
Une vue des réfugiés et demandeurs d’asile alignés à l’occasion de la visite du Gouverneur
Le Gouverneur de la région d’Agadez, le Général de Brigade Ibra Boulama Issa, a effectué une mission de suivi des flux migratoires dans les Départements d’Arlit, Ingall et Tchirozérine. Ainsi, après la Commune Urbaine d’Arlit, le mercredi 14 Mai 2025, le Gouverneur et la délégation qui l’accompagne se sont rendus successivement à Assamaka (département d’Ingall), le jeudi 15 mai 2025 et dans la Commune Urbaine d’Agadez (département de Tchirozérine), le samedi 17 Mai 2025. L’objectif de cette mission est de s’enquérir de la situation qui prévaut dans ces localités concernant la crise migratoire caractérisée depuis le début du mois d’Avril, par un refoulement massif et sans précédent des migrants par l’Algérie.
Ratissés de force et débarqués dans les mêmes conditions au « point zéro », la frontière Nigéro-Algérienne, par les autorités algériennes, ces migrants sont délaissés à leur sort dans les conditions inhumaines insupportables, sans aucun respect des droits humanitaires les plus élémentaires, c’est-à-dire sans eau, ni alimentation, sans assistance médicale pour les malades et les personnes vulnérables (femmes, enfants, blessés et personnes âgées), sous une forte chaleur et avec toutes les conséquences et les risques auxquelles ils sont exposés. Dans ce ‘’no man’s land’’, ces migrants parcourent 15 km, pour rejoindre Assamaka, la localité nigérienne frontalière avec l’Algérie, où ils sont pris en charge et assistés par les Forces de Défense et de Sécurité nigériennes, les services sociaux publics et les organisations humanitaires. Cette situation a atteint son paroxysme en début du mois d’Avril, où il a été enregistré plus de 7 000 personnes refoulées qui ont réussi à atteindre Assamaka. A la date de la visite du Gouverneur, le nombre de migrants à Assamaka est de 2 467 personnes, parmi lesquelles 261 femmes et 253 mineurs dont 91 filles. Toutes ces personnes bénéficient d’une prise en charge intégrale grâce à l’accompagnement des agences des Nations Unies à savoir l’OIM, l’UNICEF, l’UNHCR, le PAM et certaines ONG de mise en œuvre dont Coopi et Karkara.
C’est pourquoi dans cette mission, le Gouverneur s’est fait accompagner des membres du Comité régional de Gestion des Crises et Catastrophes, des représentants des Organisations Humanitaires intervenants dans la chaîne de prise en charge et la gestion des flux migratoires, notamment, l’Organisation Internationale des Migrations (OIM), l’Agence des Nations Unies pour l’Enfance (UNICEF), le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR), le Programme Alimentaire Mondial (PAM), mais aussi, les cadres régionaux des services concernés par la gestion de cette situation, la Cellule Régionale du Dispositif National de Prévention et de Gestion des Crises Alimentaires au Niger, la Direction Régionale de l’Etat Civil et des Migrations, la Direction Régionale du Plan, les responsables des Forces de Défense et de Sécurité, les autorités administratives départementales et communales des localités visités, à savoir les Préfets des Départements d’Ingall et Arlit et l’Administrateur Délégué de la Commune Rural d’Ingall.
C’est après plus de quatre heures de route sur un terrain difficile par endroit et sous une température qui avoisine les 46°C, que le Gouverneur de la région d’Agadez et la délégation qui l’accompagne sont arrivés à Assamaka qui constitue la deuxième étape de cette mission de suivi des flux migratoires. Malgré cette canicule, la population est sortie pour accueillir la délégation avec au menu de cet accueil les honneurs militaires rendus au Gouverneur par un détachement mixte des Forces de Défense et de Sécurité d’Assamaka.
A la tête de cet accueil, le Commissaire de Police Abdou Yayé Sina, Commissaire du Commissariat Spécial Frontalier (CSF) d’Assamaka, le Chef du village d’Assamaka et les responsables des Forces de Défense et de Sécurité en poste à Assamaka. Après cet accueil chaleureux, le Gouverneur s’est transporté au Commissariat Spécial, où il a visité les différents services. C’est ainsi que la délégation a visité le bureau du Commissaire, la Salle Technique de stockage des données sur la migration, la salle de profilage des migrants et le Champ solaire qui alimente le commissariat en électricité. Partout où il a passé, le Gouverneur a reçu des explications sur les activités et les services qui sont offerts. Ce Commissariat joue un rôle déterminant dans le processus de gestion des crises migratoires à travers les différents services qu’il offre, notamment au niveau du profilage. Il faut noter qu’outre le financement de sa construction, ce commissariat bénéficie de l’accompagnement technique de certains partenaires comme l’OIM dans la fourniture en matériels informatiques et autres logiciels. Le Commissaire Sina a noté la bonne collaboration avec tous les autres services dans le cadre de la coordination de la gestion des migrants, sans oublier les difficultés que les agents rencontrent dans le profilage des migrants, où certains ne disposent pas de pièces d’identité. Le Gouverneur a été éclairé sur la manière dont ces cas sont gérés.
