Créée en 1978, l’Association des Sourds du Niger (ASN) est la plus ancienne organisation des personnes handicapées encore en activité. Initialement réfléchie et mise en place, cette association a l’objectif d’unir toutes les personnes sourdes du Niger, de défendre leurs intérêts matériels et moraux, de promouvoir l’éducation et l’intégration sociale de ses membres, de lutter contre la mendicité et le désœuvrement, de promouvoir l’emploi et la formation de ses membres et de défendre leurs droits. Aujourd’hui, les personnes sourdes sont dans la logique de l’inclusion, comme le dit un de leurs slogans, « un sourd peut tout faire sauf parler », une manière pour ces derniers de crier haut et fort qu’ils méritent des places dans les administrations.
Ayant obtenu sa reconnaissance officielle en 1979, l’ASN compte à ce jour 08 sections régionales et 45 sous-sections, soit environ 16.000 membres sur toute l’étendue du territoire national, selon son vice-président, M. Hamidou Mossi. Dans la logique de ses objectifs l’ASN a, dans un souci d’offrir un cadre éducatif spécialisé répondant aux besoins de ses jeunes membres, a créé la première école pour sourds à Niamey suivi d’une deuxième et d’une troisième école à Maradi et à Zinder en 1981. Ces écoles sont, à ce jour les seules du pays. « Des dizaines d’élèves sourds ont réussi à obtenir leur BEPC, 5 autres sont actuellement à l’Université. Ils font la fierté de notre association, car ils ont confirmé ce que nous avions toujours soupçonné : ‘’un sourd peut tout faire sauf entendre ’’», confie Hamidou Mossi avec fierté.
Malgré l’existant qui requiert aujourd’hui des grandes rénovations et appuis, surtout en manuel didactique et en renforcement de capacité des enseignants des écoles, ces trois écoles qui existent à ce jour dans tout le pays, pour une si vaste communauté, sont insuffisantes, dit-il, car construites dans les chefs-lieux des régions, ce qui engendre un problème de fréquentation. « Les élèves viennent de divers horizons et ne bénéficient d’aucune prise en charge. Pour limiter les allers et venues, nous avons initié une semi cantine afin de retenir les élèves en journée continue. Elle a commencé à fonctionner en 2003 et tient grâce à la contribution de généreux donateurs, dont l’Etat, qui contribue également par la fourniture d’eau et d’électricité. Les enseignants sont tous des fonctionnaires de l’État, les fournitures sont gratuites ainsi que l’inscription, il est seulement demandé aux parents une contribution de 1000 F par mois afin de payer la cuisinière et acheter les condiments et 2000 F pour le COGES. Pour comparer, dans certains pays, la scolarité de l’enfant sourd coûte entre 350 000 F et 220 000 F par an », explique-t-il.
Cependant, selon, M. Hamidou Mossi, ces écoles sont confrontées à une insuffisance de formation des enseignants, qui peinent à transmettre leur savoir à un groupe de gens ayant un mode de communication particulier. Ce problème, dit-il, on le rencontre aussi dans les classes inclusives, une initiative de l’Etat et des ONG pour promouvoir le droit à l’éducation. « Des ONG comme CBM, HI et même la FNPF nous apporte leurs appuis dans le domaine du renforcement des capacités en langue des signes », a-t-il ajouté.
L’autre préoccupation des personnes sourdes, c’est l’accessibilité à l’information. «Voilà notre énorme problème. Imaginez-vous devant votre écran de TV dont le son est coupé, c’est notre vie de tous les jours, seule la RTN traduit une à deux fois par semaine le JT en langue des signes. Nous avons beau plaidé auprès des autres chaînes de télévision, la réponse est partout la même, pas de moyens techniques pour ne pas avouer un manque de volonté de respecter notre droit à l’information, même l’accès à la justice et à la santé est, du fait de manque d’interprétation en langue des signes, problématique pour les sourds», a-t-il souligné avec dépit.
Hamissou Yahaya (ONEP)