
M. Seydou Asman, ministre du Commerce et de l’Industrie
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous faire un état des lieux à date de l’activité commerciale, du tissu industriel au Niger, d’abord le commerce et ensuite l’industrie ?
Merci pour cette occasion que vous m’offrez pour faire le bilan de nos activités à la tête de ce département ministériel, conformément à la lettre de mission qui nous a été confiée par le Président du Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie, Chef de l’État, le Général de Brigade Abdourahamane Tiani. Je tiens d’abord à remercier le Président du CNSP pour la confiance qu’il a placée en notre modeste personne. Je tiens aussi à remercier le Premier ministre et tous les membres du gouvernement pour l’accompagnement et la collaboration dont nous avons bénéficié pendant ces 18 mois. Il faut aussi remercier le peuple nigérien pour sa résilience, pour son engagement et surtout pour son esprit patriotique marqué à travers le soutien pendant ces 18 mois et qu’il continue encore à observer. Nos remerciements vont aussi à l’endroit des opérateurs économiques pour l’engagement qu’ils ont pris effectivement de participer à toutes les actions allant dans le sens du développement de notre pays, même si par ailleurs, vous avez constaté a des moments, certains esprits qui se sont permis de faire des crocs-en-jambe par rapport à certaines décisions des plus hautes autorités de notre pays.
Pour aller directement dans le sujet, ce qu’il ne faut pas perdre de vue, c’est qu’avant tout, le Niger est un pays enclavé, donc, de par sa position géographique, il est très loin des ports où certains produits peuvent nous arriver sans aucune difficulté. Ceci étant, l’embargo dont notre pays a été victime et dont on connaît principalement la motivation qui était à l’œuvre, c’est notamment la main de la France à travers la CEDEAO et l’UEMOA, a entraîné quelques difficultés liées à l’approvisionnement de notre pays en produits de première nécessité et bien sûr les produits pharmaceutiques. Ça, c’est dans le volet du commerce.
Quand on prend le volet industriel, c’est un volet pratiquement qui est embryonnaire parce que, ce qu’il faut rappeler, c’est que le Niger, à un certain moment de son histoire, disposait bel et bien des unités industrielles. Mais, par le fait de certaines injonctions faites aux autorités d’antan, nos sociétés ont été toutes privatisées. Malheureusement, le résultat a été leur disparition aujourd’hui. Et quand vous faites un tour dans notre zone communément appelée ‘’Zone industrielle’’, c’est avec des larmes aux yeux que vous allez constater les dégâts qui ont été faits. C’est un cimetière d’usines.
Il faut rappeler que, malgré toutes ces sanctions, l’État, à travers notamment les engagements du Président du Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie, a fait en sorte que le Nigérien se retrouve dans les meilleures conditions, a pu survivre et surmonter cette période de difficultés même si par ailleurs, au lendemain du 26 juillet 2023, certains ont prédit que nous ne pouvons pas tenir trois (3) semaines. Dieu merci, aujourd’hui, à travers ce qui se passe, ça fait la fierté des Nigériens.
Monsieur le ministre, depuis votre nomination, pouvez-vous nous dire, très brièvement, quelles sont les actions entreprises ou envisagées pour la promotion du commerce et de l’industrie au Niger ?
Il faut toujours rappeler le temps qui prévaut dans notre pays, ça, c’est une période d’embargo total. Et cela, il faut le prendre du point de vue économique et même sécuritaire parce qu’il ne faut pas oublier que, quand la décision de la CEDEAO a été prise d’imposer l’embargo à notre pays, notre principal corridor qui est le Bénin a été fermé, c’est le port le plus proche de notre pays. Cela étant, vous avez constaté qu’immédiatement les mêmes acteurs ayant causé ces sanctions ont activé l’insécurité pour davantage asphyxier notre pays.
