Depuis quelques temps, les nigériens entendent parler de Gonis dans tel ministère et dans tel autre. Ce langage qui n’est pas très très familier dans l’administration nigérienne a amené le Sahel Dimanche a donné la parole à M. Amadou Saley Oumarou, Haut-Commissaire à la Modernisation de l’Etat dont l’institution travaille dans ce cadre. Il a expliqué ce qu’est le prix Goni, les raisons de son institution et les objectifs poursuivis. Le Haut-Commissaire à la Modernisation de l’Etat a également levé le voile sur leur chantier relatif à la mise en œuvre du plan de réponses aux comportements non observant dans certaines administrations pilotes.
M. le Haut-Commissaire, depuis quelques temps, votre institution travaille aux côtés de certains ministères pour trouver au sein de ces structures le meilleur manager de l’année que vous appellerez, GONI. C’est qui exactement ces GONIs que vous cherchez?
Permettez-moi avant tout de vous exprimer ma profonde gratitude et mes sincères remerciements pour cette opportunité que vous m’offrez pour entretenir les citoyens nigériens sur les diverses actions menées ou envisagées par notre institution le Haut-Commissariat à la Modernisation de l’Etat.
Le Prix GONI, « Champion » est institué et organisé en partenariat avec le Ministère de la Fonction Publique et de la Réforme Administrative pour contribuer à la culture de l’excellence dans notre pays par la célébration des meilleurs Managers dans notre administration Publique. Les « GONIS » sont des managers qui se distinguent par leurs talents managériaux dans l’animation, la motivation et l’implication de leurs collaborateurs dans l’atteinte des résultats de leur institution.
Un proverbe arabe nous rappelle que «la différence entre un jardin et un désert ce n’est pas l’eau mais l’être humain ». Ainsi à terme notre objectif consiste à amener les directeurs généraux et centraux de nos Institutions à faire de leurs agents de véritables collaborateurs, qui ont de l’initiative et des capacités opérationnelles avérées au service du développement économique et social du Niger.
Nous organisons le prix goni conjointement avec le prix nigérien de l’innovation du service public ou HIKIMA en vue de décerner un prix d’excellence dans les secteurs publics et para publics. Ce prix vise à récompenser l’administration publique ou para publique ayant innové dans la délivrance de services publics. Il est constitué d’un trophée et d’un appui financier de 3 500 000 F pour faire la promotion de l’innovation primée.
Comment se fera leur choix quant on sait que dans l’administration publique d’une manière générale, les vrais GONIS sont parfois dans l’ombre. Ce sont des agents qui travaillent dur pour remettre à d’autres ‘’GONIS?
Les futurs GONIS seront désignés à la suite d’une évaluation 360 degrés. Les supérieurs hiérarchiques, les collègues, les collaborateurs sous ordres et les partenaires externes sont mis à contribution pour assurer davantage d’objectivité et la transparence dans cette évaluation. La conduite du processus évaluatif est confiée à un cabinet indépendant de GRH. Les conclusions du cabinet sont par la suite soumises à l’appréciation d’un jury de neuf membres habilité et compétent pour valider les résultats. Les résultats définitifs seront proclamés par la Ministre de la Fonction Publique et de la Réforme Administrative. Les nominés auront l’honneur et le privilège d’être reçus et félicités par SE Monsieur le Premier Ministre, Chef du Gouvernement.
Afin de maintenir sa position de source d’inspiration en particulier pour les jeunes cadres, le lauréat du prix « GONI » doit perpétuellement améliorer ses qualités. Il a la responsabilité morale de contribuer à la culture de l’excellence au Niger par l’exemplarité au vu de la distinction qu’il devra honorer.
Pourquoi depuis des années que l’administration nigérienne fonctionne ainsi, c’est seulement maintenant qu’on cherche à désigner des GONIS?
« Mieux vaut tard que jamais » a-t-on coutume de dire. La première édition du prix a eu lieu en 2017 et a concerné les ministères en charge de l’éducation. Il n’a été possible pour diverses raisons, dont entre autres la pandémie de la Covid 19 d’organiser la seconde édition qu’en 2022.
En plus notre Institution est essentiellement compétente dans la conception et le suivi.
Ainsi notre souhait est de stimuler les autres institutions à nous emboiter le pas. En adhérant à l’initiative, elles trouveront les moyens d’organiser à leur niveau des prix d’excellence. Elles désigneront ainsi leurs Gonis, en magnifiant le meilleur employé du mois, du trimestre ou de l’année.
Sur tout un autre plan, il faut dire aussi que le besoin d’évaluer les performances est devenu plus que réel dans le contexte actuel de passage de notre pays dans l’approche programme. Notre administration doit s’adapter à cette approche de gestion basée sur les résultats où l’Etat doit reconnaître et encourager le mérite. C’est d’ailleurs pour cette raison que le Ministère de la Fonction Publique et de la Réforme administrative œuvre pour la révision du système d’évaluation de la performance des agents de l’Etat. C’est aussi pour cette même raison que le Niger s’est doté d’une Politique Nationale de l’Evaluation (PNE) afin de pouvoir apprécier régulièrement les performances des porteurs des programmes globaux et sectoriels dans l’atteinte des objectifs de développement en termes de produits, d’effets et d’impacts sur la base des données probantes.
Que pouvez-vous nous dire sur votre chantier relatif à la mise en œuvre du plan de réponses aux comportements non observant dans certaines administrations pilotes ?
