
Après la réussite du coup d’Etat militaire du 15 avril 1974, dans son Discours-Programme du 22 avril 1974 qu’il prononça dans son bureau de l’Etat-major des FAN, le Général Seyni Kountché disait ceci à propos de l’Ecole Nigérienne avec une certaine conviction : « Notre désir est de voir l’école nigérienne sortir des sentiers battus, accomplir cette reconversion indispensable qui doit en faire une école socialement intégrée et économiquement disponible ».
En 1974, quoique « désorganisée », l’école nigérienne n’était pas totalement laminée ; totalement dans un état lamentable ; dans un état calamiteux ; comme elle l’est aujourd’hui. Pourtant, l’Homme du 15 avril 1974 avait parlé de la transformation positive de l’école pour en faire une structure sociale susceptible de favoriser le développement national. Alors plus qu’hier, c’est surtout aujourd’hui que l’école nigérienne a besoin fortement d’être repensée de fonds en comble, pour en faire une école nouvelle ; une école de la refondation.
Depuis les évènements mémorables et historiques du 26 juillet 2023, il est question de refondation tous azimuts dans ce Niger glorieux et éternel ; l’école ne doit pas en être exclue. Plus que toute autre structure sociale, elle est celle qu’il faut absolument transformer selon le contexte nouveau de changement radical dans lequel le Niger s’était inscrit depuis le coup d’Etat militaire du 26 juillet 2023.
Mais surtout parce que l’école qui est faite pour la vie sociale, qui doit promouvoir le développement national, doit être à l’aune de la société dans laquelle elle se développe. En tout cas, sans conteste, elle doit avoir les mêmes caractéristiques que cette société nouvelle au sein de laquelle, elle se meut. Tant il est vrai que le Sociologue-Pédagogue Emile Durkheim a eu raison de dire avec justesse et pertinence : « L’homme que l’éducation doit réaliser en nous, ce n’est pas l’homme tel que la nature l’a fait ; mais tel que la société veut qu’il soit ; et elle le veut, tel que le réclame son économie ».
Cette école de la refondation, laquelle est absolument et nécessairement indispensable à instituer, doit d’abord concerner un certain nombre de caractéristiques essentielles. C’est-à-dire que ladite école de la refondation doit être mise en place, selon le type d’école convenable pour le développement national ; selon les contenus d’enseignement/apprentissage véritablement nouveaux à concevoir pour avoir le modèle de citoyen qu’il faut pour la bataille du développement ; selon le cursus scolaire consistant, fécond, calqué sur les problèmes réels de développement national ; selon la configuration politique locale et régionale valorisée pour booster le développement national et la sécurité nationale.
Pour qu’on puisse parvenir à cette école de la refondation, il faut incontestablement réformer l’école nigérienne actuelle de fonds en comble. Cette réforme véritablement indispensable, ne doit pas consister à faire valoir « du trompe-œil » ; « du tape-œil » ; « des effets de mode » ; « de la recherche effrénée du clinquant ». Ce qu’il faut faire valoir, en vérité, ce sont des actions concrètes de transformation positive de l’école. C’est en fait du pragmatisme véritable qu’il faut et non des actions d’imitation sans lendemain et sans avenir.
Les problèmes récurrents de l’école nigérienne sont bien connus et ne constituent en vérité, aucun mystère. Ce sont des problèmes de dyslexie, de dyscalculie, de dysorthographie, de dysgraphie et de dysphasie. En vérité, si l’on veut du changement véritable de l’école nigérienne, ce sont sur ces problèmes précités qu’il faille agir et cela est bel et bien possible, pour peu que l’on fasse appel à des spécialistes attitrés et non à des vendeurs de « pacotille pédagogique » ; voire à des vendeurs d’illusions.
La dyslexie : c’est l’incapacité d’un apprenant ayant franchi le cap du Cours d’Initiation de pouvoir lire couramment « sans trébucher ».
La dyscalculie : c’est l’incapacité d’un apprenant ayant franchi le cap du Cours d’Initiation de savoir compter, de faire la différence entre les chiffres et les nombres, de pouvoir raisonner pour trouver la solution d’un problème.
La dysorthographie, c’est l’incapacité d’un apprenant ayant franchi le cap du Cours d’Initiation, de pouvoir écrire correctement les mots ; de pouvoir bien orthographier les mots.
La dysgraphie, c’est l’incapacité d’un apprenant ayant franchi le cap du Cours d’Initiation, de pouvoir écrire lisiblement les mots.
La dysphasie, c’est l’incapacité d’un apprenant ayant franchi le Cours d’Initiation de pouvoir bien prononcer les mots ; de pouvoir bien articuler les mots.
Voilà en vérité, les problèmes pédagogiques qui se posent avec acuité à l’école nigérienne. Pour transformer « cette école moribonde » ; c’est sur ces problèmes précités qu’il faille agir.
