Le samedi 21 mai dernier, répondant à l’interpellation des députés, à l’Assemblée nationale, la ministre des Mines, Mme Ousseini Hadizatou Yacouba a rappelé que l’exploitation minière aurifère artisanale ou orpaillage a véritablement débuté au Niger en 1984 dans la région de Tillabéri (Koma Bangou), pour s’étendre en 2014 à Agadez (Air, Tafassasset et Djado) et en 2021 à Maradi (Dan Issa). Il s’agissait d’une activité saisonnière de subsistance qui s’est accentuée au fil du temps pour devenir aujourd’hui une activité principale. Cette exploitation a pris de l’ampleur notamment avec l’évolution des méthodes d’exploitation et de traitement (l’extraction par galeries, l’utilisation de machines, d’explosifs, de produits chimiques dont le cyanure et le mercure). Au regard de son impact négatif sur l’environnement et des problèmes de santé sécurité, elle constitue une véritable préoccupation que l’Etat tente de maîtriser. C’est ainsi que l’exploitation minière artisanale a été reformée en 2017 pour la faire évoluer vers une exploitation minière semi-industrielle, d’une part en introduisant deux autres types de titres miniers, à savoir l’exploitation minière semi-mécanisée et le traitement des haldes, terrils et résidus des mines et carrières et, d’autre part, en confiant sa gestion à une structure dédiée, en l’occurrence la Direction des Exploitations Minières à Petites Echelles et des Carrières (DEMPEC 2005 à 2020). «Malgré les réformes évoquées, ce sous-secteur reste confronté aux difficultés comme par exemple l’ouverture et l’exploitation anarchique des sites miniers artisanaux, l’insuffisance de contrôle des sites artisanaux, la dégradation accrue de l’environnement occasionnée par l’utilisation illégale et incontrôlée des produits chimiques dangereux et des substances explosives et l’abattage du patrimoine forestier par les exploitants miniers artisanaux etc. A cela s’ajoutent plusieurs autres risques et impacts supplémentaires constatés», a-t-elle expliqué. Mme Ousseini Hadizatou Yacouba a ensuite indiqué, que l’orpaillage au Niger est régi par des textes. Cependant, cet orpaillage présente d’innombrables inconvénients mais également des avantages économiques au pays, tout en suscitant des opinions et des débats contradictoires. La ministre des Mines a ainsi rappelé les dispositions de la Constitution de la 7ème République en ses articles 148 à 153, de la section 2, du titre 7 au sujet de la gestion des ressources minières. Elle souligne que la loi fondamentale affirme les principes et consacre le modèle national de gouvernance des ressources naturelles. La constitutionnalisation de la gestion des ressources minérales et l’élaboration du document de politique minière nationale 2020-2029 légifèrent le domaine. Selon elle; le code minier prévoit qu’un arrêté du ministre chargé des mines vienne préciser les méthodes, les procédés, mais aussi les équipements et les outils pouvant être utilisés dans une exploitation minière artisanale. Aussi, le code minier fixe-t-il une limite à la profondeur des excavations, interdit toute exploitation en galerie et dit que sont prohibés (sauf dérogation) l’abattage à l’explosif et le traitement par voie chimique des minerais. «L’exploitation artisanale s’applique aux indices de minéralisation de certaines substances dont l’exploitation sous la forme artisanale est traditionnelle ou aux gisements pour lesquels la preuve est faite qu’une exploitation à l’échelle industrielle n’est pas économiquement rentable», a-t-elle fait noter. Citant le dernier inventaire réalisé par les services techniques de son département ministériel en 2018, il a été recensé plus de deux cent (200) sites d’orpaillage répertoriés et plus de huit cent mille (800.000) personnes qui vivent de l’orpaillage à travers le pays. Cet inventaire, selon elle, avait concerné la région de Tillabéri (province métallo génique du Liptako), la région d’Agadez (avec Emzeguer, Air, Tafassasset, et Djado), la région de Maradi (province métallogénique du sud Maradi comprenant Maraka, Gabi, Madarounfa, Niellwa, Dan Issa), la région de Zinder (province de Damagaram Monio avec les sites de Zanourski, Kissambanat, Adoumtchi). «Je relève que de tous les sites ci-haut mentionnés, c’est uniquement ‘‘SAMIRA’’ dans le Liptako qui fait l’objet d’une exploitation industrielle avec la Société des Mines du Liptako (SML), qui avait une capacité de production de 3.000 kg par an. L’exploitation aujourd’hui perturbée par l’insécurité qui sévit encore dans la zone, conduisant à une baisse drastique de la production, à moins d’une tonne d’or par an», a-t-elle ajouté. S’agissant de la commercialisation de l’or issu de l’Exploitation Minière Artisanale et à Petite Echelle (EMAPE), la ministre dit qu’elle est confrontée aux problèmes de fausses déclarations et de fraudes entrainant l’évasion fiscale. La principale raison invoquée par les professionnels du métier est le poids de la fiscalité appliquée dans le domaine. Toutefois, les statistiques se sont améliorées depuis l’installation d’usines d’affinage d’or à Niamey, faisant passer la quantité d’or exportée de 6 tonnes en 2019, à 31 tonnes en 2020 et à 44 tonnes en 2021, en provenance des sites d’exploitation minière artisanale du Niger et des autres pays de la sous-région. La question relative aux recettes annuelles de l’Etat sur l’exploitation et la commercialisation de l’or au Niger résume toute la problématique des impacts socioéconomiques de l’orpaillage sur l’économie nationale parce qu’il n’existe pas de données fiables permettant une appréciation complète des impacts socio-économiques de l’orpaillage. Toutefois, l’État ainsi que les communes dans lesquelles les activités d’orpaillage sont effectuées, bénéficient de revenus au titre de la fiscalité sur l’activité d’orpaillage. 15% (quinze pourcent) des recettes minières sont concédés aux collectivités territoriales hébergeant les sites. En ce qui concerne les dispositions sociales préconisées par les textes en vigueur pour indemniser les blessés et les familles éplorées, la ministre des Mines dit que le code minier pose, en son article 121, le principe suivant à savoir : «Toute personne physique ou morale exécutant des travaux de recherche ou d’exploitation des substances minérales en vertu de la présente ordonnance est tenue de les exécuter selon les règles de l’art de façon à garantir la sécurité et l’hygiène des employés et des tiers». En effet, l’orpaillage étant un domaine où les activités sont menées très souvent dans l’informel, où les travailleurs ne sont ni déclarés et ne bénéficient d’aucune forme de sécurité sociale, «vous conviendriez avec moi qu’il serait difficile d’appliquer les dispositions citées ci haut en cas de survenance d’accidents ou des blessures. On ne peut que faire application des dispositions légales et règlementaires de droit commun», a-t-elle affirmé. Pour le site aurifère d’Agadez, «nous sommes en train de chercher des partenaires pour encadrer l’exploitation. Déjà, un milliard du fonds recherché est disponible», a conclu la ministre en charge des Mines. Si certains se montrent réjouis par la découverte de ces richesses dont regorge le sol du Kawar, d’autres se montrent gênés voire réfractaires. Car ces derniers craignent, qu’au lieu que cet or soit un eldorado voire une bénédiction, qu’il soit plutôt un enfer voire une malédiction.
Par Mahamadou Diallo(onep)