Monsieur le Directeur Général, veuillez nous faire une brève présentation de l’ONAHA.
Il est important d’abord de préciser que l’Office National des Aménagements Hydro-Agricoles (ONAHA), qui est doté d’un Conseil d’Administration, est un Etablissement Public à caractère Industriel et Commercial créé par l’Ordonnance 78-39 du 28 décembre 1978. Cette ordonnance faut-il le rappeler a été modifiée et complétée par l’ordonnance 001-2014 du 3 janvier 2014. Notons que l’ONAHA dispose d’un effectif de près de 300 personnes composé des agents permanents, des agents détachés et des contractuels. Le personnel opère à travers quatre directions qui sont la direction de Mise en valeur qui s’occupe de l’encadrement des aménagements hydroagricoles ; la direction des Infrastructures, du Matériel et de l’Atelier en charge de tout ce qui relève des travaux neufs et entretien, et du matériel humain ; la direction de Comptabilité-Finance ; et la direction qui s’occupe des Ressources Humaines. L’ONAHA est dotée de six directions régionales à l’exception de la région de Zinder. L’office comprend aussi des antennes, qui sont surtout créées dans les localités où il y a une concentration d’activités. C’est le cas de Konni, de Gaya, ainsi que Say, Kollo et Agadez qui est une antenne rattachée à la direction régionale de Tahoua. Parlant des principales missions de l’ONAHA, elles visent entre autres de contribuer à la réalisation, au développement et à la gestion durable des aménagements hydro-agricoles au Niger, d’assurer la fourniture de service à caractère industriel et commercial. Il s’est agi de permettre l’accomplissement des objectifs fixés par l’Etat. La mission de l’ONAHA consiste également de promouvoir et appuyer les groupements des filières agricoles du fait qu’il existe des filières qui sont très porteuses sur lesquelles l’ONAHA doit accompagner. Au nombre de ces filières au Niger, on peut citer la riziculture. Notre office couvre l’ensemble du pays.
A un certain moment, l’ONAHA était confronté à des difficultés comme le vieillissement de ses équipements ; la situation a-t-elle évolué ? Comment est la situation sociale au sein de l’office ?
Nous pouvons vous rassurer que la situation a beaucoup évolué. A cet effet, en 2011 quand nous sommes arrivés à l’ONAHA, le matériel est pratiquement hors d’usage. Nous ne disposons pas du matériel même pour constituer une seule brigade d’intervention pour assurer des travaux. En ce qui concerne les aménagements hydro-agricoles, les périmètres sont dégradés. Force est de reconnaitre que les nouvelles autorités ont rapidement pris des mesures pour apporter des solutions appropriées et permettre à l’office d’assurer ses missions régaliennes. Rappelons que le Président de la République a annoncé que la sécheresse ne doit pas rimer avec le manque de production. Il est à noter que l’accroissement de la productivité doit être de mise. L’ONAHA a, à cet effet, reçu de la part de l’Etat une première contribution sous forme de subvention d’une somme de près de trois (3) milliards de FCFA en vue d’acquérir du matériel en 2014. Ajoutons aussi qu’en 2017, le PGRCDU a mis à la disposition de l’office une somme de près de 3,5 milliards de FCFA au regard du travail abattu par l’ONAHA dans le cadre de la gestion des inondations sur l’ensemble du pays. Cet appui du PGRCDU a également permis à l’office d’acquérir du matériel comprenant des engins lourds, des camions et autres accessoires pour intervenir efficacement sur les aménagements. Retenons aussi que l’ONAHA a, sur fonds propres, acquis du matériel de plus d’un (1) milliard de FCFA. Tous ces matériels ont permis à l’ONAHA de constituer aujourd’hui cinq à six brigades pouvant intervenir simultanément sur l’ensemble du pays. Pour ce qui est de la réhabilitation des aménagements hydro-agricoles qui sont dégradés, l’Etat a déployé des efforts conséquents afin de mobiliser les partenaires techniques et financiers qui ont accepté de financer non seulement les travaux de réhabilitation de ces aménagements, mais aussi participer à la protection des périmètres contre les différentes inondations que notre pays a connues. La situation concernant les équipements de l’office s’est nettement améliorée au regard de ce que nous avons trouvé.