Donc, pendant ce temps, le Président du Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie, Chef de l’État, exactement le 28 juillet dans son message à la nation, a rassuré aussi bien les Nigériens que la communauté internationale du respect de tous les engagements pour que notre pays reste dans la marche des pays qui gagnent. Ceci étant, nous avons immédiatement entrepris des démarches par rapport à cette question, d’abord avec nos propres frères, c’est-à-dire à l’intérieur du pays en faisant des rencontres notamment pour amener l’opinion à maintenir le cap et à accompagner l’Etat. Cela a donné comme résultat la création de 11 000 entreprises par des jeunes et des femmes de notre pays et cela dans tous les secteurs d’activité. Concomitamment à cela, nous avons entrepris des rencontres à l’extérieur, à travers tous les pays amis du Niger. Notamment, nous nous sommes rendus en Chine, en Russie, en Türkiye, en Iran et bien d’autres pays et cela a donné comme résultat la création de 39 unités industrielles dans notre pays, ce qui n’est pas rien.
Ce qu’il faut retenir, c’est d’abord les investissements qui vont être faits qui sont de l’ordre d’environ 365 milliards de FCFA et la création d’emplois permanents pour notre jeunesse, soit plus de 2899 emplois permanents. Il faut rappeler effectivement les autres efforts faits par l’État, c’est notamment les exonérations à concurrence de 67 milliards de francs CFA. Tout cela a été possible grâce à notre code des investissements dont nous disposons. Ce qu’il faut préciser, ces unités industrielles ont été créées, notamment dans les secteurs de l’aliment bétail, de la santé, du bâtiment et bien d’autres.
M. le ministre, par rapport aux exonérations, vous parlez de 67 milliards que l’État a concédés, quel a été l’intérêt pour l’État ?
Bon, vous savez, à travers ces exonérations, c’est une sorte de participation de l’État dans les actions de ces entreprises pour qu’elles soient réalisables, elles ont besoin de l’accompagnement de l’État. Ce qu’il faut considérer, c’est que certes l’État à travers ces exonérations perd, mais quand on regarde dans la réalité, ce n’est pas une perte. Parce que ça permet aux jeunes de trouver des emplois autour de ces unités industrielles. Ça nous permet d’avoir les produits dont nous avons besoin sur notre territoire. Ça veut dire que les Nigériens, autour de ces unités industrielles qui vont être créées, vont tirer le maximum de bénéfices possibles et mieux. Certes, dans l’immédiat, l’État perd en termes d’impôts, mais à long terme, l’État récupère parce que toutes ces structures vont payer des impôts et ça va générer des richesses.
Elles se portent bien aujourd’hui ces sociétés à qui on a accordé ces 67 milliards d’exonérations ?
Elles se portent très bien parce qu’elles viennent de commencer. Vous prenez par exemple la société Niger Steel qui produit des fers à béton dont, vous avez vu à un moment, on a participé d’abord à son installation et sa mise en route dans le cadre de la fabrication de ce fer à béton, qui est aujourd’hui la fierté des Nigériens sur l’ensemble du territoire national. Vous avez aussi des structures comme Tambari Trading qui font des nattes en plastique, vous prenez par exemple Amana Agro, qui fait l’aliment bétail. Donc, vraiment, c’est une liste de 39 unités industrielles qui ont été créées dans notre pays. Il y a 10 qui sont opérationnelles aujourd’hui, 14 sont en voie de finition d’installation et puis 13 qui sont sur le point d’être installées sur l’ensemble du territoire national. Vous avez certaines qui sont dans la région de Tahoua, d’autres dans la région de Niamey et d’autres dans la région d’Agadez. Il faut préciser, c’est en fait la lutte que nous menons contre le chômage, parce qu’à travers cela, il faut voir effectivement l’apport que ces sociétés constituent pour notre pays en termes d’emploi.
