
Les pays de l’Alliance des États du Sahel (AES), comprenant le Burkina Faso, le Mali et le Niger, font face à des menaces terroristes modernes croissantes. Les groupes terroristes opérant dans la région ont vu leurs méthodes évoluer considérablement, aidés en cela par certaines puissances étrangères. Ces groupes, autrefois limités à des attaques conventionnelles, sont désormais équipés d’armes sophistiquées, comme les drones et les armes lourdes. Face à cette menace changeante, les gouvernements des pays de l’AES doivent impérativement intégrer la cybersécurité dans leur stratégie globale de défense.
L’évolution des menaces : vers des attaques cybernétiques
Les attaques physiques contre des infrastructures critiques sont déjà une réalité dans la région. Le Niger, par exemple, a récemment été victime d’une attaque sur ses pipelines, une infrastructure essentielle pour l’économie du pays. Cette évolution est alarmante, car elle marque le passage des attaques contre les forces armées vers des attaques contre des infrastructures civiles et industrielles.
Ce développement pose une question cruciale : si ces groupes terroristes sont capables de mener des attaques physiques contre des infrastructures, pourquoi ne pourraient-ils pas se tourner vers des attaques informatiques, c’est à dire des cyberattaques pour déstabiliser encore davantage la région ? La paralysie des infrastructures critiques, comme les réseaux électriques, les télécommunications ou les systèmes financiers, par des cyberattaques pourrait avoir des conséquences dévastatrices sur les trois pays de l’AES.
L’Impact potentiel des cyberattaques
Les cyberattaques sont particulièrement dangereuses parce qu’elles peuvent frapper à distance, sans qu’il y ait besoin de présence physique sur le terrain. Les groupes terroristes pourraient cibler des secteurs névralgiques comme :
- Les réseaux d’énergie et d’eau, perturbant ces services essentiels;
- Les systèmes financiers, provoquant l’effondrement des transactions économiques ;
- Les infrastructures de santé, mettant en péril la prise en charge des populations.
De telles actions, orchestrées avec des cyberattaquants, pourraient bloquer les activités quotidiennes des pays de l’AES, semer le chaos, et engendrer des conséquences désastreuses pour les populations. La vulnérabilité actuelle des systèmes informatiques, combinée à l’absence d’un cadre juridique et institutionnel pleinement opérationnel, expose les pays de l’AES à des risques imminents.
Le cas du Niger : Une stratégie en place, mais des défis à relever
Le Niger a pris des mesures pour renforcer sa cybersécurité en adoptant une Stratégie nationale pour la période 2023-2027. De plus, plusieurs textes de loi encadrant le domaine de la cybersécurité ont été promulgués depuis 2017. Toutefois, malgré ces efforts, le pays ne dispose toujours pas d’un cadre institutionnel totalement opérationnel. Cela signifie que les institutions chargées de la cybersécurité ne sont pas encore pleinement capables de répondre rapidement et efficacement aux menaces et aux attaques.
Pourquoi un cadre juridique et institutionnel opérationnel est essentiel
Pour qu’une stratégie de cybersécurité soit efficace, elle doit s’appuyer sur une collaboration étroite entre les secteurs public et privé. Les pays de l’AES doivent veiller à ce que leurs cadres juridique et institutionnel soient pleinement fonctionnels pour pouvoir répondre aux menaces actuelles. Parmi les mesures à mettre en place, on peut citer :
- La création d’une autorité nationale dédiée à la cybersécurité, dotée des ressources et des compétences nécessaires pour réagir rapidement en cas d’incident ;
- L’élaboration de protocoles de coopération avec les partenaires régionaux et internationaux pour un partage d’informations efficace ;
- La sensibilisation des entreprises et des citoyens aux meilleures pratiques en matière de sécurité informatique.
Conclusion : Agir avant qu’il ne soit trop tard
La cybersécurité est désormais un enjeu crucial pour les pays de l’Alliance des États du Sahel. Alors que les menaces terroristes continuent d’évoluer, il est essentiel que ces pays anticipent les attaques futures en renforçant leur cadre juridique et institutionnel. Développer une capacité de cybersécurité robuste est une priorité pour protéger les infrastructures critiques, maintenir la stabilité et assurer la sécurité des populations.
Le temps n’est plus à la réaction, mais à l’action proactive pour empêcher les cyber menaces de fragiliser davantage la région.
Dr Assoumana Hassoumi
Consultant formateur
asumana.hasumi@gmail.com
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Niamey, Niger