
Mme Oussein Rahama ...
Au Niger, produire de l’encens est une activité traditionnelle très importante pour de nombreuses femmes. Une activité bien lucrative, pratiquée de mère en fille, même si le secteur reste parfois handicapé à la fois par des freins liés à la productivité et à la commercialisation. En effet, le processus de fabrication est jugé par certains d’archaïque avec les mêmes façons, les mêmes méthodes mais qui doit évoluer au fil du temps. Toutefois, chaque femme a ses secrets de fabrication, ce qui a pour conséquence une production d’encens très diversifiée. Pour Mme Ousseini Hadjia Rahama promotrice de la marque ’’ My Encens’’ l’objectif de magnifier la femme afin de booster sa confiance en elle.
L’encens ‘’Toura Ran Houta’’ ou dougou, donne un ‘’goût à la vie du couple’’, et est très utilisé au Niger. Fait à base de résidus de différents arbres, c’est un mix de plusieurs parfums traditionnels qui consiste à créer une odeur et ou une senteur spéciale, parfois très envoutante. Les femmes qui excellent dans ce commerce rivalisent pour créer le meilleur encens à base de bois de santal, de musc et de divers parfums.
Hadjia Rahama fondatrice de la marque ‘’My Encens’’ avance les raisons qui l’ont poussée à exercer ce métier. « Malgré le fait que je sois détentrice d’une maîtrise en gestion commerciale et administrative, je me suis investie pleinement dans le commerce des parfums et encens traditionnels. J’ai toujours eu le désir d’être une femme indépendante », confie-t-elle.

Afin de faire évoluer sa marque, Rahama essaie de mettre un point d’honneur en répondant à chaque message et ou commentaires. Ce qui lui a valu justement d’être bien suivie sur les réseaux sociaux. Sa motivation au quotidien c’est de rendre chaque femme sublime avec des soins appropriés. Elle dispose dans une somptueuse boutique bien soignée située en face du Ministère de la Fonction Publique toute une gamme de produits cosmétiques, de parfums, d’encens.
« Nous nourrissons beaucoup d’ambitions mais le statut de salarié ne sera pas toujours le cadre idéal permettant de réaliser forcement notre potentiel. J’ai donc trouvé dans l’auto entreprenariat une opportunité pour fendre l’armure », murmure-t-elle avec beaucoup d’enthousiasme.
Un mode de vie très présent dans nos foyers
Cette épouse et mère de quatre enfants a décidé de faire de cette passion, son métier, partager son plaisir avec de nombreuses femmes ou même des hommes aux goûts exigeants. Elle a été fortement inspirée par des modèles au sein de sa propre famille. En effet, à quelques exceptions près, ses frères et sœurs exercent presque tous des métiers libéraux d’où le choix de s’installer à son propre compte. Conciliant ainsi ambition personnelle et tradition familiale.
Bien connu des femmes nigériennes, l’encens est utilisé pour embaumer les chambres. Nos sœurs ne lésinent point sur les moyens pour apporter une attention particulière et rigoureuse à l’hygiène. Celles qui l’utilisent se distinguent des autres par leur façon de s’entretenir et d’entretenir leurs foyers en s’appuyant sur ces éléments combien indispensables dans la tenue d’un foyer. Ces produits locaux sont naturels, ils embaument les chambres, rafraichissent l’atmosphère et créent un climat propice à la romance.
Hadjia Rahama propose une gamme de produits aux visiteurs qui vont de l’encens aux parfums, en passant par les savons parfumés, les laits raffinés, bref une belle collection de produits pour le confort de l’odorat et du bien-être. Ces principaux produits sont plus que du commerce, c’est une expérience de bien-être qu’elle offre. « Nous nommons nos produits ainsi : sandal, boulettes, divine, mystère, coco karité, pink Team, blue. Les Encens, Dougou Touraren wouta ou gowé qui en général, sont faits à base de bois, résines, fleurs, épices et même à base de coton », a-t-elle précisé.
Améliorer les techniques de fabrication et de l’emballage de l’encens
Expliquant le processus de travail de cette production traditionnelle qu’elle juge fastidieux et long, Hadjia Rahama dit qu’il faut travailler des heures durant en essayant de fragmenter les morceaux de bois qui sont parfois si gros utilisés pour les mélanger avec des parfums ; des ingrédients odorants etc. Il faut porter des masques pour éviter l’inhalation des ingrédients nocifs lors des mélanges, ainsi que des lunettes, des gants pour empêcher les brûlures et ou les fumées irritantes. Afin de mieux valoriser la présentation de l’encens, surtout ceux de haute qualité, et par conséquent augmenter le chiffre d’affaires, Mme Ousseini fabrique ces encens avec la plus grande précaution. Elle les protège mieux contre la concurrence, principalement lors des expositions dans les grandes foires nationales et internationales
« Nos matières premières nous parviennent des marchés locaux, des marchés de la sous-région, de l’Arabie et souvent de l’Occident. Nous mettons également l’accent sur le choix de nos matières car nous choisissons toujours la meilleure qualité. Nous faisons un travail minutieux au niveau de la fabrication et de l’emballage. Nous mettons l’accent aussi sur le packaging, la vente et la présence de notre produit » dit-elle toute fière.
Pour une préparation adéquate Hadjia Rahama recommande vivement d’utiliser des conditionnements en verre d’apparence luxueuse. « Nous avons des difficultés liées à notre secteur d’activité. Nous pouvons énumérer le manque des fonds. C’est laborieux parfois de trouver les matières premières. Sans oublier l’emballage qui nous donne souvent du fil à retordre quant à la disponibilité. Il y a également la mévente due à la concurrence déloyale car, nos frères et sœurs sont plus attirés par ce qui provient de l’extérieur plutôt que des produits fabriqués localement », se désole Mme Rahama.
Par ailleurs, dans la mesure où une profession est plus dynamique quand elle est organisée, Hadjia Rahama essaie de convaincre les femmes fabriquant l’encens, habituées depuis toujours à travailler seules, à se rassembler en groupements. Cette évolution leur permettrait ainsi de transformer leur activité, actuellement traditionnelle, en une activité artisanale. L’organisation collective de la production d’encens favoriserait, de plus, l’octroi d’aides financières de la part des pouvoirs publics rendant ainsi possibles les investissements nécessaires au développement de cette activité.
Pour Rahama, l’émancipation de la femme nigérienne se fait sans grand bruit à travers de nombreux canaux, parfois insoupçonnés comme la religion et d’autres trajectoires dominantes qui n’ont pas besoin d’une confrontation sociale contre-productive. « Nos meilleurs alliés dans cette dynamique ce sont nos époux pour lesquels l’avenir de nos filles est une grande préoccupation. Je fonde espoir pour l’avenir de la femme Nigérienne », dit-elle avant de souhaiter pouvoir implanter et distribuer ses produits un peu partout au Niger et en Afrique. Son message est motivant. «Tout est possible dans la vie, il suffit d’y croire et de se donner les moyens de réussir. Restez concentré sur ce qui vous rend heureux, le bonheur est une grande liberté qui n’a pas de prix ».
Aïssa Abdoulaye Alfary (ONEP)