Le Système National de la Recherche Agronomique (SNRA) du Niger comprend les institutions de recherche, les universités publiques, le Centre de multiplication du bétail, le laboratoire central de l’élevage (LABOCEL), les institutions régionales (Centre AGRHYMET) et internationales (ICRISAT). A celles-là, s’ajoutent les entreprises du secteur privé, les ONG et des organisations de producteurs. A côté de cette diversité d’acteurs scientifiques et techniques, il existe une diversité d’acteurs du monde rural, de plus en plus importante et demandeurs de résultats de la recherche agricole. C’est dans ce contexte et dans un souci de faire face à la diversité des acteurs, des demandeurs et des problématiques, que le Niger s’est doté d’un organe d’orientation politique de la recherche agronomique, à savoir, le Conseil National de la Recherche Agronomique (CNRA), présidé par le Premier Ministre, Chef du gouvernement et comprenant les ministères techniques en charge du secteur rural, les facultés d’agronomie des Universités publiques, les organisations paysannes. Le Responsable de l’Unité Suivi-Evaluation et Gestion des bases de données du CNRA, le sociologue et Expert en Management des Projets de l’Agriculture Protégée, M. Ali Moussa nous parle ici de cette importante structure stratégique de coordination, d’orientation et de décision en matière de recherche agronomiques
Pouvez-vous nous présenter le CNRA?
Le Conseil National de la Recherche Agronomique (CNRA) est une structure d’orientation politique et de décision en matière de recherche agronomique. C’est une structure qui est chargée d’assister le gouvernement dans l’élaboration de la politique nationale de la recherche agronomique (stratégie et financement) et dans le suivi de sa mise en œuvre. A ce titre, le CNRA est chargé de proposer au gouvernement un document définissant la stratégie nationale en matière de recherche agronomique (programme de recherche, vulgarisation et appui conseil). Il est également chargé de proposer au gouvernement des mécanismes internes et externes de financement efficace et durable de la recherche agronomique. Mais aussi de veiller à la cohérence des actions et à l’opérationnalisation du Système National de la Recherche Agronomique, de contrôler et évaluer les activités et centraliser les résultats de la recherche agronomique, de promouvoir et renforcer les résultats de coopération entre les institutions de recherche agronomique sur les plans national, régional et international, d’instruire les propositions de décision du Secrétariat Permanent et de contrôler le fonctionnement du Secrétariat Permanent. Le CNRA est aussi obligatoirement ampliataire des rapports d’activités de la recherche agronomique effectué sur le territoire national. Il est rattaché au Cabinet du Premier ministre, qui en est le président. Le CNRA regroupe une dizaine de ministères sectoriels ainsi que des Instituts de recherche et des structures étatiques. Le CNRA sert aussi d’interface entre les structures de recherche agronomique, l’Etat et les utilitaires des résultats de la recherche. Nous proposons également au gouvernement les mécanismes internes et externes de financement, pour que la recherche soit indépendante et autonome et pour que les recherches tiennent compte des réalités et des priorités nigériennes. Les chercheurs doivent traiter des problèmes réels, locaux et relatifs aux producteurs de notre pays. Le CNRA essaye aussi de promouvoir et de renforcer les relations de coopération entre les institutions de recherche (nationales et internationales) et introduire les propositions de décisions. Cela se passe au cours des deux sessions ordinaires annuelles qui réunissent les membres.
Qu’est-ce-qui justifiait la présence du CNRA à la Semaine de paysan, ayant eu lieu à Margou Béné, du 22 au 25 novembre dernier ?
La deuxième édition de la semaine du paysan qui s’est déroulée du 22 au 25 Novembre 2021, s’est tenue à un moment où la recherche se propose de vulgariser les nombreuses technologies générées par les chercheurs et d’identifier des thèmes de recherche à la base. C’est pourquoi le CNRA, a fait venir toutes ses structures de mise en œuvre sous forme de journée du CNRA afin de mettre en évidence la nécessité d’accroitre les investissements dans la recherche agronomique au regard des besoins continus de nouvelles technologies et techniques afin de suivre l’évolution de la demande croissante en aliments (produits de l’agriculture et de l’élevage, produits halieutiques et forestiers) accessibles aux populations et à des prix soutenables et préservant les ressources naturelles et de l’environnement. Le CNRA est convaincu qu’un secteur agricole en bonne santé est une garantie nécessaire pour la croissance économique, la fourniture d’aliments, de revenus et d’emplois pour les plus pauvres et pour l’amélioration de la conservation des ressources et de la protection de l’environnement.
Quelles sont les stratégies que vous adoptez et développez dans le cadre de l’accomplissement de toutes les missions du CNRA ?