Vous pouvez prendre l’exemple d’un pays, pas des moindres, l’un des plus développés du monde, quand il y a eu des élections et que le nouveau Président est arrivé, la première des choses qu’il a faites, c’est de taxer les produits qui sont importés chez eux. Et, il dit qu’il est prêt à détaxer tous ceux qui viennent investir chez lui. Ça veut dire quoi ? c’est une manière de dire que nous sommes d’accord que les gens viennent créer des industries chez nous, mais nous ne sommes pas d’accord que des gens viennent nous amener des produits finis. Cela a un double sens. D’abord, il faut voir en termes d’investissements ce que ça fait dans le pays, et en termes aussi d’emploi et d’apport de richesses à travers les paiements des impôts. L’État a beaucoup plus à gagner quand il fait venir des investisseurs chez lui que d’être un pays qui ne fait qu’importer. Donc, c’est cette logique aujourd’hui que nous avons adoptée et dont nous pensons que d’ici peu, en tout cas, le Niger va être un pays industrialisé parce que la volonté est là, celle du Chef de l’État.
Monsieur le ministre, la fermeture du corridor Niger-Benin a eu un fort impact, vous le savez très bien, sur le commerce dans notre pays. Pouvez-vous nous dire quelles sont les mesures prises pour la résilience de l’activité commerciale au Niger, voire sa relance sur des bases nouvelles et durables ?
Il faut toujours situer le Niger dans son contexte. C’est notamment celui de l’embargo qui est sans égal dans tout ce que nous avons connu dans le monde. Ce qui a été fait au Niger est inédit, c’est-à-dire l’action qui a été entreprise était carrément de mettre même au pas le pays, mais d’instaurer le chaos pour qu’il disparaisse. C’est cela en réalité l’objectif visé par ceux qui l’ont initié. Face à cela, la première des choses était d’abord la visite du Chef de l’État en République du Togo, à Lomé, en compagnie d’une forte délégation dont je faisais partie. Donc, lors de cette rencontre, il a été question de comment il fallait trouver une solution pour ravitailler notre pays pour la satisfaction de tous ses besoins, parce que de l’autre côté, le corridor qui était le plus proche, celui du Bénin, est fermé.
Par la volonté effective des deux Chefs d’Etat, nous sommes parvenus à nous entendre et la République sœur du Togo a pris l’engagement, effectivement, d’offrir cette possibilité au Niger. Donc, après cela, personnellement, j’ai conduit une mission au Burkina, entouré d’un certain nombre de partenaires, le Ministère de l’Economie et des Finances, à travers la Direction Générale de Douane, la Chambre de Commerce et d’Industrie du Niger et bien sûr, les cadres techniques du Ministère du Commerce et de l’Industrie. Nous avons rencontré nos homologues du Burkina Faso avec lesquels nous avons effectivement échangé dans le sens de mettre la procédure la plus indiquée pour ravitailler le Niger en produits de première nécessité. Et à ce niveau, je peux vous assurer que nous avons trouvé une attention particulière des autorités du Burkina Faso. Après cela, et comme je l’ai dit tantôt, il y a eu l’activation des attaques armées dans notre pays face auxquelles nous avons renforcé la sécurité autour de notre pays et surtout autour de ce corridor. Nous avons pris un autre arrêté pour interdire l’exportation du riz paddy et des céréales, notamment le riz blanc, le mil, le maïs, le blé, etc.
Est-ce que cette décision-là est respectée ?
Cette décision a été bel et bien respectée parce que ce qu’il faut signaler à ce niveau, c’est vraiment tout un arsenal de contrôles qui a été mis en place. Au-delà des cadres du Ministère du Commerce et de l’Industrie, à travers notamment la brigade dont nous disposons, tous les autres Ministères, surtout tous ceux qui sont en relation notamment avec la Défense et la Sécurité, sont instruits. Et, c’est ce qui a fait que pratiquement aujourd’hui, quand vous partez dans les contrées les plus éloignées, vous trouverez des céréales. C’est parce que les gens n’ont pas trouvé des possibilités pour les faire sortir. Mieux, il nous est arrivé à des moments de faire des saisies. Que ça soit par la brigade de contrôle du Ministère du Commerce et de l’Industrie, comme aussi par les autres Forces de Défense et de Sécurité au niveau des frontières. Donc, c’est vraiment une mesure qui fait son bon chemin et, donc, nous pensons que cela a été possible grâce effectivement à l’apport de l’ensemble des acteurs. Parce que la mesure telle qu’elle a été prise, si de part et d’autre chacun ne joue pas son rôle, c’est sûr qu’il va y avoir des difficultés. Mais, aujourd’hui, vraiment, on peut s’estimer heureux qu’il y ait des produits au Niger et à un prix pratiquement stable.