Les multiples réformes mises en œuvre dans le cadre des programmes d’ajustement structurels ont engendré une dégradation des
comportements de bon nombre des fonctionnaires. Les valeurs de progrès se sont gravement érodées et laissent progressivement se développer des contrevaleurs préjudiciables à la culture de la performance et des résultats.
Ainsi tirant les leçons des expériences passées, notre institution le Haut-Commissariat à la Modernisation de l’Etat (HCME), avec l’appui de la Coopération Suisse, à la suite des conclusions de l’étude réalisée par le LASDEL sur la «routine des comportements non observant au sein des services publics au Niger» a dans une démarche inclusive élaboré une stratégie de réponses devant permettre de renouer avec les bonnes pratiques.
La première phase de cette expérience de mise en œuvre du plan de réponses appuyée financièrement par le PAGOD de la coopération Suisse, a porté sur une dizaine d’outils et a concerné aussi bien des structures centrales que des structures déconcentrées et décentralisées. Il s’agit de la Direction Générale des Affaires Sociales du Ministère de la Santé Publique, du Tribunal de Grande Instance Hors classe de Niamey, du Tribunal de grande Instance de Dosso, de la Direction Régionale de l’Aménagement du Territoire de Dosso, de la Direction Régionale de l’Hydraulique et la Direction Régionale de la Santé de Maradi et des communes de Malbaza, Mayahi, Gaya et Gothèye. Elle a permis de renforcer les capacités et d’implémenter des outils de suivi et d’amélioration des performances dans les administrations pilotes retenues. Cette expérience se poursuivra également en 2022.
Où en êtes-vous avec la mise en œuvre du Projet d’Appui à la Modernisation de l’Etat pour un Service Public de Qualité sur le Territoire (AMESP) appuyé par l’AFD ?
La mise en œuvre de ce projet se poursuit normalement malgré le contexte sécuritaire difficile qui caractérise ses zones d’intervention. Hier seulement nous avons procédé au lancement des activités du Service Public Ambulant et à la pose de la première pierre marquant symboliquement le démarrage des constructions des blocs administratifs dans les préfectures des zones d’intervention du Projet AMESP. Ce lancement était longtemps attendu tant par les plus hautes autorités de notre pays à savoir SE Monsieur le Président de la République et le Premier Ministre chef du gouvernement, que les populations des zones d’intervention du Projet d’Appui à la Modernisation de l’Etat pour un Service Public de qualité sur le territoire (Projet AMESP). A savoir : Région de Diffa : N’Gourti, Bosso, Goudoumaria, Toumour, Kabléwa et N’Guelbéli ; Région de Tillabéri : Abala, Balleyara, Banibangou, Bankilaré Gothèye, Torodi, Tondikwindi et Inatès ; Région de Tahoua : Tassara.
Il faut rappeler que le projet AMESP est financé par la Coopération française à travers l’Agence Française de Développement (AFD) et porte sur la construction de dix (10) blocs administratifs intégrant l’administration
préfectorale et des services techniques déconcentrés de l’Etat ainsi que l’approfondissement du dispositif des Services Publics Ambulants dans onze (11) communes de ces 03 régions.
L’offre du projet ne consiste pas seulement à construire et à équiper des blocs administratifs flambants neufs, mais à accompagner les départements concernés à passer progressivement d’une administration de commandement à une administration de développement.
Aussi l’approfondissement du dispositif SPA dans onze (11) communes concernées doit être vu et compris comme une administration itinérante de l’Etat faisant du véhicule, le bureau d’accueil et d’écoute des populations dans leurs lieux de résidence en vue d’une délivrance de services publics de qualité et répondant à leurs besoins réels et en temps réels !
« Si un peuple se réveille le matin et sent la présence de l’Etat à ses côtés, c’est que l’Etat déconcentré et décentralisé est en marche ».
C’est pourquoi aussi le HCME, avec l’appui de ses partenaires notamment la Coopération française, la Coopération Allemande et la coopération Suisse a mis en place des services d’archivage modernes dans une quinzaine de collectivités territoriales (communes et Régions) pour répondre d’une part aux droits des usagers, d’accéder et de transmettre l’information publique et d’autre part afin de matérialiser et conserver la preuve pour l’administration communale. Ce processus se poursuivra également cette année et dans les années à venir en vie de capitaliser et de vulgariser les acquis.
je profite de votre tribune pour réitérer mes remerciements à Sahel Dimanche et exprimer notre profonde gratitude à l’Agence Française de Développement, à l’Union Européenne, la Coopération suisse, à l’UNICEF, à la Coopération Allemande (GIZ), à la coopération Belge (ENABEL), à l’USAID et à Twende MBELE de la République Sud-Africaine pour leurs accompagnements multiformes.
Aussi j’apprécie à sa juste valeur les soutiens apportés à nos initiatives de réformes par les plus hautes autorités de notre pays qui ont accordé un intérêt particulier à nos idées novatrices et ont perçu l’importance des effets et impacts escomptés de nos actions sur le territoire. Ce que nous faisons est parfaitement cohérent avec leurs préoccupations permanentes d’améliorer les conditions de vie des laborieuses populations des zones reculées dans une approche inclusive contenues dans le programme de Renaissance acte 3 et la déclaration de Politique Générale du Gouvernement.
Par Fatouma Idé(onep)