Au niveau du CNRA, nous ne faisons pas la recherche, en tant que telle. Nous agissons au niveau stratégique. Ainsi, au niveau du CNRA, nous traduisons les priorités du gouvernement en programme, sous forme de plans d’actions. Nous avons ainsi un plan d’actions triennal compilé. Donc, nous coordonnons les activités des différentes structures de recherche agronomique. Par exemple, il y a les mêmes structures qui utilisent les mêmes technologies, sur le terrain,, souvent avec des méthodes différentes, avec des techniques contradictoires, alors nous essayons de créer une cohérence et faire en sorte que chacune de ces structures fassent correctement son travail selon ses compétences. Je prends l’exemple de l’ICRISAT, qui souvent mène des activités un peu contradictoires avec celles de l’INRAN, ce qui nous a amené, depuis un moment à recadrer toutes ces actions. Et chacune des structures sait maintenant de manière claire et précise ce qu’elle doit faire sur le terrain et à quel niveau le faire. Ainsi, le plan d’actions triennal nous permet de renforcer la recherche et le conseil agricole et surtout de coordonner les actions de recherche agronomique dans notre pays, afin de créer les conditions de mettre durablement les populations nigériennes à l’abri de la faim et de la malnutrition et leur garantir les conditions d’une pleine participation à la production nationale et à l’amélioration de leurs revenus. Et tout cela, à travers la mise en œuvre d’une stratégie de recherche-formation-innovation en agriculture. La forte et ferme volonté politique qui anime les plus hautes Autorités nigériennes, depuis 2011, contribue beaucoup à nous aider, à nous faciliter l’atteinte des objectifs assignés au CNRA et à promouvoir (en matière de lisibilité et visibilité) la recherche agronomique au Niger. Pour la première fois nous avons au niveau de la Primature une ligne de crédit dédiée uniquement à la recherche agronomique et cela en plus de ce qui est prévu au niveau du FISAN. Crédits que nous sommes en train d’utiliser à travers des projets compétitifs, après analyse et évaluation du comité scientifique du CNRA. Nous venons présentement de sélectionner huit (8) projets de recherches agronomiques, qui seront financés, à 100% par le budget national.
Quelles perspectives envisagez-vous pour le CNRA ?
Il faut faire en sorte que toutes les structures de recherche agronomique soient plus viables, plus visibles. Notre pays possède beaucoup de potentialités, des technologies existantes et/ou générées mais qui demeurent méconnues, donc non utilisées par la population. Les tiroirs de nos chercheurs regorgent de technologies extraordinaires qui font la fierté des peuples dans certains pays mais qui sont méconnues par nos propres populations. Au CNRA nous disons qu’il va falloir vulgariser toutes ces technologies très pertinentes, aussi bien traditionnelles que modernes et faire en sorte que nos paysans se les approprient, pour booster notre agriculture. Pour cette vulgarisation, c’est l’APCA (Agence pour la Promotion du Conseil Agricole), qui en est le chef d’œuvre. Au CNRA, nous générons les technologies, l’Etat à créé cette structure qui s’occupe de leurs vulgarisation, à travers leurs dispositifs régionaux et locaux, en rapport avec le CNRA. Mais aussi, il va falloir que les thèmes des recherches soient ceux qui proviennent de la base. Ce n’est plus les temps où le chercheur se met de côté imagine et créé une technologie, qui a elle-même des problèmes à s’adapter. Non les temps changent, le climat avec et l’agriculture doit s’adapter. Il faut maintenant aller rencontrer et écouter le producteur connaître ses besoins, ses défis, les réalités du changement climatique auxquelles il fait face, en vue d’y apporter des réponses. Il est nécessaire aussi de mettre à jour certaines technologies devenues vétustes et caduques.
Concrètement, quel rôle le CNRA a-t-il joué dans l’organisation de la semaine du paysan ?
En tant que structure de recherche agronomique, le Conseil National de la Recherche Agronomique (CNRA) a participé pleinement à l’organisation de la semaine du paysan qui s’est tenue à Margou Béné, en mobilisant toutes ses structures nationales (INRAN, LABOCEL, CMB, les Facultés d’agronomie des universités publiques) et internationales (ICRISAT, AGHRYMET, IRD, ACMAD, IRI) de mise en œuvre. A travers ses structures de recherche, le CNRA a présenté le résultat de la recherche agronomique. Ce sont des technologies générées par les institutions de la recherche. Ce sont surtout des technologies éprouvées en productions animales, en gestion des ressources naturelles et en productions végétales. Elles sont stratifiées en domaines et sous-domaines, dont, sans être exhaustif nous pouvons citer : le domaine des Productions animales (aviculture, halieutique, ruminants, etc) ; gestion des ressources naturelles (agroforesterie, technologies éprouvées en régénération naturelle assistée, système de cultures, conservation des eaux et du sol, restauration des sols) ; productions végétales (technologies éprouvées sur les techniques culturales, technologies éprouvées sur les variétés, etc). Le CNRA a accepté d’assister à la semaine du paysan parce que c’est quand même un cadre annuel de rencontre entre les producteurs, les chercheurs et les décideurs. C’est, par conséquent l’idéale opportunité de présenter aux producteurs ces diverses technologies générées par la recherche mais qui sont méconnues. Cet évènement a été l’occasion pour discuter directement avec les utilisateurs des résultats et d’identifier des réels thèmes à la base.
Réalisée par Mahamadou Diallo(onep)