
Malam Adji Waziry Kazelma Omar Taya est le fondateur de l’Association pour la sauvegarde de la culture au Niger, créée en 2015. Il est entré dans le monde culturel grâce aux journées culturelles organisées presque un peu partout par des Nigériens de la diaspora. Issue d’une famille passionnée par la culture, c’est tout naturellement qu’il s’y est lancé depuis son jeune âge. Aujourd’hui, Malam Adji Waziry travaille sur plusieurs projets entrant dans le cadre de la promotion des acteurs culturels nigériens et de leurs produits. Sa passion pour la culture nigérienne l’a conduit partout lors des grands rassemblements culturels. Aussi de par ses expériences cumulées à travers les pays visités, il s’est résolu finalement de mettre cela au profit de son pays. «Concernant l’art et la culture, notre pays n’est pas si bien représenté à l’extérieur, malgré toute cette diversité culturelle que le pays a, malgré toute cette richesse culturelle dont le Niger dispose. Les aînés ont fait leur part, alors il revient aux jeunes d’apporter leur contribution au développement culturel», estime-t-il. C’est pour cette raison qu’il s’est lancé en tant que promoteur culturel. Il compte sur le carnet d’adresses bien fourni qu’il détient pour contribuer à la promotion du patrimoine culturel national.
Son enfance a été donc marquée par l’inculcation des valeurs traditionnelles nigériennes et panafricaines. Par une heureuse coïncidence, il s’est rendu compte que son père Waziry Kazelma Omar Taya fut peintre (plusieurs de ses œuvres d’art, dont le portrait Diori Hamani, sont exposés au Musée national, au pavillon Diori et Kountché, journaliste (Le Journal «Le Kazel» a été un des premiers magazines privés du pays, prisé à l’époque pour sa rubrique «Mamaki A Cikin Kazel»), ou encore présentateur télé à travers son émission «Tachar Fakarey» où il a fait connaître aux nigériens des hommes de sciences, comme Cheick Anta Diop, Baba Kaké, Amadou Hampâté Ba, des hommes politiques comme Sékou Touré, etc. C’est en se penchant sur l’histoire du patriarche qu’il a eu à connaître les pensées de ces sommités africaines et à découvrir des artistes comme Merem Kellou, Aicha Koné ou encore Oumou Sangaré qui a eu la gentillesse de chanter pour lui dans sa jeunesse. Le parcours du patriarche fut inspirant pour lui dans son appréhension de la Culture nigérienne. Chez Malam Adji Waziry, la culture est un héritage. En effet, ce promoteur culture est également neveu au célèbre musicien, El hadj Inoussa Maï Manga affectueusement appelé El hadj Taya qui s’est fait un nom dans la musique tradi-moderne du Niger dans les années 80-90.
Pendant son service civique à Dogondoutchi, le petit fils de Kazelma, se déplaçait assez souvent dans les bourgades de l’Areva, par amour pour la culture, pour apprécier les valeurs culturelles dont cette zone regorge. Malam Adji Waziry découvrit un peuple si attaché à sa culture. Il lui arrivait même de voyager dans le Niger profond, rien que pour satisfaire sa curiosité, culturellement parlant. Actuellement, il est auxiliaire de justice et également Enseignant vacataire à l’université de Niamey depuis 2015.
De la fibre patriotique à une véritable industrie culturelle
Sa passion pour la culture s’est affermie vers 2007-2008, lorsque Malam Adji Waziry était étudiant à Casablanca, au Maroc. Il avait à l’époque, organisé les journées culturelles nigériennes dans plusieurs pays qui accueillent des étudiants nigériens. A toutes ces occasions, il a mis en exergue les artistes et les valeurs culturelles de notre pays. Cette période a également coïncidé avec celle du lancement de la première marque de sport du Niger « Wazkaz Sportswear », un rêve pour lui qui a toujours rêvé d’habiller l’équipe de football national. Son crédo est de répandre des messages de paix nonobstant les conflictualités inhérentes à la démocratie et à la politique à travers l’organisation de plusieurs manifestations culturelles.
Pour y arriver, Malam Adji Waziry travaille en étroite collaboration avec les artisans. Il est même le superviseur des artisans du quartier zongo de Niamey où il essaie de faire connaitre leurs produits et arrive souvent même à les exporter. Dans le cadre des journées culturelles, Malam Adji Waziry a fait le Burkina Faso, le Mali, le Maroc, la France, la Belgique. Il prend également une part active lors des célébrations des fêtes tournantes du 18 décembre. Ainsi, à l’occasion de Zinder Saboua, il faisait partie des organisateurs du projet d’exposition Zinder 1900, née de la rencontre en janvier 2017 de Camille Lefebvre et des autorités communales de la dite région. Ensemble les deux passionnés de la culture nigérienne ont formé le vœu de mettre en scène l’histoire de cette ville, qui est un carrefour des mondes culturels.
