La saison pluvieuse est attendue aussi bien par les agriculteurs que par les éleveurs pasteurs en particulier dans la région d’Agadez. De par sa position en dessous de l’isohyète 200 mm, la région d’Agadez est une entité légalement déclarée zone pastorale par excellence par la loi n° 61-05 du 26 Mai 1961. En ce début de l’installation de la saison d’hivernage, la région fait face à un retour des pasteurs du sud vers le nord à la recherche de la ‘’terre salée’’ mais surtout pour s’installer sur les sites pastoraux. Cette période de soudure est aussi marquée par les mouvements internes des animaux avec des concentrations autour des points d’eau et des parties pourvues en jeunes pousses.
Les souhaits des pasteurs sont de bénéficier de la clémence divine à travers des pluies abondantes sur les zones pastorales afin que leurs animaux puissent avoir du pâturage. Cette campagne est ainsi suivie avec une réelle attention par les services techniques et les organisations pastorales. L’Etat et ses partenaires, comme dans leurs habitudes, apportent leur soutien et accompagnement aux organisations pastorales en vue de les aider à supporter cette transition, notamment par la mise en place des stocks d’aliments pour bétail.
L’installation de la campagne pastorale suit son cours avec les pluies tombées, au cours du mois de juin, dans certaines localités de la région. Les premières pluies enregistrées ont favorisé l’apparition des jeunes pousses, observées par endroit et qui poursuivent leur développement normal. Selon la situation décadaire (troisième décade de juin) de la Direction Régionale de l’Elevage, le stade phénologique de ces jeunes pousses varie de la germination à la levée simple, accessibles par endroit aux petits ruminants. Selon Mme Moctar Salamatou, Directrice Régionale Adjointe de l’Elevage, cette période est très difficile pour les pasteurs dont l’alimentation des animaux est assurée par des débris de pâturage résiduel, presque inexistant ainsi que les jeunes pousses observées là où ces dernières sont accessibles aux animaux.
Cherté d’aliments pour bétail malgré leur disponibilité
Comme à ses habitudes l’Etat a mis en place des stocks d’aliments pour bétail dont le processus suit son cours dans la région. La vente à prix modéré de ces aliments pour bétail a d’ores et déjà démarré dans beaucoup de communes de la région, notamment à Agadez, Tchirozerine, Tabelot, Dabaga, Arlit, Dannet, Gougaram et à Iférouane. «Cette vente à prix modéré d’aliments pour bétail (son de blé) mis en place par l’Etat a débuté et elle vient soulager les éleveurs en cette période où le pâturage est rare et que les aliments pour bétail coûtent chers sur les marchés locaux», a expliqué Mme Moctar Salamatou.
Il est constaté en cette période de soudure, que sur les marchés locaux la demande en aliments pour bétail par les éleveurs reste de plus en plus forte. Cela est dû à la rareté et à la pauvreté en éléments nutritifs du pâturage sur les parcours mais aussi à l’existence de petites entreprises d’embouche, entrainant du coup une flambée des prix de ces intrants sur les marchés locaux malgré leur disponibilité.
Ainsi à la date de 29 juin 2023, les prix moyens des intrants sur les marchés d’Arlit, d’Aderbissinat et dans la commune urbaine d’Agadez se présente comme suit. Le sac de 50 kg de son de blé est à 11.875 contre 9.850F à la même période de l’année passée ; celui du sac de 50 kg du tourteau de graine de coton est à 11.000 F contre 9.500 F à la même période de l’année passée ; le sac de 50 kg des coques de niébé est en baisse 9.000F contre 13.000F à la même période de l’an 2022. Quant aux prix des sacs des fanes de niébé, d’arachide, des gousses de Faidherbia albida et d’Acacia tortillis, ils sont restés stables entre 2.500 F et 5.000 F le sac.