Parlons de ce corridor Burkina-Niger, vous avez parlé de l’insécurité qui règne dans cette zone. On sait aussi que l’État a mobilisé énormément de Forces de Défense et de Sécurité pour acheminer ces vivres. On peut avoir une idée de comment cela a été organisé ?
Le ravitaillement du Niger en produits de première nécessité, notamment tous les produits que nous avons aujourd’hui sur le marché, s’est fait ou se fait avec vraiment des moyens formidables. Il faut voir à travers ces escortes organisées une mobilisation très importante de nos Forces de Défense et de Sécurité. C’est souvent plus de deux mille à trois mille hommes qui sont mobilisés dans le cadre de l’escorte de nos produits. Il faut que les gens voient et perçoivent ce sacrifice parce qu’à tout moment, on peut avoir des attaques des terroristes. C’est pour dire, par rapport à cela, que ce sont des grands moyens qui sont mis et c’est jusqu’au sacrifice ultime que ce ravitaillement est fait. Et, l’État n’a jamais demandé un franc par rapport à ça. L’État assure seul par ses propres moyens. C’est une décision du Chef de l’État. Pour une question de souveraineté, il a dit que l’État ne demandera à personne de contribuer par rapport à cela et qu’il prend l’engagement ferme que ça soit une réalité. Aujourd’hui ça fait la fierté du Niger. Donc, c’est pour dire à ces opérateurs économiques du point de vue général certains certes ont bien suivi, mais d’autres ont trainé à le faire, qu’ils ne peuvent pas payer le prix de ce qui est fait autour de ces escortes-là. Parce que, c’est des vies que nous perdons souvent. C’est un sacrifice énorme.
Monsieur le ministre, comment développer des stratégies innovantes de commercialisation en vue de faciliter l’écoulement des produits agropastoraux en mettant l’accent sur le marché national, ainsi que sur les opportunités pour l’AES et notre continent en général ?
La première des choses, d’abord c’est d’identifier ce que la population produit et la pousser à produire en grande quantité. Par la suite, mettre autour des sites de production, des unités industrielles pour donner de la qualité à leurs produits. Et pour que cela y soit, le Ministère du Commerce et de l’Industrie est intervenu. Il continue à le faire autour de ses activités à travers les actions menées par certains de nos structures telles que l’Agence de normalisation, de métrologie et de certification et l’AN2PI. Pendant les 18 mois, nous avons eu à certifier environ trente-neuf produits.
Nous avons eu à vérifier plus de quatre mille quatre cent soixante-dix instruments de mesure à travers l’ensemble du territoire national. Nous avons mis au niveau de la Direction Générale des Douanes, trois unités pour pouvoir suivre la qualité des produits qui viennent à l’importation chez nous. Au-delà de ça, nous avons une autre structure, l’AN2PI, qui labélise nos produits. L’OAPI compte dix-sept pays membres dont le Niger. Donc, le premier acte à faire était de faire en sorte que nos produits soient acceptés au niveau de ces dix-sept pays-là. Et après cela, maintenant, ils vont atteindre le niveau de l’ensemble des pays africains et pourquoi pas le monde.
Monsieur le ministre, le gouvernement a pris récemment des mesures pour réduire les prix du ciment et du litre d’essence à la pompe. Et, qu’est-ce que vos services ont fait pour rendre effectives toutes ces mesures ? On a vu qu’il y a des gens qui outrepassent cette décision et qui se permettent de vendre à leur guise ces produits.
