Connu pour sa gravité dans la plupart des cas, l’accident vasculaire cérébral ou AVC est l’interruption de la circulation sanguine dans une partie du cerveau, soit par une occlusion d’une artère appelée AVC ischémique, soit par une rupture d’une artère entrainant un épanchement sanguin dans le cerveau appelé AVC hémorragique. D’après le ministre de la santé publique, de la population et des affaires sociales, le Médecin colonel Major Garba Hakimi, qui s’exprimait à l’occasion de la journée mondiale de lutte contre les accidents vasculo-cérébraux AVC célébrée chaque 28 octobre, les AVC représentent plus de 80% des hospitalisations du service de neurologie de l’Hôpital Général de Référence de Niamey.
D’après les scientifiques, l’AVC est une pathologie qui est très fréquente. Après l’installation des symptômes, c’est environ deux (2) millions de cellules qui meurent dans le cerveau. Il s’agit d’un problème de santé publique à travers le monde. En effet, l’OMS parle d’une pandémie parce qu’elle prévoit d’ici 2030, environ 23 millions de cas d’AVC à travers le monde. « 2030 c’est dans 7 ans, et en plus de la fréquence, l’AVC est grave, parce que c’est la première cause d’handicap moteur chez les adultes et la deuxième cause de mortalité dans le monde. Il tue plus que le paludisme, plus que la tuberculose et plus que le sida », explique le Neurologue Vasculaire Zakaria Mamadou, chef de service neurologie à l’Hôpital Général de Référence de Niamey.
Les facteurs de risques
Les facteurs de risques permettent d’identifier des patients à risque de développer un AVC. Ils sont divisés en facteurs non modifiables, c’est-à-dire des facteurs sur lesquels les médecins ne peuvent pas agir, et des facteurs modifiables qui sont les facteurs sur lesquels les médecins peuvent agir. Ainsi, les facteurs non modifiables de l’AVC surviennent surtout chez les personnes après l’âge de 55 ans. « Toute personne peut avoir un AVC. Même un enfant qui vient de naitre peut-être victime d’un AVC», souligne le Neurologue Zakaria Mamadou.
En outre, l’AVC est plus fréquent chez les hommes, chez les personnes de race noire et également chez toute personne qui dans sa famille a eu un de ses parents qui a été victime d’un AVC avant l’âge de 55 ans. Le Neurologue, Dr. Zakaria Mamadou, explique par ailleurs que parmi les facteurs modifiables on peut retenir l’hypertension artérielle et le diabète qui sont des facteurs puissants qui peuvent conduire à l’AVC. Toutefois, Dr. Zakaria a ajouté que parmi les risques d’AVC on peut noter les troubles du cholestérol, les stupéfiants, la sédentarité et les facteurs comportementaux. « Le fait de fumer le tabac et de boire l’alcool multiplient le risque de développer un AVC », a-t-il expliqué. Aussi, la ménopause et le dosage des pilules de contraception que les femmes prennent pour ne pas tomber enceinte sont autant de facteurs de risque d’AVC.
Les signes qui alertent et la prise en charge
Selon le Neurologue Vasculaire Dr. Zakaria, les signes de l’AVC s’installent de manière brutale, d’où son nom Accident Vasculaire Cérébral. Il y a par exemple une paralysie du visage, la bouche qui va dévier d’un côté. « Il y a aussi ce qu’on appelle les troubles de langage, l’aphasie : la personne ne comprend plus ce qu’on dit et n’arrive plus à s’exprimer, elle ne comprend pas ce que les gens disent, elle est confuse », a-t-il indiqué. Aussi, la paralysie d’un coté de manière brutale appelée l’hémiplégie et la cécité brutale c’est-à-dire une perte de la vision d’un seul œil sont des signes qui montrent que la personne a fait un AVC.
La prise en charge doit se faire de façon urgente et rapide d’où le terme anglo-saxon ‘’Time is brain’’, c’est-à-dire ‘’le temps c’est du cerveau’’. Plus on perd du temps plus on perd une partie du cerveau. « Chaque minute après l’AVC, il y a deux (2) millions de neurones qui meurent dans le cerveau. C’est pourquoi, dès qu’il y a ces signes il faut alerter et amener le patient dans un hôpital national. Il ne faut pas passer dans les CSI ou les cliniques privées mais plutôt passer dans un hôpital national du pays où la prise en charge peut être faite rapidement », a souligné le neurologue vasculaire.
Cette prise en charge dépend du type d’AVC. Dans les AVC Ischémique, la prise en charge est une urgence absolue parce qu’il faut prendre les patients en charge dès les premières minutes du début des symptômes jusqu’à 4h 30 mn. Par exemple pour quelqu’un qui présente son déficit à 16h, il faut après 20h30 mn pour le prendre en charge et utiliser un procédé qu’on appelle la thrombolyse. « La thrombolyse consiste à injecter un produit qui permet de dissoudre le caillot de sang qui a bouché l’artère dans le cerveau et cela ne peut être fait que dans ces 4h 30 mn, après ça on ne peut rien faire », a expliqué Zakaria.