Aux environs de 11 heures, le Gouverneur et sa délégation ont assisté impuissamment à l’arrivée d’une nouvelle vague de migrants, hommes, femmes et enfants, sous un soleil avoisinant les 46°C. C’était une scène indescriptible, une chaîne humaine en petits groupes, certaines personnes visiblement épuisées arrivent à peine à marcher. Ceux qui ont un peu de force soutenaient les plus fatigués, désespérés ! Ils sont accueillis par les agents humanitaires avec tout le soutien nécessaire, dont le soutien moral très important en ce moment précis, notamment pour les femmes et les enfants mineurs.
Le seul espoir pour ces migrants, c’est Assamaka, c’est le Niger et son peuple qui continuent à offrir l’hospitalité, la chance de survie à ces frères africains qui subissent ce traitement inhumain de la part d’un autre pays africain. Après la situation de ce nouveau groupe, il est fait état de plus 1 500 personnes de plus. Aussitôt après l’accueil, la prise en charge a commencé conformément au protocole mis en place à cet effet. Il a été rapporté que dans ce groupe une femme a même accouché en cours de route. On dénombre également beaucoup de blessés et de malades, tous pris en charge à Assamaka dans le cadre du dispositif mis en place à cet effet.
Après avoir assisté à cette scène, le Gouverneur s’est rendu au CSI d’Assamaka, où il a été accueilli par le personnel de ladite structure, avant de visiter le bureau du Major, la salle des soins, la salle d’accouchement et le laboratoire. A toutes ces étapes, des explications ont été fournies au Gouverneur sur la fourniture des services au profit des populations locales et aux migrants. Dans le cadre des prestations sanitaires offertes aux migrants, le CSI bénéficie des appuis des différents partenaires humanitaires, notamment l’OIM, l’UNICEF, le PAM et l’UNHCR. A l’occasion de cette visite, le Gouverneur a assisté à la remise d’un appui de l’UNHCR en produits et matériels d’hygiène et assainissement, notamment du savon et des tricycles pour le ramassage des ordures.
Par la suite, le Gouverneur a visité deux centres de transit des migrants sous la gestion de l’OIM et de Coopi, avant de visiter la cuisine, où le PAM et l’ONG Karkara travaillent pour l’alimentation des migrants. Le passage du Gouverneur, au niveau de la cuisine a coïncidé avec le déjeuner avec au menu du riz au gras pour les 2 467 migrants. Enfin, la délégation a visité le forage réaménagé grâce à l’UNICEF pour augmenter la capacité et satisfaire les besoins d’à peu près 8 000 personnes. D’après le Directeur Régional de l’Hydraulique, les difficultés d’accès à l’eau sont aujourd’hui un vieux souvenir, malgré les défis liés à l’augmentation de la population migrante.
Rencontres d’échanges avec la communauté hôte et les acteurs humanitaires
Après les visites des services et des sites, le Gouverneur de la région d’Agadez a eu deux importantes rencontres. D’abord avec la population d’Assamaka et les représentants des migrants, et ensuite avec les partenaires humanitaires intervenant à Assamaka dans la gestion de la migration. Ces rencontres ont pour objectifs, d’une part, d’échanger avec les populations et les migrants sur les conditions de vie, la cohabitation sociale, les difficultés et les doléances, et de l’autre pour discuter sur les activités que chacun des partenaires mène sur le terrain, les défis ou difficultés rencontrées et les perspectives dans le cadre de l’accompagnement du nouveau Plan de Réponse à la Crise actuelle. Au cours de cette rencontre, le Chef du village d’Assamaka s’est réjoui de l’attention toute particulière que les autorités accordent à cette situation. Son intervention a permis de comprendre les impacts de cette crise sur la vie socioéconomique de la population hôte et sur l’environnement. Le Chef de village a saisi l’opportunité pour transmettre au Gouverneur le message de félicitation et de remerciement de la population d’Assamaka adressé au Général d’Armée Abdourahamane Tiani, pour son élévation au rang de Président de la République, Chef de l’Etat, et au rang de Général d’Armée, toute chose qui lui permet de remplir efficacement la mission de la Refondation de la République et de la sauvegarde de la Patrie conformément à son engagement et son ambition « pour un Niger véritablement prospère ».
