Le 29 septembre dernier les autorités en charge de la culture ont annoncé que le Prix Dan Gourmou se tiendra du 19 au 25 Octobre à Tahoua. L’annonce de la relance de ce festival-concours dédié à la musique moderne nigérienne dont la dernière édition remonte à 2014 a suscité naturellement un certain enthousiasme chez les artistes, musiciens et mélomanes. Car on se rappelle, cet événement culturel né en 1986 et qui tient son appellation du nom du grand artiste et violoniste de l’Ader, Mahamadou Bouhari plus connu sous le surnom de Dan Gourmou ayant chanté «Mougounmagani», avait servi de tremplin à plusieurs musiciens, groupes de musiques, et fait la joie des mélomanes.
Ce ne serait pas jouer au rabat joie que de s’interroger en cette veille de la 11ème édition du Prix Dan Gourmou sur les causes de la léthargie dans laquelle ont sombré les grandes rencontres culturelles du Niger. Comme la scène du Prix Dan Gourmou, qui n’a pas connu d’animation depuis 2014, celle de la semaine de la parenté à plaisanterie ou cousinage à plaisanterie reste aussi silencieuse depuis presque une dizaine d’années. Le Niger a réussi pourtant à inscrire en 2012 cette expression culturelle et pratique sociale ancestrale sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité.
Qu’est ce qui peut expliquer ce problème de périodicité pour ces rendez-vous de célébration du vivre ensemble et de valorisation de la culture ? Vers le milieu des années 2000, les autorités nationales avaient décidé d’attribuer aux différentes régions l’organisation des activités culturelles thématiques. À travers cette démarche qui pourrait être salutaire, les grands événements culturels nationaux ont été fixés au niveau de différentes régions qui ont en charge leur organisation. Dans cette optique le Prix Dan Gourmou a été transféré de Niamey à Tahoua ; le festival de la chanson féminine a été attribué et établi à Tillabery ; le festival du théâtre et de l’humour est installé Zinder ; le festival de ballets et chants a pour cadre Dosso ; le festival de la musique traditionnelle est logé à Maradi ; Niamey devrait abriter le festival des musiques africaines, etc.
Selon cette approche, la région organise l’activité, l’Etat, à travers le ministère en charge de la Culture devait venir en appui. Mais, à l’épreuve de la réalité, des questions se posent sur la viabilité de cette décentralisation de l’organisation des évènements culturels nationaux qui, ont perdu leur périodicité. Car dans un contexte où le secteur de la culture est considéré à tort ou à raison comme le parent pauvre des politiques publiques, les régions ou les collectivités ont-elles toutes, les moyens pour gérer l’organisation de grandes manifestations culturelles ? Du reste ces événements constituent-ils des priorités pour des entités assaillies par d’autres préoccupations et qui ont du mal à assurer leur propre fonctionnement ?
Le cas du Prix Dan Gourmou est là parmi les autres. Après des années de silence, c’est finalement le gouvernement qui a donné la chiquenaude pour le redémarrer. Espérons qu’il en soit ainsi pour les autres manifestations culturelles en léthargie. Mais, faudrait-il prévoir dans ce sens des moyens conséquents.
Il y a lieu aussi pour les différents acteurs notamment le ministère en charge de la Culture, les collectivités, les structures des artistes, la société civile, de réajuster les choses pour trouver la meilleure option afin d’assurer la viabilité de ces activités culturelles thématiques décentralisées. Cela pourrait contribuer à l’atteinte des objectifs du gouvernement pour le secteur des Arts et de la Culture, tels que mentionnés dans la Déclaration de Politique Générale (DPG) et visant à «impulser la relance de l’économie culturelle et créative».
Par Souley Moutari(onep)