Ce qu’il faut dire d’abord pour ce qui est de la première mesure, c’est-à-dire celle de la réduction du prix du ciment, elle est intervenue suite aux grandes pluies que nous avons enregistrées ayant engendré aussi bien des pertes en vie humaine que des habitations. Dans le souci d’accompagner les Nigériens et de soulager la vie quotidienne, le Président du CNSP a pris cette décision. Donc, il a jugé utile de prendre cette mesure pour offrir à chacun de nous la possibilité de s’offrir un cadre décent. Donc, quand la mesure a été prise, effectivement, il y a eu par la suite un arrêté conjoint qui a été pris entre le Ministère de l’Economie et des Finances et le Ministère du Commerce et de l’Industrie pour fixer le prix de la tonne de ciment gris sur toute l’étendue du territoire national.
C’est une décision concertée avec les commerçants ?
C’est une décision concertée, pas avec les commerçants parce qu’ils ne rentrent pas dans la chaîne, mais c’est plutôt avec les industriels, les deux unités industrielles dont nous disposons. Lors de la rencontre que nous avons faite autour de l’ensemble des différents acteurs, nous étions parvenus à trouver le cadre réel pouvant nous permettre de réduire le coût du ciment. Mais, ce qu’il faut retenir, tout ce qui a été réduit n’est autre que ce que l’État perçoit. Il faut que les gens le comprennent. C’est la part de l’État qui a été concédée à la population en termes de paiement des impôts quand ces produits sortent des usines et avant qu’ils ne soient mis en vente, on applique les impôts. Ce sont ces impôts que l’État a complètement enlevés. Il faut que les gens le comprennent.
Et c’est pour cela que l’État se donne les moyens de combattre tous qui ont osé faire autre chose que vendre ces produits aux prix indiqués. Avant la mise en application de cette mesure, nous nous sommes rendus compte qu’il y avait une réticence des transporteurs parce qu’ils rentrent dans la chaîne. Comme je l’ai dit, ces structures industrielles ne disposent pas suffisamment d’un parc automobile pour faire la desserte au niveau de l’ensemble de notre pays. Donc souvent, et d’ailleurs pour la plupart elles font recours au privé pour faire ce transport. Donc, nous avons effectivement trouvé de la résistance du côté des transporteurs dans l’application de la mesure. Il y a eu une rencontre avec les différents syndicats relevant de ce domaine. Nous sommes parvenus effectivement à signer un accord les engageant à respecter cette mesure.
Ceci étant donc, nous avons mis en place des brigades immédiatement après que la mesure ait été prise. Nous avons activé nos différents services de contrôle sur l’ensemble du territoire. Donc, sur l’ensemble du territoire, ces contrôles sont faits nuit et jour et, souvent, ce que je tiens à préciser, même les ventes sont faites en présence des agents du Ministère du Commerce et de l’Industrie. Cela a un double sens parce que dans le cadre de ce travail que nous menons tous les jours, nous nous sommes rendus compte qu’il y a des esprits malins. Souvent, quand les camions rentrent, ils les détournent pour les amener au niveau de certains chantiers qui ne doivent pas bénéficier parce que cette mesure a été prise surtout pour les ménages. Ce qu’il faut signaler, cette mesure a provoqué une absence totale de l’importation du ciment. Pourquoi cela ? parce que notre ciment n’a pas d’égal en termes de qualité et aussi au niveau du prix. Parce qu’aucun opérateur économique ne trouvera de l’intérêt à aller acheter du ciment ailleurs pour l’amener au Niger parce qu’il ne sera pas acheté. Donc, de par cette mesure et la non disponibilité du ciment importé, a créé une sorte d’engouement, tout le monde veut la même chose à la fois.
D’où les difficultés au niveau de nos unités, de nos deux unités industrielles parce que, ce qu’il faut rappeler, dans le temps, les deux industries ne produisaient qu’environ trente-deux mille tonnes par mois. Mais, du fait de cette mesure et de la non disponibilité du ciment venant de l’extérieur, elles étaient dans l’obligation de revoir leur production. Et nous sommes aujourd’hui pratiquement à quatre-vingt-trois mille tonnes par mois, c’est dire qu’elles ont pratiquement triplé leur production. Cela explique souvent la difficulté pour certains à trouver ce ciment parce que la demande est très forte et c’est sur deux sociétés que tout le monde compte.
