Célébrée avec enthousiasme et à grandes pompes, l’institution du mariage n’en est pas moins prise, de nos jours, au piège des multiples confusions de la vie contemporaine. En effet, le phénomène du divorce est devenu tellement criard que la rupture d’un couple relève de la banalité. Comme si, dès au départ, les mariages étaient noués à titre temporaire, plus personne ne s’émeut de voir un couple se disloquer du jour au lendemain, parce que n’ayant pas su gérer la première déconvenue ou déception qui font pourtant partie de la vie d’un couple.
Dans un autre contexte, celui de notre société typiquement traditionnelle, pour couper les liens sacrés du mariage, il fallait alors se préparer pour engager un véritable parcours du combattant. Car, il fallait, pour les candidats au divorce, avoir épuisé toutes les voies de recours, à savoir la médiation et autres manœuvres de conciliation impliquant, tour à tour, les amis du couple, les marabouts et les anciens, les parents, etc. Et même quand le litige arrive à passer le cap des interminables tentatives de conciliation, les carottes étaient loin d’être cuites. Chez le juge coutumier, tout comme chez le juge en charge des affaires civiles, les demandeurs en divorce devaient endurer les épreuves des multiples rendez-vous d’audition qui participent d’une volonté d’apaisement et de conciliation entre les deux mariés, dans l’espoir de sauver le couple du naufrage. Et dans la plupart des cas, par le jeu subtile de la médiation, le mariage finissait par triompher.
Aujourd’hui, la question qu’on doit se poser, c’est celle de savoir ce qui peut expliquer cette relative fragilité des liens matrimoniaux. Il faudra peut-être aller chercher les causes dans l’extrême facilité avec laquelle ces mariages sont noués. Il se trouve que, pour beaucoup de couples, les rencontres ont commencé sur les réseaux sociaux, et les liens se sont tissés dans l’univers virtuel à coups d’échanges de messages, de photos et de vidéos bien arrangés via WhatsApp, ceci jusqu’au mariage. Ainsi, les liens se limitent aux seuls deux tourtereaux excluant ainsi leurs parents, frères, cousins et même les amis. Ainsi faisant, les deux futurs mariés se privent de toute une batterie d’affinités indispensables à la consolidation de leur union. Il s’agit entre autres de la symbiose entre les deux familles, les conseils avisés des anciens, la complicité des frères, des sœurs et des amis, toutes choses qui, quelle qu’en soit la difficulté, pourront servir de moyen pour estomper les discordes et assurer une endurance doublée de longévité au foyer.
Et voilà que, ces dernières années, faute de créer cet environnement propice pour cimenter et consolider les liens sacrés du mariage, on assiste, de façon quasi-quotidienne, à des scènes où des couples se trainent au tribunal ou chez le cadi pour y enterrer leur mariage, sans remord.
Assane Soumana (onep)