Depuis 25 ans, elle souffre d’une déformation de son membre inférieur et du bassin. Roumanatou Tidjani est mère d’une fille qu’elle eut par césarienne, 9 années après son mariage à l’âge de 16 ans, avant de divorcer pour des raisons indépendantes de sa situation de handicap. « Mon mari ne m’a jamais discriminé, bien qu’il ne soit pas dans la même situation que moi. C’est dû au fait qu’il était resté très longtemps en exode, à la Mecque », a-t-elle confié.
La femme de 33 ans vit aujourd’hui avec sa fille unique de 7 ans dans sa famille, à Magaria et exerce des «petits commerces » de condiments, de beignets et des textiles. Le fardeau de la poliomyélite, qu’elle supporte depuis sa tendre enfance, a suscité en elle l’abnégation d’apporter, vaille que vaille, sa contribution dans le cadre de la lutte contre cette maladie. Ainsi, avec d’autres femmes en situation de handicap, Roumanatou collabore avec le district sanitaire de Magaria pour appuyer avec témoignage les messages de sensibilisation à l’endroit des parents pour leur adhésion à la vaccination des enfants.
Racontant son histoire touchante, elle affirme qu’au début, elle n’avait pas de béquilles ou autres supports pour sa mobilité devenue pénible. «Je rampais ; mon père voulant m’éviter la souffrance, a préféré me priver du chemin de l’école », se souvient-elle avec regrets. A l’époque où le handicap était beaucoup plus considéré comme une fatalité et l’insertion socio-professionnelle des personnes en situation de handicap retenait moins l’attention des acteurs du développement. Roumanatou se réjouit, aujourd’hui, de pouvoir exercer du commerce et surtout d’avoir des proches qui la soutiennent inlassablement dans les tâches quotidiennes qui dépassent ses capacités.
« Ce qui m’est arrivé, je ne le souhaite à l’enfant de personne. J’ai perdu ma jambe. Et je me battrai toujours pour qu’il n’y ait plus de victime de polio », déclare Roumana. Avec ses deux béquilles, pour sa mobilité, elle emprunte le taxi moto à 200FCFA la course. Certains de ses déplacements, notamment quand il s’agit de franchir les frontières du Nigéria pour l’achat des textiles qu’elle revend à Magaria, Roumanatou est soulagée par des bonnes volontés qui l’entourent.
Mahamane Chékaré Ismaël (Envoyé Spécial)