Le deuxième traitement d’un AVC ischémique est récent. Il consiste à aller chercher le caillot de sang à travers des petits tuyaux. Parfois, il est possible de combiner ces deux traitements.
Quels sont les progrès réalisés au Niger ?
Selon le spécialiste Zakaria, le Niger a, depuis deux ans, enregistré des progrès dans la prise en charge des AVC. En effet, avant cette date il n’y avait pas de projet spécifique pour l’AVC. C’était une prise en charge qui se faisait juste parce qu’on ne peut pas mettre les traitements qu’il faut dans les temps qu’il faut. Néanmoins, depuis la création d’un projet qu’on a instauré à Niamey appelé ‘’Projet de création des unités neuro-vasculaire’’, il y a eu l’installation d’une unité neuro vasculaire à l’Hôpital Général de Référence de Niamey qui est composée de deux compartiments. « Il y a une unité de soins intensifs neuro vasculaire ou le patient même s’il a fait son AVC il y a 1 minute est pris en charge. On a également formé plus de 100 agents de santé dans la prise en charge de l’AVC. Tous les médecins des urgences de l’Hôpital Général de Référence, des hôpitaux Nationaux de Niamey, des neurologues et des infirmiers ont été formés dans la prise en charge de l’AVC », a-t-il notifié. Grâce à ce projet financé par l’Etat du Niger, l’Hôpital de Référence de Niamey a pu mettre à la disposition des Nigériens des médicaments du traitement de l’AVC même si, il faut le noter, la thrombolyse coûte relativement chère.
Dans son message adressé à l’occasion de la journée mondiale de lutte contre les accidents vasculo-cérébraux (AVC), le ministre de la Santé publique, de la Population et des Affaires Sociales, le Médecin Colonel Major Garba Hakimi a indiqué que l’Etat s’engage à renforcer le plateau technique de l’Unité des soins intensifs neuro-vasculaires et à créer d’autres services similaires à l’intérieur du pays afin d’améliorer l’accès et la qualité des soins aux personnes victimes d’AVC. Le Neurologue Vasculaire a quant à lui, lancé un appel à l’endroit de l’Etat pour continuer à œuvrer dans ce sens tout en aidant les services à disposer des produits pour le traitement de l’AVC à Niamey et dans toutes les régions et à des prix abordables afin que tout nigérien puisse s’offrir ces produits.
Des conseils du Neurologue afin de prévenir les AVC
Un certain nombre de reflexes doivent être observer dans le cadre de la prévention primaire de l’AVC. Il s’agit notamment de contrôler l’hypertension artérielle, d’où l’intérêt d’aller chaque 3 mois contrôler sa tension auprès d’un médecin ou d’un pharmacien. En effet, on constate que la majorité des Nigériens ne savent pas qu’ils sont hypertendus. C’est quand ils vont développer des complications de l’hypertension qu’ils vont se rendre compte qu’ils sont hypertendus, d’où l’intérêt de se faire diagnostiquer tous les 3 mois. Le second élément, c’est de faire le bilan du cholestérol. Dr Zakaria recommande aussi la pratique régulière du sport. « Le sport doit être inclus dans la vie de tout un chacun. Avoir au moins 30 minutes de sport par jour au moins 3 fois par semaine. Si on arrive à faire ça, on diminue de façon drastique le risque de faire un AVC », précise-t-il.
Aussi, il est important d’arrêter de fumer, de boire de l’alcool et de consommer des stupéfiants. En outre, il est recommandé de manger de façon équilibrée. « Parce que quand on mange du n’importe quoi, on peut avoir beaucoup de problèmes de santé. Les Nigériens mangent beaucoup de viande ; tout est viande, tout est graisse. Or, qui dit viande, dit graisse et qui dit graisse dit cholestérol », relève le neurologue. En définitive, pour protéger l’organisme, le cœur et les artères, il est conseillé de manger au minimum 5 fruits et légumes par jour.
Témoignage
Hadiza Seydou est une jeune fille âgée de 20 ans. Elle raconte la triste histoire qu’elle a vécue en décembre 2022 en voyant sa mère partir à jamais de suite d’un AVC. « Ma mère était hypertendue et se plaignait de maux de tête durant toute la semaine avant son décès. On l’a amenée à la clinique où on a remarqué que sa tension était montée jusqu’à 15. Elle prenait ses traitements mais son état s’empirait du jour au lendemain jusqu’au jour ou d’un coup, elle était tombée et ne bougeait plus, ne parlait plus. Elle était tombée dans le coma des suites d’un AVC pendant plusieurs heures et ne s’est plus jamais réveillée », a-t-elle expliqué.
Salima Hamadou Mounkaila (ONEP)