Le ministre de la Justice et des Droits de l’Homme, Garde des Sceaux, M. Alio Daouda a animé, le vendredi 6 septembre 2024 à son cabinet, un point de presse sur l’institution du Fichier des personnes, groupes de personnes ou entités impliquées dans des actes de terrorisme ou toutes autres infractions portant atteintes aux intérêts stratégiques et ou fondamentaux de la Nation ou de nature à troubler gravement la tranquillité et la sécurité publique en abrégé (FPGE). A cette occasion, le ministre a indiqué que le FPGE n’est pas une invention des autorités nigériennes puisqu’il existe sous d’autres cieux et même dans certaines instances internationales.
Dans ses explications, le ministre Alio Daouda a précisé que le FPGE est un fichier de traitement automatisé des données à caractère personnel des personnes, groupes ou entités impliqués dans des actes de terrorisme ou dans toutes autres infractions portant atteinte aux intérêts stratégiques et/ou fondamentaux de la Nation ou de nature à troubler gravement la tranquillité et la sécurité publique. « Ce fichier contient, les faits reprochés, un certain nombre de mentions indiquant notamment l’identité, la nationalité pour les personnes physiques, et pour les groupes des enseignements complémentaires en lien avec les faits reprochés », a-t-il ajouté.
Le ministre Alio Daouda a dit que les faits susceptibles d’entrainer l’inscription au FPGE sont dressés par les dispositions de l’article 3 de l’ordonnance n°2024- 43 du 27 août 2024. Ces faits peuvent être regroupés en trois grandes catégories selon leur nature qui justifient la compétence de la juridiction saisie. Il s’agit selon le ministre, des infractions de terrorisme qui relèvent de la compétence du Pôle judiciaire spécialisé en matière de lutte contre le terrorisme et la criminalité transnationale organisée. « C’est par exemple le cas de l’apologie du terrorisme, de l’association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste, le recel de terrorisme », a-t-il déclaré.
Il y a ensuite les infractions de droit commun qui relèvent des juridictions ordinaires. Il s’agit notamment de la diffusion de données ou propos de nature à troubler l’ordre public, les actes susceptibles de dresser les citoyens les uns contre les autres, les crimes de trahison (article 62 du Code pénal), la destruction des biens publics. Enfin, viennent les infractions qui relèvent du tribunal militaire telles que l’atteinte à la sureté de l’Etat, l’intelligence avec les puissances étrangères, les atteintes à la défense nationale ou la participation à une entreprise de démoralisation de l’armée ou de la Nation ayant pour objet de nuire à la défense Nationale.
Une décision qui sied au contexte actuel du Niger
Le ministre en charge de la Justice a rappelé que depuis un certain temps, on assiste à la diffusion des informations susceptibles de dresser des citoyens entre eux, des destructions des biens publics notamment le sabotage du pipeline, la création de nouveaux groupes armés terroristes, l’apologie du terrorisme, l’intelligence avec l’ennemi ; toutes choses qui ne sont pas de nature à promouvoir la paix et la quiétude sociale. D’où la pertinence de la mise en place du FPGE. « La décision d’inscription au FPGE comporte entre autres effets le Gel des avoirs financiers, l’interdiction de voyager, la déchéance provisoire et définitive de la nationalité », a-t-il indiqué.
Dans le contexte de la lutte contre le terrorisme et la criminalité transnationale organisée, le ministre en charge de la Justice a fait remarquer que le FPGE n’est pas une invention des autorités nigériennes puisqu’il existe sous d’autres cieux et même dans certaines instances internationales. C’est le cas, a-t-il précisé, du Conseil de Sécurité des Nations-Unies qui dispose d’une liste récapitulative comprenant les noms des personnes et entités faisant l’objet de mesures de sanctions pour des faits de terrorisme. Il a aussi cité INTERPOL qui, dispose d’une notice destinée à recueillir des informations concernant l’identité, la localisation ou les activités des personnes en lien avec une infraction terroriste.
Loin d’être un instrument liberticide, a poursuivi le ministre Alio Daouda, le FPGE sert à rechercher, à surveiller ou à contrôler certaines personnes, groupes de personnes ou entités à la demande des autorités judiciaires, des autorités administratives et des services de renseignements. « C’est l’esprit dans lequel, il a été créé. Par conséquent, on ne peut lui opposer l’intention de porter atteinte aux droits de l’Homme au regard des missions qui lui sont signées et qui sont toutes régies par un cadre législatif et réglementaire. Pour conforter l’engagement de l’Etat du Niger à respecter les droits de l’Homme, des personnes, groupes de personnes entités, les décisions d’inscription au FPGE peuvent être contestées en premier et en dernier ressort devant le Comité National et sont susceptibles de recours devant la Cour d’État », a-t-il précisé.
Par ailleurs, le ministre Alio Daouda a rappelé que les infractions de terrorisme et de financement de terrorisme sont prévues aux articles 399.1 à 399.9 du Code pénal. « Dans cette catégorie d’infractions, on retrouve notamment le détournement d’aéronefs, de navire, de plateforme fixe et de véhicule terrestre et fluviaux, les infractions contre la sécurité de l’aviation civile, de transport terrestre et fluviaux, la prise d’otage prévu par l’article 399.1.11. On retrouve également les attentats terroristes à l’explosif, les infractions du terrorisme nucléaire, les actes d’appui, fourniture d’armes et incitation, l’apologie et l’incitation au terrorisme, l’association de malfaiteurs en vue de perpétrer des actes terroristes, le recel de terrorisme qui sont prévus par les articles 399.1.12 à 399.1.19 », a-t-il relevé.
Le ministre en charge de la Justice a noté que le code pénal prévoit également en son article 399.1.21, le financement du terrorisme ainsi que le recrutement des personnes en vue de commettre l’une des infractions précitées. « Les pénalités encourues pour ces différentes infractions vont, selon le cas, de cinq à dix ans, de dix à moins de vingt ans, de quinze à trente ans. Les personnes, groupes ou entités soupçonnées, poursuivies ou condamnées comme auteurs ou complices d’infraction de terrorisme et de financement de terrorisme, ou d’infraction de droit commun connexe aux faits de terrorisme sont susceptibles d’être inscrits au FPGE », a-t-il dit.
Rappelant le contexte des pays du Sahel, le ministre en charge de la Justice a souligné que depuis plusieurs années, les pays-membres de la Confédération des Etats du Sahel sont confrontés à la recrudescence des infractions portant atteinte à leurs intérêts stratégiques et fondamentaux, de nature à troubler gravement la tranquillité et la sécurité publique. « Notre pays n’échappe pas à cette situation d’insécurité généralisée qu’il s’emploie à combattre par tous les moyens y compris de droit. C’est ainsi qu’en plus de la procédure judiciaire, les plus hautes autorités de notre pays ont décidé de mettre en place une procédure administrative qui se traduit par l’institution du Fichier des personnes, groupes de personnes ou entités impliquées dans des actes terroristes ou dans toutes autres infractions portant atteintes aux intérêts stratégiques et/ou fondamentaux de la Nation ou de nature à troubler gravement la tranquillité et la sécurité publique en abrégé FPGE », a-t-il conclu.
Abdoulaye Mamane (ONEP)