Sur le plan social, l’office rencontrait en 2011 d’énormes problèmes. Au nombre desquels les arriérés des salaires, et les agents ont perdu certains de leurs avantages. Après avoir mobilisé des ressources, nous avons répondu aux attentes du personnel en prenant en charge les arriérés et leur accorder même de nouveaux avantages. Depuis près de 5 ans, l’office envoie 2 à 3 personnes au hadj. Il faut également préciser que le salaire du personnel a été revu à la hausse ainsi que l’amélioration de certains avantages. Du point de vue social, il a été enregistré des avancées significatives ayant permis d’améliorer le cadre de vie et de travail des agents pour qu’ils puissent mieux accomplir leurs tâches.
Aujourd’hui, combien d’aménagements sont encadrés par l’ONAHA ?
Il faut d’abord rappeler que l’ONAHA à travers son inventaire en 2019 a relevé 99 aménagements qui sont sous sa responsabilité, dont 75 aménagements sont fonctionnels et mis en valeur en double campagnes à savoir les saisons sèche et hivernage. Pour les autres aménagements, ils sont mis aux arrêts en raison de l’insécurité comme dans la région de Diffa, tandis que d’autres sont dégradés en raison des inondations. Il y a également des aménagements qui sont totalement en réhabilitation grâce au partenariat avec les bailleurs de fonds. C’est pourquoi nous sommes contraints d’arrêter la production sur les aménagements en réhabilitation en attendant la fin des travaux. Nous pouvons assurer que le parc est assez satisfaisant pour mettre en valeur des aménagements. Cela nous a permis de mettre en valeur à titre illustratif près de 20.000 ha dans le domaine de la riziculture. La production du riz en 2019 a avoisiné les 110.000 tonnes, contrairement à 2010 où elle était autour de 50.000 et 70.000 tonnes.
Pendant la campagne d’hivernage passée, beaucoup d’aménagements ont été affectés par les inondations ; comment avez-vous géré cette situation et avec quels moyens ?
Au niveau de l’ONAHA nous avons acquis une certaine expertise en matière de gestion des inondations. Comme vous savez, déjà en 2013-2014, nous étions confrontés à une situation préoccupante d’inondations des aménagements hydro-agricoles au niveau entre autres du fleuve, de la komadougou Yobé ainsi que des aménagements intérieurs. L’ONAHA a intervenu pour apporter des solutions adéquates relativement à la sauvegarde des aménagements. S’agissant de l’année 2019, nous avons anticipé après avoir reçu des informations à travers notre service d’éveil faisant état d’éventuelles inondations. Nous avons intervenu sur un certain nombre d’aménagements en effectuant des travaux de rehaussement des digues, en colmatage des brèches. Si vous avez remarqué, toute l’inondation a été observée au niveau de la région de Niamey seulement. C’est surtout au niveau de Saguia aval que la digue avait cédé sinon, sur toutes les autres digues, nous avons promptement intervenu pour endiguer le phénomène. Ce qui nous a permis de sauvegarder l’essentiel des aménagements à l’exception des aménagements de Kirkissoye, Saguia amont et Saguia aval. Nous avons acquis une expertise humaine, mais aussi du matériel conséquent pour faire face à d’éventuelles situations. Grâce au travail remarquable que nous avons mené, les coopératives se trouvant le long du fleuve ont décerné un témoignage de satisfaction à l’ONAHA et à son directeur général pour avoir répondu de façon efficace afin de sauver leur production.
Dans le cadre de la politique de sécurité alimentaire, les autorités ont décidé de mettre l’accent sur l’irrigation ; quelle sera la place de l’ONAHA dans ce combat contre l’insécurité alimentaire ?
Les autorités actuelles ont mis l’accent sur cette question en développant des programmes et projets qui sont dédiés à la réalisation des ouvrages de mobilisation des eaux, des ouvrages pour la régularisation et la meilleure gestion de l’eau. A cet effet, l’ONAHA est un outil privilégié de l’Etat pour combattre l’insécurité alimentaire à travers les programmes et projets qui sont développés dans le cadre de l’irrigation. L’ONAHA intervient non seulement dans le cadre de la riziculture, mais également dans le cadre de polyculture, c’est-à-dire que toutes les cultures qui s’effectuent dans le pays peuvent se faire sur les aménagements. A l’intérieur du pays, nous avons des périmètres où la polyculture est très développée à travers la culture de maïs, de sorgho, de moringa, de l’ail, etc. Nous avons produit en 2019 pour ce qui est de la polyculture près de 50.227 tonnes, et plus de 110.000 tonnes pour le riz.