C’est une demande à l’interne ou bien le produit est exporté ?
Le produit n’est pas exporté. C’est le ciment 42.5 qui est autorisé parce que cela va dans le sens de nos plus hautes autorités à protéger nos unités industrielles. Nous avons, à un certain moment, fait des comités pour suspendre certains récalcitrants, certains que nous avons pris dans les filets.
Mais, du fait de cette mesure et de la non-disponibilité du ciment venant de l’extérieur, c’est-à-dire importé, ils étaient dans l’obligation de revoir leur production et nous sommes aujourd’hui pratiquement à 83 000 tonnes par mois. Cela veut dire qu’ils ont pratiquement triplé leur production. Donc, c’est ce qui explique souvent les difficultés pour certains à trouver effectivement ce ciment. C’est parce que la demande est très forte et c’est sur les deux sociétés que les gens se tournent. Le ciment 32.5 n’est pas exporté, c’est plutôt le 42.5 qu’ils sont autorisés à exporter. Et, tout cela va dans le sens des instructions des plus hautes autorités de notre pays à protéger nos unités industrielles. Vous vous êtes rendus compte qu’à un moment, nous avons fait des communiqués pour suspendre certains récalcitrants, certains que nous avons pris dans les filets, qui adoptent des comportements contraires à l’arrêté qui fixe le prix du ciment.
Monsieur le ministre, on a vu qu’effectivement vous avez pris des mesures. Mais une suspension de quinze jours ou même d’un mois, quel effet peut-elle avoir vraiment ?
En fait la mesure, c’est ce que la loi dit et ça peut aller au-delà de cinq ans jusqu’à une suspension définitive, mais c’est graduel. Donc, c’est pour que ceux-là que nous avons pris en faute puissent se corriger. Mieux, ces mesures sont accompagnées de sanctions financières. Des pénalités allant de 1 million à plus. Et cela a engendré dans le court temps, environ plus de soixante millions FCFA de verbalisations que nous avons pu récupérer au profit de l’État. Aussi, il faut préciser par la même occasion que nous avons, par rapport à la mesure du ciment, dans le cadre de nos contrôles, épinglé aussi des grandes entreprises qui se faufilent dedans pour se procurer effectivement ces matières. Nous n’avons pas hésité à leur infliger des sanctions lourdes et mieux, à saisir la Direction Générale des Impôts pour ouvrir des enquêtes. Et aussi, nous avons l’habitude de prendre des individus sur le fleuve avec notre 32.5 en direction de certains pays qui ont fermé leurs frontières avec le Niger.
Quelle est la différence entre le ciment 32.5 et 42.5 ?
Le 32.5, c’est le ciment qui est utilisé par tous ceux qui font des infrastructures à moindre coût, c’est-à-dire qui ne supportent pas des poids. Mais, quand vous devrez construire un immeuble, là où on a besoin de résistance, il faut nécessairement avoir le 42.5.
Maintenant, par rapport à la question de l’essence, c’est qu’il faut préciser qu’effectivement après la réduction du prix du litre de gasoil et d’essence à la pompe, nous avons mis à contribution nos directions, notamment l’Agence Nigérienne de Normalisation, de Métrologie et de Certification sur le terrain pour vérifier le respect de l’arrêté qui a été pris portant réduction du prix du carburant à la pompe.
Et, en un temps record, ces services ont parcouru l’ensemble des stations d’essence sur notre territoire. Cela a un double sens. Il s’agit d’abord de voir si l’état des pompes est bon et aux normes, et de savoir si les prix sont respectés. D’ailleurs, le respect des mesures et des prix constituait des revendications, des souhaits des Nigériens, des attentes fortes. Mais, cela a été un casse-tête dans le passé pour toutes les autorités et je rappelle que, par rapport au ciment, certains pays amis du Niger nous ont approché pour nous demander comment on est parvenu à réduire le coût du ciment, parce qu’ils veulent aussi que ça soit instauré chez eux. Mais, jusqu’à cette date, en tout cas avec tous les échanges que nous avons eus avec nos homologues de ces pays, ces mesures-là ne sont pas prises parce que ce sont des mesures difficiles à prendre. Ça implique des coûts réels où l’État perçoit d’énormes recettes qu’il concède. Et, c’est le cas aussi des exonérations accordées aux unités industrielles que nous sommes en train de faire venir au Niger. Il faut que les gens voient à travers cela les énormes sacrifices consentis par l’État, parce qu’à travers ces investissements qui sont faits, c’est d’énormes recettes fiscales que l’État perd à travers ces exonérations.
