Historiquement, selon les sages de la Cour du Sultan de l’Aïr, le Bianou est une tradition très spécifique de la ville d’Agadez, dont l’origine reste encore assez mystérieuse et sujette à plusieurs hypothèses. Selon certains récits ou sources, rapportés par le Sultanat de l’Aïr, l’origine du Bianou est, d’une part, attribué à l’arrivée des arabes de Ghadamous et de Misrata à Agadez et d’autre part, à la date de la fin du grand déluge du temps du Prophète Nouhou, (quand le pigeon ramier partit à la recherche de terre sèche, revint avec une feuille verte de palmier pour prouver qu’il y a quelque part une terre pour amarrer). C’est ce qui explique, selon cette thèse l’usage des branches vertes de dattiers que les danseurs ramènent d’Alarcès. Les réjouissances organisées symbolisent la manifestation de joie après l’arrêt du déluge.
D’autres sources affirment que le Bianou symbolise l’accueil que les habitants de Médine ont réservé au Prophète Muhamed (PSL), le 18 juin 622, lors de l’Hégire. La fête de Bianou marque aussi le début du nouvel an et du calendrier musulman. La fin de cette fête correspondant à l’Achoura (10) jour de l’an musulman, qui est une journée particulièrement considérée par les musulmans. Certains disent que le Bianou correspond en réalité à la préparation et à la célébration de l’Achoura. Comme on le constate, l’origine de cette fête reste tout de même assez mystérieuse.
Comment se déroule la fête du Bianou ?
C’est au Sultanat que l’annonce du début de la fête du Bianou est faite dans le respect de toutes les valeurs et traditions qui la caractérise. Conformément à la tradition on commence par la Fatiha, trois coups de tambour par chacun des représentants du Sultan de l’Aïr, à savoir l’Agholla et le Tambari du Bianou. Cela se fait généralement, dès l’aube du 17ème jour du mois lunaire de Zoulhadj (mois de Tabaski). C’est le retentissement du tambour qui annonce le démarrage des manifestations tant attendues du Bianou. Le choix de celui qui donne le coup d’envoi n’est pas fortuit. Le soir, les jeunes se regroupent, jouent et dansent au rythme envoûtant des tambours et tambourins chez le Tambari de l’Ouest, et ceci pendant deux jours.
Selon le récit, au troisième jour le groupe de l’Ouest, fait sa montée sur le Toudoun Bianou (place surélevée permettant aux spectateurs de mieux voir les danseurs et aux tambours de se faire entendre le plus loin possible). Après les démonstrations de danses rythmées par le concert des tambours, tambourins et chants sur le Toudoun Bianou, le groupe de l’Ouest commence le circuit nocturne (Biyaggari). Dans l’après-midi de ce troisième jour, le groupe de l’Est commence aussi les manifestations. Ce groupe a été autorisé à faire ses manifestations à part, bien après le groupe de l’Ouest, c’est pourquoi il observe chaque année 3 jours de retard par rapport au premier.
Chaque après-midi, les deux groupes, chacun dans son secteur, animent la ville en respectant des itinéraires et points d’arrêts bien définis. Il faut noter que les points d’arrêt sont les domiciles des grandes figures du Bianou du passé et du présent: responsables, danseurs, batteurs de tambours ou chanteurs.
Il faut aussi noter que de plus en plus avec toutes les évolutions que connait le monde, la fête du Bianou nécessite assez d’investissement en ressources humaines, financières et matérielles. C’est dans ce sens et eu égard à cette immense charge, que l’organisation bénéficie des soutiens pour contribuer au renouvellement des instruments, à l’achat et des accoutrements des danseurs, pour l’accueil des invités et le grand repas, et pour la médiatisation de l’événement afin de faire intéresser d’autres nigériens mais aussi le monde entier à cette fête unique au monde.
Une fête qui fait la promotion et le respect des valeurs et traditions
Le Bianou est perçu comme un véritable outil de la promotion de la paix, de la cohésion sociale, du vivre ensemble tout simplement. C’est un cadre par excellence qui fait de la sensibilisation des participants pour que règne un esprit de discipline, de solidarité et de fraternité durant toutes les manifestations. Depuis quelques années, dans le souci de préserver et de rendre pérenne cette fête, les responsables coutumiers ont initié des formations en vue de transmettre les connaissances à la jeune génération. C’est ainsi que des formations des jeunes danseurs et batteurs de tambours sont organisées pour assurer une relève dans cette fonction, mais aussi pour améliorer la qualité du spectacle qu’offre le Bianou. Il faut enfin se dire qu’aujourd’hui le Bianou fait face aux défis de développement et de l’accroissement de la population et des nouvelles technologies de l’information.
Ali maman ONEP/Agadez