Quels sont les défis qui se posent aujourd’hui à l’ONAHA ?
Le premier défi est celui de l’augmentation de la production et de la productivité sur les aménagements hydro-agricoles. En effet, l’augmentation de la production est fonction de l’augmentation des superficies irriguées. Ainsi, il faut développer les superficies, multiplier les aménagements hydro-agricoles ; ensuite, il faut bien encadrer les aménagements qui sont réalisés et augmenter le rendement. C’est ainsi que dans le cadre de certains programmes, au niveau de l’ONAHA, nous avons évolué de 2010 à aujourd’hui en termes de rendement quand on regarde la courbe. Beaucoup de nos aménagements tournent aujourd’hui autour de 6 à 7 tonnes à l’hectare concernant la production du riz. Notre principal défi consiste de réussir à augmenter la production et la productivité de toutes les filières. L’autre défi important est celui qui vise à mobiliser des ressources en vue d’augmenter les superficies irriguées, augmenter le rendement, augmenter la production et mettre les populations à l’abri des besoins.
Quelles sont les perspectives ?
Les perspectives consistent de trouver les moyens pour garantir la sécurité alimentaire. Notons aussi que le Président a lancé le programme riz qui vise zéro importation en riz à l’horizon 2023. Il s’est agi d’ici cette période d’assurer la couverture des besoins en riz du pays. Pour atteindre cet objectif, il est nécessaire de mobiliser des ressources financières et permettre à nos populations d’avoir du riz compétitif vis-à-vis du riz importé. Le programme du Président de la République peut contribuer à garantir l’autosuffisance en riz et permettre au Niger d’exporter une partie de sa production. Nous sommes en train de voir sur l’ensemble du territoire les zones susceptibles de produire du riz. Après avoir élaboré la cartographie des différentes zones, nous allons ensuite voir les actions à mener comme l’approvisionnement en semences certifiées, les engrais, et l’encadrement des producteurs en attendant la réalisation de nouveaux aménagements hydro-agricoles. Le Niger doit s’investir afin d’éviter d’être approvisionné en riz à l’horizon 2025 par les autres pays de la CEDEAO. Dans le cadre de l’offensive « riz CEDEAO », tous les pays de la CEDEAO se sont fixés comme objectif en 2025 d’assurer l’autosuffisance en riz. Nous dirons qu’il y a la volonté, il faut s’atteler pour accompagner ce programme et atteindre l’objectif de zéro importation en 2023.
Le deuxième objectif, est la réalisation du contrat-plan. Nous avons signé un contrat-plan avec l’Etat du Niger qui stipule que chaque année, l’ONAHA doit réaliser 1.000 ha de nouvelles terres, 500 ha, et réaliser deux ouvrages de mobilisation des eaux. L’atteinte de cet objectif nécessite beaucoup de moyens. Le coût de la mise en œuvre de ce programme s’élève à 17 milliards par an et pendant quatre (4) ans. Ce sont ces deux objectifs majeurs qui sont inscrits dans la perspective. L’autosuffisance en riz est une question mondiale. Pour atteindre cet objectif, nous sommes en train de finaliser la Stratégie Nationale pour le Développement du Riz à travers le concours de la coalition africaine pour le développement du riz. Très bientôt, nous allons soumettre le document à l’appréciation du gouvernement pour qu’il soit validé. Et le programme du Président de la République va venir alimenter cette stratégie. Nous demandons aux uns et aux autres d’accompagner cette stratégie afin d’atteindre l’objectif 2023 notamment zéro importation en riz. Si nous réussissons à relever ce défi, nous allons permettre à notre pays d’économiser des devises assez conséquentes.
Rappelons aussi que dans le cadre du programme riz, nous avons initié un projet avec la coopération japonaise visant à appuyer l’ONAHA en matériel. A travers le calendrier qui a été élaboré, en fin 2020, l’ONAHA va être encore doté du matériel lourd qui lui permettra d’intervenir efficacement pour la réalisation des aménagements. C’est un coût total de près de 6 milliards de FCFA que la coopération japonaise va débloquer pour l’acquisition du matériel lourd, des camions ainsi que la remise en état de l’atelier de l’ONAHA, et la formation d’ici la fin 2020. Cela va aussi nous permettre d’avoir trois nouvelles brigades d’intervention.
Réalisé par Laouali Souleymane(onep)