Caractérisée par un vent poussiéreux et une fraîcheur intense, la saison froide au Niger s’étend de novembre à février. En ce mois de janvier 2025, le froid se manifeste toujours dans la ville de Niamey. Ces derniers jours, une fine poussière est observée en début de journée, mais dès que la nuit arrive, la fraîcheur persiste jusqu’au lever du jour. Bien que cette fraîcheur soit agréable pour certains, elle représente un moment de douleur et d’angoisse pour d’autres, en particulier pour les franges vulnérables de la société, notamment les enfants, les personnes âgées et les femmes.
Selon les explications du directeur général de la météorologie nationale du Niger, M. Katiellou Gaptia Lawan, cette saison est caractérisée par des séquences de poussière assez intenses dans la mesure où c’est un phénomène pratiquement érosif. « Effectivement, nous avons un changement de temps dans la mesure où on vient de sortir de l’hivernage. Avant, nous étions sous la domination de la masse d’air appelée la mousson et petit à petit elle s’est retirée. Après le vent a tourné. Cette fois-ci, c’est le vent d’Est appelé l’harmattan. Ainsi, au Niger, l’harmattan est caractérisé par des températures froides (la nuit). Et de jour comme de nuit, un vent sec accompagné de poussière souffle sur le pays », a-t-il expliqué.
Ce changement climatique ne reste pas sans conséquence sur la santé humaine. En effet, en cette période, dans certains centres de santé Intégré (CSI) de Niamey, il y a une affluence très importante des femmes avec des enfants de moins d’un an au dos. Ces êtres fragiles sont atteints de maladies respiratoires dues au froid. Ils ont soit des toux récurrentes ou du mal à respirer. Ces enfants, à vue d’œil, semblent souffrir dans leur corps et malheureusement n’expriment leur douleur qu’à travers des pleurs et des gestuels.
Dans une interview parue dans nos colonnes, Dr Ahmed Ali Moulaye, pédiatre et allergologue à la polyclinique Magori, confirme que pendant cette période, les enfants sont les plus exposés aux problèmes respiratoires. « 60 à 80% de ses consultations en période de froid sont liées aux infections respiratoires, avec une vingtaine, voire une trentaine de patients par jour. La prolifération des infections respiratoires s’explique par le fait que le froid diminue l’immunité des enfants », a-t-il précisé.
Mme Boubacar Balkissa est affairée avec son nouveau-né de 5 mois. Son enfant souffre gravement de rhume. Cette jeune femme s’est rendue au CSI de Saguia pour des soins médicaux. « Mon enfant n’a pas dormi la nuit dernière, de même que moi. J’ai eu très peur de la perdre. À peine, arrive-t-elle à respirer. J’ai dû lui appliquer du beurre de Karité toute la nuit pour qu’elle se sente mieux. Maintenant, je suis au CSI pour des soins », a-t-elle confié.
Cette période de froid est un moment difficile pour Rachida Hamadou, atteinte de la sinusite. « Je ne supporte pas cette saison. C’est pourquoi, je dois toujours porter une bavette pour me protéger contre la poussière et le vent qui souffle » a-t-elle témoigné. Notons aussi que l’utilisation abusive des climatiseurs et des ventilateurs pourraient aussi aggraver l’état de santé des enfants.
Une période de bonnes affaires pour les vendeurs de produits hydratants et de vêtements chauds
La commercialisation des pommades a le vent en poupe en cette période de froid. Il existe toute une gamme de produits qu’on applique pour se protéger du froid. On peut citer des pommades comme la vaseline, le beurre de karité et les lotions hydratantes. Ce sont autant de produits couramment appliqués par nombre de personnes durant cette saison froide pour prévenir la sécheresse de la peau. Dans les différents marchés de la ville de Niamey, des stands de vendeurs de pommades sont visibles, particulièrement au petit marché de Niamey. « Les produits que nous proposons aux clients proviennent du Nigeria, du Burkina Faso ainsi que de divers autres pays », explique un revendeur. Il a par ailleurs précisé qu’actuellement, de nombreux clients se présentent et achètent le produit qu’ils souhaitent en fonction de leurs moyens. « Les pommades sont proposées à des tarifs variant de 500 francs à plus, en fonction du choix du client », a-t-il précisé.
Les clientes affluent dans ce marché. « Je suis venue me procurer de la vaseline. J’avais l’habitude d’utiliser plutôt les crèmes pour le corps, mais avec cette saison froide, il vaut mieux prendre les pommades qui permettent d’hydrater le corps », a-t-elle confié.
Le beurre de karité est très prisé pendant cette période. Et pour cause, il est une pommade beaucoup plus recommandée à cette période de froid. Il est en effet connu pour apporter une « nutrition » en profondeur à la peau, en particulier pour les peaux desséchées, ce qui explique la ruée des clientes chez les vendeurs. « Je suis vendeuse de beurre depuis très longtemps et quelle que soit la période. Les femmes viennent s’en procurer pour leurs enfants. C’est un produit très efficace dans le traitement du rhume chez les nouveau-nés. En cette période de froid, il faut toujours l’appliquer sur tout le corps du bébé », conseille la vendeuse.
Des pullovers de plusieurs tailles et couleurs inondent le marché de Wadata. Selon un revendeur rencontré devant son stand, les pulls leur proviennent de Lomé, du Portugal et de la Suisse. « Nous vendons les plus petits entre 1000 Fcfa et 2000 Fcfa. Quant aux grands pullovers, ils sont vendus entre 4000 Fcfa et 6000 Fcfa par unité. Les clients viennent abondamment pour acheter nos articles. D’autres achètent pour leurs enfants ou pour aller revendre en ville », a-t-il affirmé.
En ce qui concerne les revendeurs de cagoules, leur but principal est de satisfaire leurs clients. Ce que confirme Abdoul Wahid Oumarou, un jeune issu du village de Boureimi et qui vient de se lancer dans cette activité. « Nous vendons les cagoules à 400 Fcfa. J’exerce ce commerce afin de ne pas tendre la main à quelqu’un. Je gagne bien dans ce commerce », a-t-il dit. Salim Mahamadou est un jeune revendeur de chaussette au marché Wadata de Niamey. Il souligne qu’il se ravitaille au niveau des grossistes du marché. « Avant, je vendais des boucles d’oreilles. Mais, avec la période de froid, j’ai dû suivre le temps pour me lancer dans la vente des chaussettes. Les prix varient entre 150 et 250 Fcfa », a-t-il mentionné. Ce revendeur venu de Bonkoukou à la recherche de son gagne-pain, explique que son véritable problème est de trouver un emplacement pour vendre. « On n’a pas de lieu fixe. A chaque fois, nous sommes chassés. On court de gauche à droite quand on aperçoit les forces de l’ordre. J’étais une fois victime de confiscation d’articles. J’ai dû payer 2000 FCFA pour les reprendre », a-t-il raconté avec amertume.
Salima H. Mounkaila (ONEP)