Il y a quelques mois, vous avez été élu par la jeunesse nigérienne à la tête du Conseil National de la Jeunesse du Niger (CNJ). Dans quel état avez-vous trouvé cette structure ?
Notre élection au Conseil National de la Jeunesse est comme le parachèvement d’un processus qui avait du mal à finir. Vous vous rappelez toutes les difficultés auxquelles l’organe était confronté en lien avec le processus de son renouvellement, il a fallu l’arrivée des autorités du CNSP pour prendre toutes les dispositions en vue de parachever ce processus à la grande satisfaction de toutes les organisations de la jeunesse nigérienne. C’est le lieu pour moi de rendre un hommage au ministre de la Jeunesse, de la culture, des arts et des sports, le Colonel Major Abdourahmane Amadou pour son engagement et son implication personnelle dans ce processus. Aujourd’hui tous les organes du conseil sont en place et nous fonctionnons normalement.
Quelle mission et quels objectifs vous êtes-vous fixés pour votre mandat ?
D’abord, il faut noter que fort de son rôle fédérateur unique au Niger, de sa mission au service de tous les jeunes, le Conseil National de la Jeunesse est l’instance nationale bien placée pour promouvoir, protéger et soutenir les jeunes, en leur offrant une plate-forme capable de répondre à leurs besoins, de faire entendre leurs voix et de les soutenir dans leurs actions. Notre mission, ainsi que les objectifs assignés conformément aux textes de notre structure, est de donner un avis et formuler des propositions concrètes sur toutes les questions qui engagent la jeunesse nigérienne. Nous avons un fort engagement qui nous permettra, au cours de notre mandat, de réaliser des études et de formuler des propositions sur les sujets d’ordre économique, social, culturel, politique, intéressant directement les jeunes.
Nous avons un engagement allant dans le sens d’inviter la jeunesse nigérienne à s’intéresser davantage au combat pour la sauvegarde de la patrie et la souveraineté réelle du Niger et aussi aux questions actuelles débattues dans tous les pays de l’AES et dont leur réalisation dépend de l’engagement des jeunes de ces trois pays. Nous ferons de notre mieux pour réaliser ces objectifs avec la participation active de la jeunesse et l’appui de l’État, étant entendu que c’est son devoir de créer toutes les conditions pour l’épanouissement de la jeunesse, mais qui sera fortement soutenu par nos actions dans le sens d’obtenir des résultats probants.
Quels sont les défis auxquels fait face la jeunesse nigérienne ?
Comme vous le savez, les jeunes nigériens font face à des défis redoutables dans un monde en pleine mutation sur plusieurs plans. En dépit des progrès qui ont été accomplis pour améliorer la situation des jeunes au Niger, l’un des défis majeurs de la jeunesse du Niger est le manque ou l’insuffisance des perspectives économiques ou d’employabilité à cause non seulement de l’écart entre la disponibilité des emplois mais aussi du manque des investissements dans l’entrepreneuriat des jeunes pouvant absorber le chômage des jeunes. Cela devient un défi majeur, car laissant la jeunesse dans l’oisiveté, et donc exposée à divers risques d’insécurité et d’extrémisme violent etc. Cependant, la jeunesse nigérienne est résiliente et combative, il y a des perspectives heureuses qui s’offrent à elle depuis l’arrivée des autorités du CNSP que nous allons accompagner pour relever ensemble ces défis.
L’autre défi, c’est le manque de formation de qualité permettant aux jeunes l’accès à l’emploi décent après le parcours académique. Malheureusement notre système éducatif actuel ne facilite pas cette transition où cette adéquation entre le besoin du travail et la formation,
C’est pourquoi lors du colloque organisé du 17 au 19 février 2024 à Addis-Abeba en Éthiopie, sur l’Éducation en marge du sommet des Chefs d’État de l’Union Africaine sous le thème « Éduquer une Afrique adaptée pour le 21ᵉ siècle : construire des systèmes éducatifs résilients pour un accès accru à un apprentissage inclusif, de qualité et pertinent tout au long de la vie, en Afrique », j’ai mis l’accent sur la refondation de notre système éducatif en le conformant à nos réalités socio-culturelles. L’autre défi majeur demeure la consommation des stupéfiants et de la drogue par les jeunes au Niger. C’est un fléau qui prend de l’ampleur et auquel des réponses adéquates doivent être trouvées.