Mais, à regarder à court et long termes, on ne perd pas parce que si nos ennemis internes et externes avaient trouvé en face d’eux un pays qui était solidement industrialisé, où tous les jeunes avaient des emplois, je vous assure qu’ils ne trouveront pas quelqu’un qu’ils vont envoyer dans le terrorisme, sauf si c’est leurs propres enfants qu’ils vont envoyer et je suis sûr qu’ils ne le feront pas. Voilà des questions sur lesquelles il faut attirer l’attention de tous les Nigériens pour qu’ils comprennent les efforts que le Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie consent pour améliorer le cadre de vie de tous les Nigériens. Ça fait effectivement douze ans que les Nigériens cherchaient à ce que cette mesure de diminution de prix intervienne, mais il a fallu l’arrivée du CNSP pour que ça soit une réalité. Donc, nous ne pouvons que nous en féliciter et encourager le Chef de l’État dans cette quête de souveraineté parce qu’aujourd’hui, à travers ces décisions, ce sont les Nigériens qui en tirent profit.
Monsieur le ministre, suite à l’embargo imposé par la CEDEAO à notre pays, de nombreux produits de consommation courante et des denrées alimentaires ont connu une hausse vertigineuse de prix. Qu’est-ce que votre département ministériel fait pour lutter contre la vie chère ?
Je m’en vais d’abord vous dire qu’il ne faut jamais oublier le contexte dans lequel nous nous trouvions et qui continue à l’être aujourd’hui du fait de l’embargo qui a été imposé. Face à cette situation, le Ministère du Commerce et de l’Industrie a d’abord procédé à une évaluation de ce dont nous disposons du point de vue alimentaire. Parce qu’il fallait d’abord commencer par là avant d’attaquer tout autre sujet. Et, après cet état de situation établi, nous avons délivré une vingtaine d’autorisations spéciales à des importateurs pour nous amener du riz, environ six cent mille (600.000) tonnes. Donc, cela étant, nous avons pensé que cette quantité pouvait suffire pour accompagner les Nigériens et au même moment, le Président du CNSP a décidé d’octroyer à la société Riz du Niger environ quatre milliards de francs CFA pour se procurer du riz paddy, le transformer et le mettre à la disposition de la population. Et, à travers cette opération, c’est environ plus de neuf mille (9 000) tonnes de riz blanc qui ont été transformées par le RINI et mises à la disposition de la population. Nous avons aussi installé une nouvelle usine de transformation du riz paddy à Gaya pour une capacité de dix mille (10 000) tonnes. Nous avons aussi installé sur l’ensemble du territoire national, dix-huit points de vente de riz du Niger et nous avons aussi envisagé de mettre en place au niveau de quatre régions du Niger notamment Diffa ; Magaria (Zinder), Madarounfa (Maradi) et Doutchi (Dosso) quatre nouvelles unités de transformation du riz paddy. Ça, c’est par rapport au volet transformation du riz parce qu’avec la grande irrigation, il va sans nul doute se préparer pour récupérer le riz paddy au lieu de laisser les producteurs à la merci des personnes véreuses, c’est-à-dire celles qui viennent tout acheter à des prix non rémunérateurs. D’ailleurs, je rappelle que, dans un pays parmi nos grands voisins, pas des moindres, à cause de l’insécurité qui sévit chez lui, la population dans la zone de production de cette céréale n’arrive pas à produire. Ils se rabattent au Niger pour acheter notre paddy. Mais si l’État prend le relai, c’est bien sûr dans une harmonie, c’est-à-dire à travers une fixation des prix par l’État pour acheter ces produits. Du côté de l’OPVN, nous avons acquis au titre de la réserve alimentaire stratégique plus de 163000 tonnes de céréales.
