Les parcs de Karam- karam, face ex-UGAN et celui des vendeurs motos, non loin du carrefour du Grand marché, étaient autrefois un coin achalandé. Les vendeurs de motos faisaient de bonnes affaires et la présence des clients était quasi-permanente. Mais depuis un certain temps, les choses ne sont plus ce qu’elles étaient. La clientèle d’antan qui faisait de ces parcs un ‘’paradis’’ pour les vendeurs de motos et même pour les acquéreurs a disparu.
Les quelques rares acheteurs qui se présentent s’éclipsent aussitôt renseignés sur les prix. Ils trouvent les motos très coûteuses. En effet, la fourchette de prix se situe entre 400.000 F CFA et 500.000 F CFA pour une moto. C’est la désolation totale pour les revendeurs qui vivent la mévente de leurs marchandises. Ces parcs de motos de renommée de la capitale ne s’animent plus. Ce qui crée un sentiment de désarroi chez les revendeurs. La vente des motos était, il ya quelques années encore, un secteur porteur. C’est un business très lucratif qui emploie beaucoup de jeunes. C’est toute une chaine d’emplois : il y a les vendeurs de motos, ceux des pièces de rechange mais aussi les mécaniciens.
D’après certains revendeurs, cette mévente serait liée à l’interdiction des motos dans certaines localités du pays à cause de l’insécurité. Depuis l’adoption de ces mesures, le marché n’est plus approvisionné comme avant à cause de l’insécurité qui sévit dans les pays voisins de provenance. En effet, en plus du fait que l’approvisionnement à partir du Burkina Faso est compliqué du fait de l’insécurité dans la zone des trois frontières, la dévaluation du Naira du Nigeria a également impacté le marché des motos. Selon les revendeurs, la crise sanitaire aussi a impacté l’importation des motos. Ces différents facteurs combinés ont débouché sur une disponibilité réduite des motos sur le marché et une hausse des prix.
L’un des parcs connu de la capitale situé en face de l’ancien siège ex UGAN est aujourd’hui désert. La raison en est que le business des motos ne donne plus. Cette situation a commencé à partir de la date de l’interdiction de la circulation des motos dans les localités de la région de Tillabéri. En effet, les principaux clients viennent des villages de la région de Tillabéri. Il s’agit des orpailleurs et autres commerçants.
Elh Aboubacar Idi, 32 ans d’expérience dans la vente des motos témoigne qu’avant l’avènement de l’interdiction de la circulation des motos, il vendait au moins 10 motos par mois. Mais de nos jours c’est par coup de chance qu’il arrive à vendre 3 motos dans le mois. «Nous étions plus de 10 revendeurs par le passé, mais aujourd’hui, nous ne sommes que 2 qui sont restés dans ce parc. De nos jours nous vendons des motos d’occasion faute de moyens pour commander les motos neuves», se désole-t-il. «Même les motos d’occasion ne se vendent pas comme avant. C’est pour cela que les revendeurs ont déserté ce parc. C’était pourtant l’un des parcs motos les plus visités de Niamey», renchérit Elh Aboubacar avec nostalgie.
Selon Aboubacar Idi, c’est l’insécurité, en particulier dans la région de Tillabéri qui est la cause principale de la faillite de leur business. Il souhaite ainsi impatiemment le retour de la paix pour enfin revivre les moments de joie à partir des profits tirés de la vente des motos.
Comme le business autour des motos ne donne plus, certains anciens camarades d’Aboubacar se sont reconvertis en vendeurs de condiments et d’autres en chauffeurs de taxis. Cependant, la mévente des motos, confie Aboubacar Idi a conduit au chômage beaucoup de jeunes. «Hormis les patrons qui lancent les commandes, les jeunes gens que nous employons pour le bon fonctionnement de notre activité commerciale se sont retrouvés au chômage», explique-t-il.
Pour Elh Ganda, membre du syndicat des revendeurs de motos et ancien président dudit syndicat, c’est le manque de la clientèle qui menace sérieusement le marché des motos. Pour montrer à quel point la clientèle se fait rare, il affirme que des motos sont vendues même pour un bénéfice de 2.000 F CFA. Ce qui est lamentable, dit-il.
Cela parce que non seulement les motos sont chères mais également les clients sont rares. Par exemple, illustre Elh Ganda, en 2020 la moto de marque Kasea est livrée par les grossistes a moins de 400.000. «Mais de nos jours, elle est payée chez les grossistes au moins à 450.000 F CFA. Voilà en quelque sorte ce qui explique la cherté des motos chez les revendeurs qui cherchent eux aussi un bénéfice», dit-il.
«Notre secteur est vraiment menacé, notre métier rencontre beaucoup de difficultés. Il y a la mévente, il y a aussi les taxes à payer», témoignage, Souleymane, un jeune vendeur de motos d’occasion. Selon lui, le business des motos ne génère pas de retombées comme les années antérieures.
La faillite du marché des motos qui se dessine risque de plonger de milliers de jeunes dans le désœuvrement. Avec tout ce que cela suppose comme conséquences, il est important que les autorités se penchent sur la question pour que des solutions soient trouvées.
Oumar Issoufou(Onep)