Le Cabinet du Médiateur de la République, en collaboration avec le ministère de la Promotion de la Femme et de la Protection de l’Enfant, et des partenaires intervenant dans le domaine de la protection de l’enfant, organise les 10 et 11 juin 2019 à Maradi, un forum sur l’élimination du mariage des enfants. Ce forum s’inscrit dans les activités de l’axe stratégique 4 du plan stratégique national pour mettre fin au mariage des enfants (2019 –2021) et il vise à renforcer le dialogue entre les acteurs locaux que sont les chefs traditionnels, les leaders religieux, et les organisations de la société civile, les acteurs étatiques et les intervenants non gouvernementaux dans le domaine de la lutte pour la fin du mariage des enfants. Il s’agit donc de renforcer la synergie d’actions entre ces différentes composantes pour agir efficacement dans l’élimination du mariage des enfants au Niger.
Ce forum servira de cadre pour discuter et analyser l’importance de la synergie et de la complémentarité entre les actions gouvernementales et celles des différents acteurs communautaires pour réduire le mariage des enfants au Niger. Il sera aussi question de partager et harmoniser les approches innovantes et concluantes à différents niveaux qui seront vulgarisées dans la lutte contre le mariage des enfants afin de combler les gaps, d’établir une feuille de route consensuelle pour les actions à entreprendre et les engagements de chaque partie prenante et de présenter au Médiateur de la République des lettres de doléances pour un plaidoyer à l’endroit de l’Etat du Niger et des PTF.
On rappelle que le Niger est partie prenante à la CDE et à la Charte Africaine des droits et du bien de l’enfant qu’il a ratifiée sans réserve. Le pays produit régulièrement les rapports aux organes de traités dont le dernier a été présenté en septembre 2018 au comité des droits de l’enfant de Genève. Ce comité a apprécié le rapport en constatant les progrès en matière de santé, nutrition et éducation, mais aussi a formulé d’importantes recommandations dont la plupart ont trait au volet protection de l’enfant. En effet, il a été constaté que les progrès sont timides et voire même insignifiants par rapport aux violences, abus et exploitation des enfants et certaines données montrent une stagnation telles celles relatives au mariage des enfants.
Sur ce plan le pays présente le plus haut taux de mariage des enfants au monde. Selon des statistiques fournies par l’UNICEF en 2016, une proportion de 75% des filles sont mariées avant leur dix-huitième anniversaire, 28% d’entre elles sont mêmes devenues des épouses avant 16 ans. Cette pratique est particulièrement ancrée dans les familles défavorisées issues de communautés rurales, souvent peu instruites et où les valeurs familiales traditionnelles sont très présentes. Cette prévalence est d’autant plus importante dans les territoires situés au sud du Niger, jusqu’à atteindre le nombre critique de 89% dans la région de Diffa (FNUAP 2012). Le mariage des enfants est à la fois un symptôme et une conséquence de la discrimination basée sur le genre favorisé par le patriarcat, l’insuffisance de l’offre de service tant au niveau de l’accès que de la qualité, en particulier pour l’éducation, et la pratique d’une justice traditionnelle orale. Parmi les causes couramment évoquées figurent les normes sociales qui cantonnent la femme à un rôle d’épouse et de mère dépendante d’un époux chef de famille d’une part ; et qui mettent fin précocement à l‘enfance des jeunes filles en les privant de la période de transition que représente l’adolescence avant l’entrée dans l’âge adulte d’autre part. Une approche intégrée impliquant les multiples parties prenantes et les ministères permettra d’accélérer le recul du mariage des enfants. Les interventions suggérées doivent favoriser le processus de changement des normes sociales tout en étant soutenues par des opportunités et alternatives qui contribueront à la création d’un environnement favorable dûment soutenu par des cadres institutionnels, des améliorations structurelles, une mobilisation communautaire et une législation efficace. Par conséquent, en 2014, le gouvernement du Niger s’est joint au mouvement de lutte contre le mariage des enfants initié par l’Union Africaine et a lancé sa campagne nationale en décembre de la même année. En août 2016, suite au bilan à mi-parcours qui a eu lieu à Lusaka, le ministère de la Promotion de la Femme et de la Protection de l’Enfant a mis en place un comité national de coordination pour promouvoir le mariage des filles après 18 ans, lequel comprend entre autres les ministères de l’éducation, de la santé, de la justice, de l’intérieur, des représentants des coalitions d’ONG nationales des droits de l’enfant et des droits de la femme, Save The Children, World Vision, Plan International, Care et Oxfam, UNFPA et UNICEF.
Oumarou Moussa(onep)
07/06/19