Au Niger, plus précisément à Niamey, les gens portent un regard différent sur les albinos. Communément appelé ‘’Zabaya’’, les albinos vivent encore une situation de stigmatisation du fait des préjugés et de la méconnaissance de l’albinisme. Certaines personnes vont jusqu’à cracher en voyant les albinos et cela, pour soit disant contrecarrer une certaine malédiction et éviter à ce que la personne enfante à son tour un albinos. D’autres personnes vont jusqu’à les mépriser pour une condition qu’ils n’ont pas choisie. En effet, du fait de leur apparence physique, les albinos sont le plus souvent persécutés.
Confronté à des sobriquets tels que ‘’tomatisé’’ et autres propos discriminatoires, les albinos ne sont pas à bout de leur peine. Si dans certains pays, ils sont victimes de violence physique, voir de sacrifice humain, au Niger, c’est surtout la violence verbale qui est exercée contre eux. Pour un albinos adulte cela pourrait passer mais pour un enfant, cet état de fait l’indispose et le met mal à l’aise. Cela pourrait paraitre normal pour certains mais en réalité c’est offusquant.
Selon la présidente de l’Association Nationale des Personnes Atteintes d’Albinisme, Mme Khadîdja Moumouni, les albinos sont assez souvent confrontés à ces problèmes. Elle a confié que certaines personnes refusent même de partager le même taxi avec un albinos. Et au-delà de ces problèmes, il y a également celui lié au mariage surtout affirme-t-elle du côté de la belle famille qui souvent est rétissante par crainte d’avoir des enfants atteintes d’albinisme. Toutefois, elle affirme que la société nigérienne est tolérantecomparée à certaines sociétés africaine. Cette stigmatisation, soutient-elle est due à un manque de sensibilisation des populations sur la question. Ainsi donc déclare Mme Khadîdja Moumouni, il est temps que les gens prennent conscience que l’Albinisme n’est pas une maladie contagieuse ou une malédiction. Il s’agit plutôt d’une condition, a-t- elle précisé.
C’est d’ailleurs dans cette optique qu’a été créée l’Association Nationale des Personnes Atteintes d’Albinisme. C’est une Association qui a commencé ces activités en décembre 2014 avec neuf (9) membres et dont le siège se trouve au sein du centre dermato-lèpre a précisé Mme Khadidja. L’association intervient dans plusieurs domaines dont celui de la santé, l’éducation, l’emploi, la formation, l’autonomisation. Cependant, le premier pilier de l’Association, c’est la lutte contre la stigmatisation des personnes atteintes d’albinisme, a-t-elle martelé.
Parmi les actions que mène l’Association, Khadidja souligne que dans le domaine de la santé, l’association est assistée par un dermatologue et un ophtalmologue. En effet, l’albinisme, est un problème de santé à vie, selon elle. «Le fait que nous n’avons pas la mélanine ou une insuffisance de la mélanine, crée un problème au niveau de la peau et des yeux». C’est cette insuffisance qui explique la blancheur de leur peau. De ce fait, la peau est sensible au soleil et la vision aussi est très basse. A ce titre, il faut noter que le problème de santé auquel les personnes atteintes d’albinisme sont confrontées c’est : le cancer de la peau. «C’est pourquoi, nous faisons la prévention avec l’appui de certains partenaires. Et cette prévention se fait par la distribution de crèmes solaires,de vêtements protecteurs, de chapeaux et des lunettes de soleil. A cela s’ajoutent aussi les consultations régulières», a ajouté Mme Khadîdja Moumouni.
‘’L’Albinisme, une condition et non une maladie contagieuse’’, dixit Mme Khadîdja Moumouni, présidente de l’ANAAN
Selon Mme Khadîdja Moumouni, les personnes atteintes d’albinisme ont régulièrement besoin de se faire consulter, il ne faut pas attendre seulement qu’on ait des plaies ou qu’on commence à développer des lésions précancéreuses pour se faire consulter. Aussi, il y a également le traitement précoce, qui consiste pour une personne qui a des plaies et des lésions, à aller voir un dermatologue. Des consultations ophtalmologiques, l’usage des lunettes solaires, des verres correcteurs, des collyres pour protéger la vision qui est déjà faible sont aussi organisées par l’association.
Sur le plan de l’éducation, il s’agit dit-elle surtout, de faire la promotion de l’éducation des enfants atteints d’albinisme.
«Le premier problème de l’enfant atteint d’albinisme inscrit à l’école, c’est la vision parce qu’il n’arrive pas à bien lire au tableau comme ses camarades. Il y a aussi le fait que les enseignants qui tiennent les enfants ne comprennent pas que l’enfant est malvoyant. Or quand l’enseignant ne sait pas cela, c’est un problème», a-t-elle déploré
Sur le plan de l’emploi, Mme Khadîdja Moumouni soutient que du fait de leur handicap et malgré le quota de 5% octroyé aux personnes handicapés, il y a toujours le problème d’emplois compte tenu de la discrimination.
Par ailleurs, a-t-elle notifié grâce à l’appui des ONG dans le cadre des AGR, l’association, a appuyé 6 personnes atteintes d’albinisme pour le commerce. Et afin de venir plus en aide aux personnes atteintes d’albinisme par le biais des formations, et d’obtenir des fonds d’appui; l’association a engagé des démarches auprès des bonnes volontés en vue de trouver les voies et moyens d’appuyer les femmes pour des AGR, afin qu’elles puissent s’autonomiser et s’intégrerdans la société. A titre d’exemple, Mme Khadîdja Moumouni a confié qu’à Maradi, des jeunes albinos ont suivi des formations et sont maintenant installés à leurs comptes. «On a eu un jeune homme qui a suivi une formation en mécanique, réparation des taxis motos. Il y avait plus de 50 apprentis; il était le meilleur», affirme Khadîdja Moumouni avec les yeux pétillant de fierté.
L’association fait aussi de la sensibilisation, par le biais des témoignages; des exemples de gens qui ont réussi et qui se sont intégrés dans le tissus économique, cela pour montrer à la société que les albinos aussi peuvent réussir. Cela peut contribuer aussi éliminer les préjugés. A cela s’ajoute aussi, la sensibilisation des enseignants; des élèves, des parents.«Nous sommes dans un processus de plaidoyer avec le Ministère de l’Education par rapport à la prise en compte des besoins spécifiques des enfants atteints d’albinisme parce que c’est surtout quand l’Etat intervient qu’on aura plus de poids».
«Nous avons des droits. Certes nous avons des limites, mais il faut savoir accepter la diversité, peau claire ou noir, grand ou petit,il faut s’accepter», a dit Mme Khadîdja Moumouni.
Il faut retenir que l’Albinisme n’est pas une maladie contagieuse encore moins une malédiction. Les albinos sont aussi merveilleux que ceux qui ne sont pas atteints d’albinisme.
Rahila Tagou(onep)