La consommation de la drogue à Niamey prend une tendance inquiétante qui ne cesse de croître. Les substances telles que la marijuana, le crack, l’héroïne et les comprimés ont la côte auprès des jeunes qui sont de plus en plus attirés par ces produits nuisibles. Ils s’en procurent sans peine auprès des dealers, et ce, dans pratiquement tous les coins et recoins de la capitale. Ce reportage fait une plongée dans l’univers sombre de la drogue qui sévit au sein de la jeunesse de la capitale nigérienne.
A la devanture d’un complexe d’enseignement général (CEG) de la capitale, il est 8heures du matin, les élèves affluent de toutes les directions et se précipitent pour ne pas être trop en retard. Tout près de l’école, dans un virage, au coin de la rue, decontracté, un groupe d’élèves du CEG, dont l’âge est compris entre 13 et 18 ans pour la plupart, forme un cercle., L’acte apparait anodin à première vue. Aussitot, le monde se détend dans le groupe et place à une ambiance sereine, propice à la prise de stupéfiants. C’est dans cette atmosphère que les jeunes allument leurs “pétards”.
« Chaque matin, avant de rentrer en classe, on se rejoint ici pour fumer un joint de marijuana. C’est devenu une habitude pour nous », explique l’un d’eux avec un air totalement decontracté. Cette prise de drogue est appelée dans ce milieu “ matinal’’. Fumer très tôt le matin pour bien démarrer la journée et mieux appréhender les choses », déclare un autre déjà trempé dans le dosage du “ matinal ”.
A coup de briquet sur un papier aluminium tout en inhalant la fumée, un autre fume tranquillement une substance assez étrange. L’interessé sussure en disant par la voix basse. « C’est de l’heroine que je fume. On se sent bien après avoir fumé, ça nous aide à oublier nos problèmes », raconte le jeune homme à la coiffure échevelée.
Parmi ces jeunes, deux élèves sirotent à tour de rôle une boisson. « C’est de la line qu’on boit, repond un d’entre eux de facon péremptoire. Un melange de deux produits qu’on achète à la pharmacie et on met dans une boisson. Après avoir pris le cocktail , on se sent bien toute la journée avec des effets de somnolences », explique l’un entre eux.
Un peu plus tard, aux environs de 11 heures, dans un autre quartier, en face d’un lycée public, on observe la même scène. “En effet, il est devenu courant de voir des jeunes consommer de la drogue à la devanture des écoles, dans les rues et les lieux publics sans aucun complexe ni crainte”, déplore un habitant du quartier.
Un consommateur de drogue qui a requis l’anonymat, raconte son histoire avec lucidité et regret. « J’ai commencé à consommer de la drogue à l’âge de 15 ans. C’était pour échapper à la solitude et à la pression de la pauvreté. Mais je n’avais jamais pensé que ma vie prendrait une telle tournure », a-t-il confié.
Il décrit en outre la facilité avec laquelle il a accès à la drogue dans les rues de Niamey. « Les dealers sont partout. Ils ciblent principalement les jeunes en situation de précarité, comme moi à l’époque. Ils savent que nous cherchons un moyen d’échapper à notre réalité désespérante », explique-t-il.
Dans une décharge publique de Niamey, il est 15 heures et la température est assez clémente. Ainsi, à l’ombre d’un arbre, des jeunes complètement zombifiés, le visage noir, les yeux rouges, s’adonnent à la prise de substances psychotropes.
Le nommé S.I un dealer, partage son parcours, « J’ai débuté en tant que consommateur avant de devenir moi-même dealer pour financer ma propre consommation. Mais j’ai réalisé que je détruisais petit à petit la vie de nombreux jeunes comme moi », avoue-t-il. Par ailleurs, notre interlocuteur décrit les moyens utilisés pour recruter de nouveaux consommateurs. « Nous les incitons en leur offrant leurs premières doses gratuitement. Après cela, ils deviennent rapidement dépendants, et c’est là que nous les contrôlons”, révèle-t-il sans amertume. “J’ai déjà été condamné à plusieurs reprises”, ajoute-t-il.
Soudain, avec une télévision de type écran plasma de marque L.G 42 pouces sur la tête, un jeune s’amene auprès du dealer pour l’echanger contre de la drogue, « j’ai vendu la télévision à raison d’un gramme de crack plus 7.000 F », dit-il.
Au quartier boukoki de Niamey, un endroit considéré comme l’epicentre de la vente de drogues et du banditisme de tout genre, il est 18 heures passée, on voit le soleil courir vers son gîte. L’ambiance est bouillonante à cette heure dans le quartier.
Dans une maison, des jeunes hommes et des jeunes filles font le ballet. A l’interieur, dans le salon principal de la maison, une vingtaine de personnes prennent diverses substances. « On vend du tout: Marijuana, comprimés, injection à l’heroïne, cocaïne, crack et autres et on peut consommer sur place sans aucune crainte », souligne le dealer. Les jeunes débutants dans la consommation des stupéfiants sont particulièrement dangereux dans la mesure où ils sont capables de vendre tous leurs biens et ceux de leurs familles pour se procurer de la drogue, ajoute-t-il. C’est le cas de ce jeune qu’il apostrophe aussitôt.
Nazir Ousmane (ONEP)