En mission au Niger à la tête d’une délégation de parlementaires français, membres du groupe d’amitié parlementaire France-Niger, le député français Jacques Maire a bien voulu nous accorder un entretien sur la coopération parlementaire entre le France et le Niger ainsi que les questions de sécurité dans la zone des trois frontières. Dans l’interview qui suit, le président du groupe d’amitié parlementaire France-Niger, nous parle de l’importance de maintenir une approche cohérente à l’échelle de la région pour combattre le terrorisme.
Monsieur le président du groupe d’amitié parlementaire France-Niger pouvez-vous, nous parler de la coopération bilatérale et parlementaire entre le France et le Niger ?
Vous savez, la relation entre le Niger est la France est extrêmement forte et excellente. Mais le contexte régional est très difficile. Ce qui est important, nous avons une analyse commune avec nos amis nigériens sur la lutte contre le terrorisme, les défis de sécurité, l’importance de garder une approche cohérente à l’échelle de la région. Cette dernière est là avec une très bonne articulation entre les forces armées nigériennes et françaises. Nous l’avons aussi en matière de développement. Il n’y a jamais eu autant d’actions de projets développés sur le territoire nigérien qu’en ce moment, malgré les conditions de financement difficiles. Il faut aujourd’hui se réinventer dans la coopération pour être présent sur les territoires qui sont parfois dans l’insécurité.
Notre coopération parlementaire date de très longtemps, mais elle a été très fortement renouvelée depuis notre élection en 2017. Nous avons souhaité intensifier les échanges. Durant les trois dernières années, nous avions eu un vide à cause de la covid-19 et un autre changement très important des députés nigériens avec les élections passées au Niger. Le Président de l’Assemblée nationale, M. Seini Oumarou, le président du groupe d’amitié parlementaire Niger-France, M. Kalla Ankouraou, et nous les députés français, nous avons vraiment souhaité relancer les groupes parlementaires d’amitié des deux pays. Notre arrivée au Niger est très importante en ces moments de fausses rumeurs et mauvaises interprétations florissantes partout. Nous avons montré que les députés de la majorité et de l’opposition peuvent s’entendre pour montrer qu’ils ne sont pas victimes de désinformation et qu’ils puissent aller ensemble expliquer ce que nous faisons aux populations pour le développement du pays. Par exemple notre visite à Maradi nous a conduite à Maradi pour voir les financements français à l’aide au développement. Nous allons rendre compte à l’Agence Française de Développement ce que nous avons vu et ce qu’il faut faire à l’avenir pour améliorer le bien-être de la population.
Vous avez effectué des visites de terrains à Niamey par exemple à la base militaire de la force Barkhane qui intervient dans la zone des trois frontières, quelle remarque avez-vous faites à l’issue de la visite guidée, notamment à la coopération militaire ?
Nous avons marqué des points importants ces derniers mois dans l’antiterrorisme avec par exemple la capacité d’éliminer un grand nombre des éléments de l’État Islamique dans le Grand Sahara (EIGS) qui a été vraiment efficace. Tout de même l’insécurité continue, elle est insaisissable, mais nous pensons qu’il y a absolument des solutions qu’il faut éviter
On sait très bien que le problème de sécurité du Niger, ont leur origine notamment dans la zone de trois frontières.
Actuellement, la France ne peut pas du tout sortir du Sahel ; elle ne remet pas en cause Barkhane. Elle souhaite simplement une articulation encore plus forte avec les forces de sécurité locales pour que les populations comprennent qui fait quoi. Par exemple, je peux me résumer, les forces de sécurité du Niger sont en charge de l’ordre public et les forces internationales sont en lien avec l’armée nationale pour combattre le terrorisme international. Partout où, nous avons de la police, au Niger, l’Etat fonctionne et Barkhane n’a absolument pas vocation à être présent au Niger. La sécurité du Niger doit être l’affaire des Nigériens. Je suis d’accord à ce qu’a dit le Président Bazoum. En revanche, là où des actions sont menées par les terroristes de façon massive contre les forces de sécurité et là où, l’Etat n’est pas présent, en ce moment-là, Barkhane peut extrêmement être importante. L’armée nigérienne est plus efficace que quelques années, elle est mieux équipée avec plus de capacité d’action, même si la sécurité est un énorme problème notamment dans la région de Tillabéri. Mais quelque chose est claire, les forces nigériennes sont à l’origine des renseignements qui peuvent indiquer où sont les terroristes. Mais il leur manque de couverture aérienne, la capacité d’envoyer des frappes rapidement à une distance éloignée que la France peut apporter c’est ce qu’elle fait. De même la capacité pour les nigériens de voir leur armée plus efficace, plus entrainer et plus capable par exemple de coopérer sur un mode rapide avec les forces françaises prend du temps. Quand les députés nigériens sont venus avec nous à Barkhane, nous avons découvert qu’avec quelques avions et drones, les partenaires internationaux ne peuvent rien s’il n’y a pas les renseignements. Ces renseignements qui viennent des forces de sécurité nigériennes sont la clé du succès.
Vous aviez lancé en 2018 le comité interparlementaire G5 Sahel qui regroupe, les cinq pays parlementaires sahéliens travaillant depuis sa création dans une dynamique de contrôle de partenariat international dans la zone. En quoi, ce comité interparlementaire constitue un vrai élément de contrôle de l’efficacité de l’aide militaire et civile pour les populations ?
Nous avons lancé le Comité Interparlementaire G5 Sahel. L’idée est très simple, c’est de faire en sorte que les députés Sahéliens comme ceux de la France puissent contrôler l’activité des forces de sécurité internationales et les bailleurs de fonds. Aujourd’hui, la question de partenariats internationaux qu’il soit MINUSMA ou autres, c’est plutôt l’affaire de l’exécutif, mais les populations comprennent mal. Nous avons l’impression qu’elles n’ont pas accès à l’information. C’est pourquoi, les députés nigériens et français avec le président Ousseini Tinni, nous avions lancé le G5 Sahel. C’est un grand succès, il existe et mène des activités, mais c’est le début. Nous avons discuté de la question avec le CIP G5 Sahel, de mener rapidement des missions de contrôle conjointes sur le terrain, composés des députés français, nigériens et ceux du G5 Sahel pour savoir comment se fait l’utilisation de l’argent des bailleurs de fond sur le terrain.
Récemment, un convoi militaire de la force Barkhane a été bloqué au Burkina Faso puis au Niger où à Téra, les évènements ont été dramatiques avec la mort des manifestants. Pensez-vous qu’il y a eu un complot quelque part ?
Il faut savoir, qu’il y a régulièrement des convois qui ne sont pas d’armements. Ce sont essentiellement alimentaires, de logistiques, des pièces détachées, de haricots etc. il y avait eu des dizaines de convois qui n’ont jamais eu de problème. Pour la dernière fois, il y a eu des instrumentalisations. Je ne dis pas qu’il y a un complot international derrière, mais en revanche quand on a commencé à voir des manifestations certains ont voulu les attiser, notamment les russes qui voulaient encourager les manifestations. Maintenant, le sujet est revenu à son calme. Je regrette profondément les morts de Téra et qu’il ne soit plus reproduit. Tout de même, la responsabilité à ce sujet doit naturellement être regardée comme c’est fait aujourd’hui par le Niger où des conséquences politiques ont été tirées par le Président de la République du Niger. Je pense aussi qu’il y a une volonté d’aller à l’affrontement. A l’avenir, on doit tout gérer pour revenir au calme.
Réalisée par Seini Seydou Zakaria(onep)