
Se retrouver à la devanture des maisons le soir autour de la théière, discuter entre amis des choses de la vie et des longues journées de durs labeurs en attendant de siroter la 1ère et la 2ème pose, voir même la 3ème pose de thé pour les moins nantis, est une tradition dans nos ville comme en campagne. Au fil des années et au gré des influences qui nous sont parvenues du Maghreb, la Chicha a fait son apparition avant d’être vite interdite par les autorités. Ce comportement peu hygiénique de partage du même verre de thé et de la même pipe à chicha, constitue un facteur à risque dans le contexte de la pandémie mondiale à coronavirus COVID 19. Un danger que n’ignorent pas les jeunes des «fadas» qui rechignent pourtant à changer de comportement.
A la première prise de contact avec les jeunes de la «fada» d’un quartier, dans le 5èmearrondissement de la ville de Niamey, les membres ont voulu jouer la franchise avec leur «grand frère», comme ils aiment m’appeler. «Il est interdit de nous prendre en photo ou de prendre en photo notre base», préviennent-ils par l’intermédiaire de leur président. «Il est aussi interdit de nous identifier formellement, sans quoi nous refuserons de nous entretenir avec vous», ajoutent les jeunes gens. Cette soi-disant «base» se trouve en plein espace public, à l’intersection de deux rues du quartier où il n’existe pas d’éclairage. A cette remarque, le président du groupe, un jeune cadre qui exerce dans le secteur du marketing, me fait savoir que c’est à cause de leur penchant pour la consommation de la chicha à longueur de journée, nonobstant son interdiction et son bannissement des commerces par les autorités. En plus «cela ferait une mauvaise publicité pour un commercial de ma carrure», finit-il par lâcher.
Une fois la confiance établie, plusieurs membres du groupe prennent la parole pour expliquer pourquoi ils n’utilisent que 2 verres de thé pour une douzaine de personnes et une seule pipe à chicha qu’utilisent même les passants. «Nous ici, on est des jeunes dynamiques et en plus nous sommes instruits. On est contre la ségrégation c’est pourquoi nous utilisons tous les mêmes verres. Mais s’il y’a ‘’des grands’’ de passage, on les sert d’abord», indique le jeune commercial qui est surpris de nos inquiétudes concernant le partage de la même pipe de chicha. «Nous sommes tous sains ici. On se connait très bien. Et puis, nous pensons fermement que la fumée de la chicha ou de la cigarette n’est pas favorable au COVID 19», dit-il. Une rumeur à laquelle tiennent mordicus ces amateurs de chicha.
Un peu plus loin, toujours dans le 5ème arrondissement de Niamey, c’est le même constat qui se dresse dans un coin sombre de la rue : une théière avec quatre verres à thé et du matériel de chicha de fabrication locale dont la base est constituée d’une grande bouteille vide de mayonnaise. Ici les gens sont assis coude-à-coude et semblent ne pas se soucier de la distanciation sociale. Ils expliquent cet état de fait par le couvre-feu. «Si nous sommes assis comme des sardines, c’est la faute au couvre-feu et aux gendarmes qui viennent ramasser nos effets. Assis comme nous sommes, nous sommes sûrs de nous réfugier dans les maisons en emportant nos effets à la moindre alerte», confie Moussa, la trentaine révolue. Il nous dit aussi croire en la présence du Coronavirus COVID 19 dans le pays.
Depuis son apparition en Chine, le Coronavirus COVID 19 est devenu aujourd’hui une pandémie mondiale autour de laquelle circulent malheureusement de fausses rumeurs. Ce qui complique davantage la riposte dans beaucoup de pays. Pour le bien-être de tous il est urgent de se conformer aux recommandations des autorités en charge de la riposte et de l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
Souleymane Yahaya(onep)