Le Chef du village d’Assamaka a tenu à remercier le CNSP et le Gouvernement pour tout ce qu’ils sont en train de faire pour le bien- être de la population nigérienne en général. Il a également demandé au Gouverneur d’être leur porte-parole auprès des acteurs humanitaires pour les efforts qu’ils ne cessent de consentir au profit de la population de son village dans les domaines de l’eau, hygiène et assainissement, la santé, l’éducation. Il a surtout eu une mention spéciale aux FDS qu’il a tenu à féliciter pour le travail qu’elles font nuit et jour. Il a, au nom de sa population, réitéré son engagement à poursuivre les efforts de sensibilisation afin de contribuer au renforcement et au maintien des liens de collaboration entre la population civile et les FDS.
Les femmes et les représentants des migrants ont également tous eu droit à la parole, où chacun a exprimé des doléances avant de se réjouir de cette attention permanente des autorités nigériennes et des acteurs humanitaires à leur égard. Les migrants ont rendu un vibrant hommage au Niger, à son peuple et à ses dirigeants qui ont bien voulu accepter de les accueillir sur leur territoire suite à leur expulsion par l’Algérie. Cette tribune a été l’occasion pour ces migrants d’expliquer les différents cas de violation des droits humains qu’ils ont subis, de leur arrestation jusqu’à leur débarquement au point zéro. Le porte-parole des migrants a plaidé auprès des autorités nigériennes pour faciliter avec leurs pays d’origine leur retour dans leurs familles respectives. « Nous voulons rentrer chez nous, Monsieur le Gouverneur. Aidez-nous à convaincre les autorités de nos pays pour qu’elles acceptent nos demandes parce que c’est chez nous », a-t-il plaidé. Le Gouverneur a pris bonne note de toutes les doléances tout en rendant hommage à son tour à la population locale pour sa contribution à l’instauration d’un climat convivial avec les migrants malgré les défis.
Il a demandé à cette population de continuer avec la même patience à offrir à ces personnes ce qu’elle peut, car ces migrants n’ont pas choisi d’être dans ces conditions et ont besoin de soutien avant leur départ d’Assamaka. Le Gouverneur a aussi réitéré l’appel des autorités à la population pour qu’elle continue à collaborer avec les FDS et les autres services de l’Etat ainsi qu’avec les acteurs humanitaires pour aider à faciliter le transit des migrants dans des conditions humaines acceptables. Il a transmis à cette population d’Assamaka les salutations fraternelles du Président de la République, Chef de l’Etat, le Général d’Armée Abdourahamane Tiani, et celles du Premier ministre, Ministre de l’Economie et des Finances.
Rencontre avec les acteurs humanitaires
Au cours de cette rencontre, Mme Ana Fonseca, Chef de Mission Par Intérim de l’OIM au Niger, a pris la parole au nom des acteurs humanitaires intervenant dans le secteur de la migration pour saluer les autorités nigériennes pour les facilités et l’accompagnement nécessaires qu’elles accordent aux acteurs humanitaires dans le cadre de la gestion de cette crise. Elle a également salué la population d’Assamaka pour sa capacité de résilience et d’adaptation aux chocs migratoires des années durant. Face aux multiples défis et difficultés que pose cette crise migratoire, Mme Fana Fonseca a réitéré l’engagement et la disponibilité de tous les partenaires humanitaires, notamment les agences des Nations Unies, à poursuivre cet accompagnement de l’Etat du Niger pour juguler cette crise. « Au nom des Nation Unies et à celui de tous les partenaires humanitaires je voudrais saluer les efforts du Niger qui accueille des migrants à Assamaka. Il y a beaucoup de défis et de difficultés, pas seulement pour les migrants mais aussi pour les communautés hôtes. Alors, on voudrait souligner l’importance de travailler ensemble pour le bien-être de tous », a-t-elle souligné.
