«C’est ma mère qui m’a initiée au maraîchage . Elle était une grande productrice de l’oignon blanc, une variété de Gothèye. Elle n’est plus de ce monde. Quand j’avais commencé à m’intéresser au maraîchage, à peine, je m’en sortais. Dès que j’ai intégré le groupe, j’ai suivi des formations qui m’ont permis d’acquérir des techniques de conduite de cultures maraîchères. J’entretiens actuellement plus de 2 hectares dans mon propre jardin. J’aide aussi les autres femmes travaillant dans le jardin de l’Union pour entretenir leurs «plats» d’oignon, de la salade et de la tomate», a confié Mme Moumaye Salou du groupement Wafakaye, mot qui signifie en langue locale ‘’l’union’’.
Avant l’intervention des projets de développement dans le département, le groupement Wafakaye de Gothèye, créé depuis 2008 et avec ses 40 femmes actives, faisait face à de nombreuses difficultés notamment la maîtrise des nouvelles techniques culturales. Les productrices manquaient aussi de moyens matériels pour porter leurs activités sur une plus grande échelle. Mais grâce aux soutiens multiformes des partenaires tels que le PDIT, le Prodex, le PROMAP, Vision Mondiale, etc., ces braves femmes sont maintenant autonomes grâce à la culture des légumes à savoir, l’oignon blanc, la tomate, la salade et d’autres plantes potagères très consommées au Niger.
Les activités au niveau du site maraîcher s’étendent sur une période de cinq à six mois. Certaines femmes suspendent en saison pluvieuse pour s’adonner aux activités champêtres mais d’autres poursuivent le travail sans interruption. Dans l’organisation du groupement, chaque membre donne une souscription de 100 F CFA tous les mercredis servant à alimenter la caisse. La somme ainsi réunies sert à la solidarité entre les membres du groupement. « Lorsqu’un membre du groupe a un problème, nous lui venons en aide. Si la personne a un mariage, elle prend un prêt de deux cent à trois cent mille de FCFA dans la caisse pour satisfaire ses besoins », explique, Aissatou Mamarou, Secrétaire générale du groupement assise au milieu d’une foule de femmes au domicile de la présidente du groupement.
Mariama Souley, une dame dont la quarantaine a déjà sonné, confie n’avoir plus de problème avec son mari depuis qu’elle est devenue financièrement autonome grâce au travail du maraîchage. «Vous savez dans notre zone quand les enfants se marient, ce sont les femmes qui se décarcassent pour les meubles de la chambre de la jeune fille. J’appuie mon mari dans plusieurs domaines, je ne lui demande plus de l’argent comme avant. J’assure beaucoup de dépenses dans le foyer. Je paie même les fournitures scolaires de nos enfants et les frais de scolarité d’une de mes filles qui étudie dans une école de santé», a-t-elle dit avant d’évoquer un autre avantage de cette activité. «En période de la salade et de la tomate, il suffit que je me rende dans mon jardin et je trouve de quoi préparer un déjeuner pour toute la famille. Je n’ai plus de soucis pour bien manger », ajoute-t-elle, exprimant ainsi sa satisfaction.
La Secrétaire générale du groupement, une vielle femme de 62 ans et mère de 4 enfants, totalise 12 ans dans ce travail. Aissatou Mamarou exploite un petit lopin de terre hérité de sa mère qui l’exploitait depuis 1954 avec la culture de l’oignon blanc.
«Je cultive ici, de la tomate, du choux, de la salade, de l’oignon et un peu de la patate douce. Mais la principale culture est l’oignon blanc et celui de Galmi dont actuellement je dispose de plus de 300 planches. Chaque planche peut m’apporter de 12.500 à 25.000 FCFA. En ce qui concerne la salade, je suis la plus grande productrice de la ville de Gothèye», confie-t-elle avec fierté. Cette vaillante femme est également transformatrice de l’oignon blanc en bouillon naturel appelé (Gabou). Ce bouillon se prépare avec un mélange d’ingrédients comme le sel de cuisine, l’arachide, le sésame et tous les dérivés de l’oignon blanc séché. Le produit est très prisé pour son rôle aromatique dans la sauce.
La préparation d’un sac de ‘’Gabou’’ peut durer une journée entière. «Avec ce produit, nous pouvons dire que rien ne se perd dans l’oignon. Les feuilles d’oignon sont séchées et les bulbes fraiches ou sèches sont prisées. Ce commerce apporte beaucoup de bénéfices aux femmes courageuses de Gothèye», a-t-elle précisé.
En ce qui concerne la participation aux grandes foires nationales, les femmes du groupement Wafakaye se glorifient de leur produit ‘’Gabou’’, dérivé de l’oignon blanc de Gothèye. «Le travail de maraîchage et la fabrication du bouillon naturel de Gothèye est ma principale activité depuis plus de 40 ans. Aujourd’hui, je suis vieille, mais je garde le courage d’encadrer les jeunes femmes qui s’adonnent à la pratique pour leur autonomisation. Une femme ne doit pas attendre tout de son mari, elle doit travailler afin d’être autonome. Seul le travail valorise l’homme et la femme. Donc, j’encourage mes sœurs, filles et petites filles de prendre leur courage, de ne pas rester à la maison et de prendre le chemin des jardins. Au bout de quelques semaines, elles constateront un grand changement dans leur vie quotidienne. Cela va nous permettre de combattre la pauvreté à la racine», conseille, Hadjia Salaye Saidou, présidente du groupement Wafakaye de Gothèye.
Seini Seydou Zakaria, Envoyé spécial(onep)