Quelles sont les offensives que vous comptez mener dans le cadre de votre mandat pour réduire le taux de chômage des jeunes nigériens ?
Il faut noter que notre plan d’actions intègre des actions concrètes que nous comptons mener durant notre mandat. Il s’agit de créer les conditions pour promouvoir l’emploi décent pour l’ensemble de la jeunesse. En cela, nous avons dégagé des pistes de solutions aux problèmes que rencontrent les jeunes avec le concours de tous notamment les autorités de notre pays qui il faut le rappeler font de la jeunesse un pilier important de leur combat. Pour ce faire, nous sommes en train d’engager la jeunesse nigérienne à travailler la terre, car notre credo pour ce mandat c’est l’engagement des jeunes pour la terre afin d’atteindre l’autosuffisance alimentaire. On a toutes les potentialités dans le domaine agropastoral qui, si on les exploite, vont absorber significativement le chômage des jeunes, mais surtout déboucher sur notre souveraineté alimentaire. D’ailleurs, nous avons récemment effectué une mission dans le département de Dioundou dans la région de Dosso où nous avons eu l’accord de principe de l’Honorable Chef de Canton de Dioundou pour mettre à notre disposition 10 ha de terre cultivable au profit des jeunes dudit département et actuellement, nous sommes sur le point de former 30 jeunes de ce département pour aller travailler ce terrain. Nous voulons répliquer ce modèle de Dioundou dans toutes les régions. Nous avons aussi fait des suggestions sur les reformes de notre système éducatif pour que ce système arrête de produire des diplômés chômeurs. Il y a aussi l’investissement dans l’entrepreneuriat des jeunes en allouant un budget suffisant devant permettre l’incubation, la formation, car, c’est un pourvoyeur d’emploi et cela doit être réellement pris en compte devant la hausse de l’exploitation de la manne pétrolière et minière que notre pays est en train de connaître. En outre, Il faudrait avant tout assainir le déroulement des occupations des postes à la fonction publique à travers le respect des droits à la retraite des fonctionnaires en fin de carrière et l’organisation des concours d’entrée à la fonction publique de façon saine. Par ailleurs, il faudra que l’État mette en place une stratégie de recrutement des jeunes nigériens dans les postes internationaux afin d’avoir une grande représentativité des Nigériens.
Prochainement, comme annoncé par les autorités, se tiendra un dialogue national. Quelles sont vos attentes et quel rôle entendez-vous jouer ?
À ce niveau, nos attentes sont les mêmes : permettre à la jeunesse nigérienne en tant que levier du développement et gage d’un Niger futur, de participer à la construction nationale, en lui offrant une place de choix dans le processus décisionnel et de relance de notre pays. Aucun dialogue ne peut réussir sans l’implication effective de la jeunesse, sans la prise en compte de sa vision pour le pays et la considération de ses propositions pour le progrès national. Nous ne demandons et n’exigeons l’impossible, mais d’offrir suffisamment de places, de voix et de considération à la jeunesse nigérienne à travers notre structure, pour nous permettre de bien jouer notre partition. D’ores et déjà en prélude à ces assises, nous avons élaboré un mémorandum qui contient nos contributions, mais aussi nos préoccupations pour le Niger futur.
Nous estimons fortement qu’au sortir de ce dialogue, les jeunes que nous représentons seront contents des conclusions et des orientations que les autorités entendront donner aux préoccupations des jeunes à tous les niveaux, par exemple en matière d’éducation, d’emplois, etc. Nous parlerons de l’implication de la jeunesse dans la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent, du chômage, de la stratégie d’absorption des jeunes diplômés sur le marché de l’emploi, de migration, d’inclusion des jeunes dans le processus décisionnel politique, du rajeunissement de l’administration nigérienne, de la corruption, de l’accès aux TICS, de la désinformation, etc.
Nous resterons en veille et observerons désormais, de concert avec les autres structures de la jeunesse à tous les niveaux et échelons, comment notre pays compte-t-il formuler des politiques publiques en faveur de la jeunesse nigérienne et suivre la concrétisation de celles-ci.
Interview réalisée par Hamissou Yahaya (ONEP)