La culture est aujourd’hui reconnue comme une ressource pour le développement urbain durable du fait de sa contribution à la durabilité économique, sociale et environnementale des villes. Aussi, la protection et la promotion des ressources matérielles et immatérielles du patrimoine culturel, des arts, des industries culturelles et créatives présentent des opportunités réelles pour les villes et en particulier dans les pays en développement. Ces opportunités constituent un atout clé pour l’amélioration du cadre de vie et du bien-être des populations, pour la sauvegarde du patrimoine urbain et la promotion du tourisme culturel, mais aussi la création des emplois tant dans le secteur formel qu’informel dans nos villes.
« Nous savons que lorsque les arts sont intégrés de façon judicieuse dans les lieux publics, ils contribuent à créer des espaces plus vivants, beaux et durables », explique Jason Schupbach, Directeur des programmes de design à l’U.S. National Endowment for the Arts (NEA).
Dans le contexte actuel, les villes en tant que territoires ou espaces vivants sont soumis à des changements continus qui concernent tous les éléments constitutifs de la ville, (naturels et humains, matériels et immatériels). Ces dernières années, les centres urbains subissent une forte pression liée à la mutation et aux nouveaux besoins au plan social, économique et urbain qui pourraient entraîner si on ne prend garde une fragmentation et une détérioration du patrimoine urbain avec des répercussions profondes sur les valeurs significatives des communautés. La rupture avec le passé est déjà perceptible dans certaines de nos villes, en occurrence Niamey.
Partie intégrante de la ville, le patrimoine urbain est constitué d’éléments matériels et immatériels à savoir, le patrimoine bâti et architectural, les paysages, les monuments, les lieux de mémoire, des faits marquants et les références historiques, mais aussi les pratiques culturelles et sociales, les traditions variées ainsi que les activités économiques et touristiques.
La ville de Niamey est un centre historique urbain qui porte encore les traces des paysages, des ensembles architecturaux, des espaces historiques et des lieux de mémoire, mais aussi d’autres témoins de l’histoire et de l’évolution civilisationnelle qui caractérisent le mode de vie et l’organisation des habitants.
Aujourd’hui, le patrimoine de Niamey est sans considération et se retrouve menacé de dégradation et de destruction continue en raison de la pression croissante liée à l’urbanisation, aux travaux de voirie et de modernisation de la ville qui ne prennent en compte nullement le concept « ville et patrimoine urbain », facteur de développement durable des centres urbains.
Il est important de rappeler ici que les différents programmes d’investissements prioritaires et de modernisation mis en œuvre par la ville de Niamey, n’ont pas véritablement pris en compte la culture comme une force motrice pour le développement urbain. Les résultats peu satisfaisants enregistrés jusqu’ici illustrent clairement cette analyse.
Face à une telle situation, certaines questions méritent être posées ?
– Comment conserver les traits distinctifs d’un tissu urbain hérité du passé sans faire obstacle au progrès des sociétés urbaines ?
– Comment promouvoir la création architecturale contemporaine sans bouleverser l’équilibre des centres historiques urbains ?
– Comment préserver la diversité sociale tout en renforçant l’attractivité et l’identité urbaine ?
– Comment soutenir la réalisation de l’inventaire des ressources matérielles et immatérielles de valeur significative des centres urbains, afin de les protéger et les mettre en valeur au profit de générations présentes et futures ?
Il est évident, la gestion urbaine d’une ville ou d’un centre urbain comme Niamey, doit être menée avec méthode et dans une approche participative pour mieux agir et apporter de réponse aux besoins essentiels des populations. Les caractéristiques des villes et leur contexte socioculturel et naturel sont des facteurs à prendre en compte intelligemment dans la gestion durable des villes qui font face aux exigences de l’urbanisation croissante et la nécessité de la sauvegarde des éléments représentatifs du patrimoine, vecteurs de l’identité urbaine.
A titre illustratif, on peut souligner que la restauration ou la réhabilitation des maisons traditionnelles et bâtiments dotés des motifs architecturaux remarquables, l’aménagement des rues et espaces historiques, la revitalisation des pratiques culturelles significatives ainsi que la consécration des personnalités et détenteurs des savoirs ayant marqué notre temps, sont des actions qui méritent d’être prioritairement soutenues.
Protéger, promouvoir et mettre en valeur les ressources patrimoniales, constitue un enjeu majeur, non seulement pour la qualité de vie de nos populations, mais aussi pour la stabilité sociale, l’économie urbaine, l’accès et la participation des populations à la vie culturelle dans nos villes.
Repenser la politique urbaine de la ville de Niamey en prenant en compte sérieusement la dimension du patrimoine dans les stratégies de développement urbain durable, mérite le soutien de tous les acteurs soucieux de faire de Niamey, une « ville en devenir » qui soutient la culture et la promotion des valeurs que prône le Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie (CNSP).
Dans cette dynamique, l’adoption d’un plan de protection et de gestion soutenue du patrimoine dans une approche participative, doit être une stratégie à mettre en œuvre nécessairement pour contribuer au développement urbain durable de la ville de Niamey.
Le présent article se veut aussi une invite à l’endroit de différents acteurs concernés afin de poursuivre la réflexion sur le rôle de la culture pour le développement urbain durable au Niger. ABRAHAM LINCOLN disait « nos vies commencent à se terminer le jour où nous devenons silencieux sur les choses qui comptent »
Par Danladi Adamou,
Consultant–Spécialiste en
Gestion du Patrimoine Culturel et des Musées
e-mail : adm_danladi@yahoo.fr