Dans ses efforts d’atténuation de la situation pastorale dans la région d’Agadez, l’Etat bénéficie du soutien de certains de ses partenaires. C’est ainsi que pour atténuer les effets de la crise alimentaire et renforcer la résilience des producteurs, d’importantes quantités de stocks ont été mises en place par l’Etat. Aussi à la date du 29 juin 2023, sur les 3000 tonnes prévues 2.690,32 tonnes de son de blé ont été livrées et placées dans les 5 départements de la région dont 450,52 T pour le compte de stock de sécurité placées au niveau de la direction régionale de l’élevage.
Situation des pâturages et des points d’eau
Selon les analyses des données de la direction régionale de l’élevage à la troisième décade du mois de juin, la situation du pâturage est passable dans son ensemble voire inquiétante par exemple à Iférouane. « En effet le pâturage herbacé composé d’espèces annuelles est rare voire inexistant. Par ailleurs, les pluies enregistrées ont permis l’apparition de poches de jeunes pousses, au stade phénologique variable (germination, levée simple) par endroit, peu ou pas accessibles aux petits ruminants. On assiste également, à la faveur des pluies enregistrées, à un début de régénération des ligneux. Pour le moment, le Panicum turgidum et les ligneux à dominance Acacia Sp, et les jeunes pousses par endroit assurent pour l’essentiel l’alimentation de base des animaux », indique le rapport d’analyse de la troisième décade en date du 29 juin 2023.
Les puits et forages pastoraux constituent en majorité les points clés d’abreuvement des animaux. Dans les centres urbains, on retrouve aussi les bornes fontaines. La situation pastorale présente une insuffisance d’eau dans certaines zones du département d’Iférouane (Ziguilaw, Foadet, Agalal) et Timia (Arwa, Tekanasser, Assoday) due à la forte chaleur rendant difficile l’abreuvement des animaux. Cependant, les pluies enregistrées ont permis des faibles retenues d’eau de surface. Ici on peut notifier quelques mares comme Amalolé, Gani, Ingall, Alakat, Tchimagayan (Ingall) qui contiennent faiblement de l’eau et constituent de surcroit des points d’abreuvement.
Ces points d’eau de surface viennent alléger l’abreuvement des animaux en cette période de soudure ou certains éleveurs étaient obligés de parcourir de longues distances pour abreuver leurs troupeaux au regard de la profondeur et au faible débit des puits.
Mouvement précoce des troupeaux
Le mouvement des animaux est caractérisé en cette période par les déplacements présentant des disparités. Ainsi, dans le département d’Aderbissinat, c’est des mouvements du sud vers le nord, dans la zone de Tchintaborak à la recherche du pâturage et des points d’eau pour l’abreuvement. Les éleveurs commencent à regagner leurs terroirs d’attache. La bande allant de Marandet à Tchintaborak constitue les zones de fortes concentrations du bétail. On note également l’arrivée des éleveurs transhumants en faible quantité avec leurs animaux venant du Sud (Tanout etc…) sans aucune anomalie sur les ressources pastorales. Ce mouvement a été précoce cette année dû à l’installation de la saison hivernale dans le sud.
Dans le département d’Ingall, les éleveurs locaux tournent autour de leur terroir d’attache à la recherche du pâturage. Des concentrations d’animaux s’observent autour des forages, des stations de pompage pastorales (SPP) et des puits pastoraux. Il faut noter que ces mouvements se font du nord (IRHAZER) vers le sud suite au manque de pâturage total dans la partie nord du département. Ainsi le peu de pâturage de la bande sud est sous pression et pauvre en éléments nutritifs. Dans le département d’Iférouane, les mouvements sont internes, guidés par la recherche des pâturages.
Situation zoo sanitaire calme
La situation zoo-sanitaire de la région est globalement calme, exception faite du département d’Aderbissinat où on note un foyer de suspicion de pasteurellose chez les caprins. Ainsi, les données remontées sur cette situation présentent 2 foyers pour un effectif 80 troupeaux parmi lesquels 8 malades ont été enregistrés, fort heureusement pas de morts. Très rapidement des mesures ont été efficacement prises qui ont consisté au traitement des animaux malades, l’isolement et la vaccination du troupeau des animaux saints.
Ali Maman ONEP/Agadez