Six mois après la conférence de Berlin sur la Libye tenue le 9 janvier 2020, le conseil de sécurité des Nations Unies a organisé hier une réunion par visioconférence à laquelle a pris part le ministre des affaires étrangères, de la coopération, de l’intégration africaine et des Nigériens à l’extérieur, M Kalla Ankourao. Cette conférence voulue par la république fédérale d’Allemagne qui assure la présidence du conseil de sécurité, intervient à un moment où on assiste à une véritable internationalisation du conflit en Libye consécutive à la présence et l’implication des forces des pays étrangers et de nombreux mercenaires sur le terrain.
La situation qui dure depuis neuf(9) ans a toujours préoccupé la communauté internationale, mais elle l’est encore plus aujourd’hui du fait de l’implication de plusieurs pays soutenant les camps belligérants, compromettant de facto les chances d’une solution politique à la crise qui secoue ce pays. Au cours de cette conférence ouverte par le secrétaire général de Nations Unies, M Antonio Guterres, les ministres des affaires étrangères des pays membre et /ou leurs représentants se sont succédé pour donner la position respective de leurs pays face à la crise libyenne. Depuis Niamey où il s’adressait à la tribune des Nations Unies, M Kalla Ankourao a tenu à saluer les efforts déployés par l’Allemagne et sa chancelière Angela Merkel et pour les initiatives et les engagements renouvelés en faveur de la Libye. Tout comme il a félicité le secrétaire général de l’ONU pour son engagement continu et sa représentante spéciale en Libye pour le travail accompli dans ce pays où le contexte est particulièrement difficile. Le Chef de la diplomatie nigérienne a rappelé les principes cardinaux édictés par la rencontre de Berlin sur la Libye dont entre autres la réaffirmation de la souveraineté, de l’indépendance et de l’intégrité de ce pays, l’arrêt des appuis des forces étrangères, le retour au processus politique inter-libyen ou encore le respect par tous les pays de l’embargo sur les armes et le respect du droit humanitaire et des droits de l’Homme. Berlin est passée, il y a six mois, mais le ministre relève le triste constat de la dégradation avancée de la situation en Libye plutôt que l’amélioration tant et légitimement espérée dit-il par la communauté internationale et les pays voisins. Et cela malgré les engagements pris par les participants à ladite conférence, a-t-il déploré. M Kalla a souligné la mise à rude épreuve de l’intégrité territoriale, de l’indépendance du fait des ingérences étrangères alimentant les tensions entre les parties libyennes belligérantes. Cela compromet gravement les efforts de la communauté internationale en faveur d’un retour au processus politique interne, a indiqué le ministre avant de souligner que ces ingérences vont avec leur lot de transfert massif d’armes de guerre et de mercenaires. Tout cela se faisant en violation des deux résolutions 1970 et 2292 de Nations Unies adoptées respectivement en 2011 et 2016 favorise le « développement des groupes terroristes sous la protection des belligérants » a expliqué le ministre Kalla Ankourao. C’est une situation inacceptable pour le Niger et qui menace directement sa sécurité, celle des pays voisins. Le ministre en a voulu pour preuve les attaques terroristes au Sahel et dans la région du Lac Tchad. Pour le ministre des affaires étrangère « la Libye n’a pas besoin davantage d’armes, elle n’a pas besoin des mercenaires, elle n’a pas non plus besoin d’être le théâtre de l’expression de la volonté de puissance des certains acteurs internationaux». La Libye souligne-t-il a besoin de « réconciliation, de paix et de prospérité, tout comme ses voisins qui ont plus que jamais besoin de paix et de sécurité ». Le ministre a souligné avec force le rôle que doivent continuer à jouer le conseil de sécurité des NU, l’UA, la ligue des Etats arabes, l’UE et tous les autres acteurs concernés par la crise pour stopper la dérive et aider ce pays à redevenir stable, paisible et prospère. Pour sa part, le Niger souhaite voir s’ouvrir vite la conférence de réconciliation inter-libyenne a dit le ministre Kalla Ankourao soulignant sa conviction « qu’aucune solution politique à la crise ne pourra être trouvée sans la participation pleine et entière de toutes les filles et tous les fils de la Libye sans exclusive ». Il a au passage, rappelé les inadmissibles et graves violations des droits de l’Homme dont sont victimes les libyens et les migrants avant de condamner les attaques injustifiées contre les hôpitaux dans ce contexte international marqué par la pandémie de la Covid 19. Le ministre des affaires étrangères a déclaré qu’une attention toute particulière doit être accordée aux migrants africains dans les camps de détention en Libye qui sont privés de leurs droits et dont certains sont utilisés comme boucliers humains par des groupes armés.
Avant de conclure, le ministre est revenu sur la question de l’ingérence étrangère soulignant qu’elle ne fait qu’exacerber la crise en éloignant de facto la solution politique, alors qu’elle est la « seule à même de permettre aux libyens de prendre en main le destin de leur pays ». Par la voix de son ministre des affaires étrangères, le Niger a appelé les participants au processus de Berlin de prendre conscience de leurs responsabilités à honorer les engagements en «s’abstenant d’interférer dans les affaires intérieures de la Libye et en donnant une chance à la création des conditions d’un cessez-le-feu général».
Zabeirou Moussa(onep)