L’objectif était de permettre aux habitants de la région et de tout le Niger d’appréhender l’histoire de cette zone, de renouer avec le passé et de se l’approprier. Le projet a eu lieu lors des festivités du 18 décembre 2018 Zinder Saboua, correspondant au 60ème anniversaire de la proclamation de la République du Niger. L’exposition a eu lieu au palais du Sultan du Damagaram. Pour de nombreux zinderois, ce fut l’occasion de la découverte d’un autre temps qui a marquée cette cité. «Ce fut aussi une grande fierté car cette exposition a fait prendre conscience aux populations l’importance du passée de leur ville. L’exposition a été un grand succès car la majorité des festivaliers ont afflué vers le palais pour découvrir les anciennes gloires de la région qui ont mené des grands combats lors de la colonisation. Selon le commissariat de l’exposition, l’on a enregistré près de 25.000 visiteurs. Fort du succès ainsi enregistré, l’exposition a été reprise en mai dernier au CCFN Jean Rouch de Niamey», explique Malam Adji Waziry.
Les TICs comme opportunité de promouvoir la culture
A travers son Association, Malam Adji Waziry contribuer à la mise à jour des différentes Maisons des jeunes et de la culture (MJC) du pays pour «initier les jeunes à la sauvegarde de la culture, de nos valeurs et surtout pour faire la promotion du ‘’consommons local’’». Aujourd’hui, dit-il, grâce aux TIC (Technologies de l’information et de Communication), il est possible de rassembler les Nigériens autour de leurs valeurs et du patriotisme. Ainsi, à travers des réseaux sociaux comme Facebook, Twitter et Instagram, il dit arriver de façon remarquée à faire la promotion du terroir nigérien, à mettre en exergue la diversité culinaire, à parler de la mode nigérienne, à partager la musique traditionnelle et moderne et évidemment à promouvoir les artistes, le cinéma et le théâtre nigérien.
A travers, sa plateforme dénommée «Culture Niger», Malam Adji Waziry a réussi à couvrir le pays de Tillabéri à Nguigmi par ses multiples publications sur les merveilles majestueuses du Niger. Tout comme chaque citoyen, il dit être simplement lié à cette culture de par son histoire personnelle et familiale. «Culture Niger» a commencé par une extension de son album photo «Niger 4Ever» sur son profil personnel Facebook. Ce profil personnel ne pouvant dépasser les 5000 amis, Malam Adji Waziry a migré vers une «page Facebook» qui ne limite pas le nombre d’amis. «Nous essayons de conscientiser les jeunes nigériens sur nos richesses culturelle. Nous attirons ainsi l’attention des jeunes nigériens sur notre philosophie, notre histoire, notre architecture, nos arts, notre cinéma, notre théâtre, nos paysages et notre sous-sol. Nous avons pu ainsi numériser près de 500 000 œuvres artistiques et littéraires sur la page «CultureNiger» a soutenu M. Adji Kazelma Taya
La page «CultureNiger» compte a aujourd’hui plus de 71.000 abonnés. Ce qui prouve que les Nigériens aiment leurs cultures et celles des autres pays d’Afrique. «Le nombre d’abonnés est tout de même exceptionnel dans un pays pauvre où l’accès à internet demeure un luxe. Le smartphone n’est pas à la portée du citoyen lambda», s’étonne-t-il. Toutefois, il faut reconnaître l’effort des autorités à travers l’Agence Nigérienne pour la Société de l’Information (ANSI), qui veut initier des villages intelligents au Niger. Un des objectifs de Malam Adji Waziry est d’organiser des «festivals» afin de matérialiser physiquement le travail de cette page dans la perspective d’une réappropriation culturelle
Pour Malam Adji Waziry, la culture nigérienne se porte ‘’moyennement bien’’. Néanmoins, estime-t-il, beaucoup de politiques publiques restent à rendues effectives. «Nous demandons au Ministre en charge de ce secteur, d’insuffler à la culture, une nouvelle dynamique, afin que les activités culturelles soient à la fois des moyens de développement économique et social du Niger. La forme doit refléter le fond quand on parle de renaissance culturelle. Dans cette optique, nous sollicitons auprès du Ministre de la Culture, la relance des festivals et de toutes les activités culturelles qui, depuis quelques temps, semblent être laissés à l’abandon» explique-t-il.
Pour Malam Adji Waziry, l’art et la culture doivent nourrir son homme au Niger. Il faut rappeler que certains festivals avaient insufflé à la jeunesse des années 1980 un engouement pour la réalisation des travaux d’intérêt général à l’époque. «Dès lors, nous pouvons apporter des correctifs idoines, à cette démarche des années 1980, pour en faire un véritable outil au service du développement économique, social et culturel du pays», souligne Malam Adji pour qui, le festival est assurément le miroir à travers lequel les jeunes et moins jeunes pourront s’identifier et se ressourcer. «C’est une vision d’avenir, un avenir tel que nous le souhaitons pour la jeunesse, un avenir plein d’espoirs, un avenir radieux», dit-il. Dans le sillage ‘’Les Nigériens Nourrissent les Nigériens – 3N’’, on doit aussi aller vers ce qu’il a appelé «NCN», c’est-à-dire ‘’Les Nigériens Consomment Nigérien’’. «En effet, pour pouvoir contribuer à la promotion de la culture du Niger, la jeunesse nigérienne doit favoriser la consommation de ce que nous produisons afin de donner une force à nos artistes et à notre économie tant sur le plan vestimentaire que sur le plan culinaire, etc,…», dit –il.
Aïssa Abdoulaye Alfary(onep)