Elle a ensuite rappelé les efforts des différents partenaires dans la gestion de cette crise de 2023 à 2024, avec les perspectives de 2025. Elle a également rappelé l’engagement et la disponibilité des partenaires à accompagner la région d’Agadez dans la mobilisation des ressources nécessaires pour le financement de son Plan de Réponse Humanitaire au profit des migrants refoulés d’Algérie. « les partenaires humanitaires ont fait beaucoup d’efforts collectifs pour l’accueil et pour le bien-être des migrants, pour la santé et les urgences, pour la stabilité de la communauté, pour la gestion de la frontière. On voudrait continuer à travailler pour sauver des vies, mais aussi pour intéresser les facteurs de mobilité et les facteurs de développement à Assamaka et dans toute la région. Assamaka est un exemple de partenariat entre tous les acteurs humanitaires. C’est urgent de gérer cette mobilité d’une façon humaine. Au nom de tous les partenaires, je voudrais vous assurez qu’on travaille pour le bien de la communauté, pour la cohésion sociale », a-t-elle déclaré, tout en se réjouissant de l’opportunité que ce déplacement du Gouverneur à Assamaka, en compagnie de tous les acteurs, a offert pour discuter ensemble afin de réfléchir et trouver les solutions collectives. Elle a noté que l’ensemble de ces interventions visent à renforcer la réponse humanitaire, la protection et la résilience dans un contexte migratoire complexe.
Annonce d’un plan de rapatriement de plus 4 000 migrants dans leurs pays
A l’issue de cette mission, le Gouverneur a animé un point de presse à Assamaka où il a fait la situation de cette crise et déroulé les initiatives des autorités et des organisations humanitaires pour y faire face. Il a tout d’abord souligné que cette mission fait suite au refoulement massif sans précédent des migrants par l’Algérie sur le territoire nigérien d’une part, et d’autre part elle permet de comprendre la situation afin de l’ajuster conformément au Plan de réponse humanitaire élaboré et présenté aux partenaires. « Au cours du mois d’avril, nous avons connu une vague de refoulement sans précédent des migrants venant de l’Algérie. Nous avons connu un nombre assez important qui est quasiment équivalent à celui qui a été rapporté au premier trimestre 2025, où nous avons eu près de 7 222 migrants et refoulés. Au 28 Avril nous étions déjà à plus de 6 000 migrants. C’est pour dire un peu la pression au niveau de tous ces centres (avec comme conséquence la surpopulation des centres d’hébergement et de transit de l’OIM, des conditions de vie très difficiles pour les personnes refoulées, l’augmentation des besoins alimentaires et nutritionnels, des risques de maladies épidémiques, la cohabitation difficile avec les populations hôte) », dit-il.
Pour faire face à cette situation, le Gouvernorat a élaboré un plan d’urgence et il s’agit de répondre, de façon coordonnée, à cette situation avant qu’elle ne se transforme en crise humanitaire et en désastre humanitaire. « C’est ce qui a motivé la mission que nous avons eu à conduire sur Arlit et sur Assamaka. De manière globale, nous avons eu des échanges avec les communautés locales à Arlit et à Assamaka et nous nous réjouissons de ces échanges. Cela nous a permis de comprendre cette situation qui est assez délicate et qui mérite l’attention de tout un chacun», a déclaré le Général de Brigade Ibra Boulama Issa. Il a ensuite relevé une surpopulation au niveau des camps bien qu’il y ait des efforts qui sont en train d’être faits pour la construction de nouveaux bâtiments. « De façon globale, nous pensons que la situation alimentaire, sanitaire et l’accès à l’eau sont acceptables. Nous avons discuté avec l’OIM qui est en train de voir comment accélérer le plan de rapatriement des migrants. Cela va permettre non seulement de désengorger les centres et de permettre à ceux qui viennent d’arriver de trouver de l’espace et d’éviter d’aller errer dans les rues ; ce qui a des corollaires. Nous allons appuyer le programme de l’OIM pour l’accélération du rapatriement qui commence à partir de maintenant jusqu’au mois de juillet 2025. Cette opération va permettre de rapatrier plus de 4 000 migrants », a souligné le Gouverneur.
Pour le cas des refoulés nigériens qui ne sont pas pris en charge dans les mêmes conditions que les autres, le Gouverneur a souligné la nécessité pour les acteurs humanitaires de revoir cette situation, y compris le plan de leur acheminement dans leurs régions d’origine. Cette mission du Gouverneur a pris fin le samedi matin avec deux visites dans la Commune Urbaine d’Agadez au niveau du camp de transit de l’OIM et celui de l’UNHCR, où sont hébergés les réfugiés et les demandeurs d’asile de plusieurs nationalités dont des Soudanais. Ces visites ont également permis au Gouverneur de s’enquérir de la situation globale et des difficultés auxquels les partenaires sont confrontés malgré les efforts. Le Général de Brigade Ibra Boulama Issa a remercié tous les partenaires et les populations hôtes pour les efforts dans l’accueil et la prise en charge de ces migrants, réfugiés et demandeurs d’asiles, mais aussi pour la résilience avec laquelle ils supportent cette situation.
Ali Maman, ONEP Agadez