Nous avons aussi acquis 43 mille tonnes de céréales à travers des achats directs auprès des producteurs cette année et aussi nous avons acquis 120 mille tonnes de riz blanc dont nous avons fait des ventes à prix modéré sur l’ensemble du territoire. Ça, ce sont des éléments très illustratifs et vous avez dans le même cadre le pèlerinage. Aujourd’hui, les deux éditions que nous avons organisées ont été marquées par une diminution du prix du Hadj. Cette année, il y a une baisse de plus de 105 000 francs par rapport au prix de l’année dernière.
Par rapport aux deux structures dont je vous ai parlé, notamment le RINI et l’OPVN, il faut rappeler que le RINI est une société créée en 1965. Je dis bien en 1965 parce que c’est même la seule industrie qui a pu survivre environ 60 ans. Durant toutes ces années, c’est à travers des prêts bancaires que cette structure-là se procure les moyens de faire ses achats. Il a fallu, j’ai tenu à le préciser, en 2023 et en 2024 pour voir cette structure être appuyée par l’État avec un montant de quatre milliards. Et pourtant ,c’est une société d’État. Donc, c’est pour montrer, en fait, le regard que le Président du CNSP a sur le peuple nigérien et sur les biens appartenant à l’État, parce que ça lui tient à cœur. C’est par souci de faire fonctionner nos structures et de mettre à la disposition des Nigériens tout ce dont ils ont besoin, qu’il a pris cette décision d’accompagner cette structure-là. C’est un acte très patriotique.
Monsieur le ministre, on est à la veille du mois béni de Ramadan. Ousmane l’a souligné tout à l’heure, qu’est-ce que les populations peuvent espérer pendant cette période, puisqu’on a vu chaque année une hausse des prix ? Vous-même, en tant que ministre du Commerce, vous avez lancé un message en direction de ces commerçants pour faciliter cet événement aux populations. Qu’est-ce que cette année on peut espérer ?
C’est en fait une démarche que nous avons prise depuis quelques temps. Celle d’échanger directement avec les différentes parties concernées, parce-que nous nous sommes rendus compte, je l’ai dit tantôt, à travers certaines décisions prises, des tentatives des uns et des autres de ne pas respecter les mesures. Nous nous sommes dit que cette fois-ci, nous allons ouvrir des débats autour de cela. Ce qui nous a permis de rencontrer pratiquement tous les opérateurs économiques à travers leurs structures pour échanger et demander à chacun d’entre eux, de par les produits qu’ils disposent, de nous décliner exactement ce qu’ils pensent appliquer comme prix pendant ce mois béni de ramadan. Ceci étant, ils ont pris l’engagement effectivement de le faire. Et, avant d’être ici sur ce plateau, nous avons pratiquement eu l’essentiel des propositions, en tout cas celles des importateurs les plus importants de notre pays. Ils se sont engagés effectivement à accompagner l’État et les citoyens nigériens pendant et après cette période. Il faut bien préciser que notre combat, c’est aussi bien cette période que l’après. Je peux affirmer que, de par les différentes propositions que ces opérateurs économiques nous ont déclinées, nous n’assisterons pas à la surenchère comme par le passé.
Je pense que, par rapport aux prix des denrées, c’est toutes les parties prenantes que j’interpelle, parce-que je pense qu’à travers ce que l’État fait, il revient à tout le monde de se mettre dans le même panier pour avoir la même vision. C’est pour cela j’invite les uns et les autres, notamment les opérateurs économiques qui ont pris la décision d’accompagner l’Etat que, quand ils constatent des tentatives de vouloir tricher ou faire autre chose, qu’ils dénoncent. C’est effectivement leur devoir et leur obligation. Je profite de cette occasion pour rassurer les Nigériens que, sur l’ensemble du territoire, nous n’aurons pas des ruptures comme les années passées.
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