Cela est bel et bien possible en faisant valoir les actions concrètes et fécondes suivantes : améliorer la formation initiale faite à l’Ecole Normale, faire en sorte que la formation continue soit régulière et efficace, renforcer l’encadrement pédagogique, procéder sans conteste à des séances permanentes de remédiation des enseignements/apprentissages déjà faits, mais non assimilés totalement par les apprenants, concevoir de nouveaux programmes d’enseignement/apprentissage, élaborer de nouveaux manuels didactiques. Le tout doit être couronné, par le souci de voir enseignants de terrain comme encadreurs de terrain, même les cadres centraux du Ministère être capables de creuser leurs méninges et de faire des innovations pertinentes susceptibles d’améliorer le système éducatif d’une manière générale.
Il faut que les cadres centraux du Ministère, que les Directeurs Régionaux de l’Education, que les Inspecteurs de l’Education Nationale, que les Conseillers Pédagogiques et que les Directeurs d’Ecole, de façon pragmatique, concrète, féconde, se préoccupent perpétuellement de sauver les enfants du peuple « du naufrage pédagogique ». Tant il est vrai que le Pilote et Ecrivain français Antoine de Saint-Exupéry a eu raison de dire : « Ce qui me tourmente, ce ne sont ni ces bosses ni ces creux ; ce qui me tourmente, c’est que les soupes populaires ne guérissent point ; ce qui me tourmente, c’est un peu dans chacun de ces hommes Mozart assassiné ».
L’école de la refondation doit parvenir de façon simple ; avec des moyens du bord, à solutionner les problèmes aigus qui se posent à l’école actuelle et cela sans conteste, en faisant valoir le pragmatisme fécond, en lieu et place du verbiage infertile.
Par exemple, pour solutionner la dyslexie, la dyscalculie, la dysorthographie, la dysgraphie et la dysphasie, il y a des méthodes et des techniques pédagogiques et spécifiques à faire valoir de façon concrète. Pour peu que la vocation prévalût, pour peu que le sacerdoce éducatif existât, pour peu que l’abnégation manifeste intervînt ; ce sont des problèmes pédagogiques qui sont vite surmontables. Il n’y a rien qui n’est pas surmontable en matière de problèmes pédagogiques ; il suffirait tout simplement d’avoir l’art incontestable de pouvoir les solutionner.
Aussi pour pouvoir faire en sorte que des apprenants scolaires intériorisent : le patriotisme, le nationalisme, le civisme, il y a des disciplines scolaires ad ‘hoc sur lesquelles, il faut s’appuyer pour faire cela de façon certaine, pédagogique, didactique, durable et véritablement éducative. Ces disciplines scolaires ad ’hoc, ne sont ni plus ni moins que : l’Education Civique et Morale et sans conteste l’Histoire. Mais pour qu’il ait un enseignement/apprentissage consistant et prégnant, les programmes d’enseignement desdites disciplines, doivent absolument et nécessairement être revisités. Des ouvrages didactiques de bonne facture doivent être conçus par des spécialistes avérés. Et l’on verrait sans problème, comme par miracle, que l’on aura incontestablement de nouveaux types de citoyens « imbibés » de patriotisme, de nationalisme et de civisme. C’est par l’action pédagogique concrète et féconde, que l’on parvienne à faire acquérir des compétences ; et non par l’action politique. Il faut seriner en permanence les bonnes notions à intérioriser, il faut faire faire par les enseignants, de façon itérative les enseignements/apprentissages à l’envie, jusqu’à ce qu’ils deviennent comme des jeux d’enfant. Tant il est vrai que le Philosophe-Pédagogue Aristote a eu raison de dire : « Les choses qu’il faut apprendre pour les faire, c’est en les faisant qu’on les apprend ».
Refonder l’école nigérienne pour en faire une école nouvelle, originale, productive, doit passer nécessairement par la conception de nouveaux curricula ; c’est-à-dire de nouveaux programmes d’enseignement/apprentissage. Depuis l’indépendance du Niger, intervenue le 3 août 1960, et cela de façon fort regrettable, depuis l’époque coloniale c’était seulement en 1972, qu’une réforme véritable et totale de l’enseignement primaire avait eu lieu. Ladite réforme avait abouti à la conception de nouveaux programmes pour l’enseignement du premier degré. C’étaient les programmes de l’enseignement du premier degré adoptés en 1988 ; lesquels sont à quelques variantes près, eu égard à quelques modifications, qui sont toujours en vigueur. Sans conteste, en vérité, normalement, tous les dix ans les programmes d’enseignement/apprentissage doivent être changés au regard de l’évolution incontestable de la société.
Il urge donc que les cadres techniques du Ministère de l’Education Nationale, que les Directeurs Régionaux de l’Education Nationale, que les Inspecteurs de l’enseignement (tous degrés confondus), que les Conseillers Pédagogiques (tous degrés confondus) ; que les enseignants de terrain (tous cycles confondus), se mobilisassent pour « pondre » valablement de nouveaux curricula ; c’est-à-dire de nouveaux programmes d’enseignement/apprentissage, pour pouvoir sortir l’école nigérienne du creux de la vague. C’est un challenge magnifique, extraordinaire, patriotique auquel ils doivent répondre.
Elhadj Moumouni Mahamane Sani,
Inspecteur de l’Enseignement du Premier Degré à la retraite
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