de l’évènement, poursuit la déclaration, la CNDH s’est rendue successivement au marché Tagabati et à la Police Judicaire, les 16 et 17 mars 2020 pour apporter son soutien moral, exprimer sa compassion aux victimes, et constater de visu l’étendue des dégâts, suite à l’incendie. Par ailleurs, la CNDH a rappelé qu’il ressort de cette visite, «un bilan se soldant par la mort tragique de quatre personnes dont une femme, des blessés graves et d’importants dégâts matériels». A la suite de ces évènements, «quinze personnes, dont des leaders de la Société Civile et des étudiants, ont été interpelées et gradés-à-vue dans les locaux de la Police Judiciaire», a ajouté le rapporteur général de la CNDH.
Toujours d’après la déclaration, le Président de la CNDH, s’est entretenu avec les leaders de la Société Civile et la CNDH, puis il s’est aussi intéressé au fonctionnement de l’unité d’enquête avant de faire remarquer que lesdits «leaders de la Société Civile n’ont subi aucun acte de torture, ni traitement cruel, inhumain ou dégradant, aussi bien au stade de l’interpellation qu’à celui de la garde-à-vue». La CNDH a noté avec satisfaction qu’ils ont librement eu accès aux avocats de leur choix et reçoivent les visites de leurs poches conformément aux dispositions des textes nationaux, communautaires et internationaux.
Toutefois, a constaté la CNDH, «au moment où s’achevait l’entretien avec les leaders de la Société Civile et que la délégation allait entamer la rencontre avec les autres gardés-à-vue (étudiants et autres) elle s’est vue empêcher de continuer ce travail par les autorités de la Police Nationale». Cet acte considéré grave «posé à l’encontre des institutions constitutionnelles, constitue un précédent dangereux pour le renforcement de l’Etat de Droit et de la Démocratie», fait observer la déclaration.
La déclaration a tenu à rappeler que la CNDH tire sa légitimité et son fondement juridique de «notre Loi fondamentale en son article 44 et des engagements internationaux auxquels le Niger a librement souscrits». Aussi, souligne la déclaration, «elle est une autorité administrative indépendante des pouvoirs publics,
pluraliste et démocratique, conforme aux Principes de Paris. De ce qui précède, nul individu, nulle autorité ne peut lui donner des injonctions, ni lui faire obstruction dans l’exercice de son mandat».
Au regard de tout ce qui précède, «la CNDH se réserve opportunément le droit de porter plainte avec constitution de partie civile devant l’autorité judiciaire compétente», indique la déclaration. Aussi, la CNDH a recommandé au Gouvernement «la mise en place d’une Commission d’Enquête Indépendante pour faire la lumière et situer les responsabilités, suite aux évènements survenus le 15 mars 2020». Elle a réaffirmé, «sa volonté inébranlable, sa détermination sans faille de continuer à promouvoir et à protéger les Droits de l’Homme et les Libertés Fondamentales pour tous et en toute circonstance sur l’ensemble du territoire, conformément au serment prêté par ses membres devant l’Assemblée Nationale».
Mamane Abdoulaye(onep)