Les travaux de la 2ème session des pourparlers sur le climat en Afrique ont débuté, le dimanche 26 février 2023 au Palais de congrès de Niamey sous le thème ; «Renforcer la résilience climatique pour une meilleure sécurité humaine dans la région du Sahel». Cette session de deux (2) jours dite «de l’espoir par plusieurs participants», est conjointement organisée par la Commission économique pour l’Afrique des Nations Unies, l’ACMAD et l’Université Abdou Moumouni de Niamey.
Pour la première journée de travaux, la session 2 de la rencontre de Niamey s’est penchée sur le thème «Les systèmes alimentaires, agricoles et commerciaux en Afrique de l’ouest». Dans son exposé de mise en scène, M. Nassirou Ba, économiste agricole senior, a souligné qu’en Afrique de l’ouest, l’économie agro-alimentaire est le plus important secteur économique, que ça soit en termes d’emplois ou de création de valeur ajoutée. Il génère, selon les statistiques qu’il a communiquées, 35% du produit intérieur brut et environ 100 millions d’Africains de l’ouest, soit 2 personnes employés sur 3, dépendent du secteur agro-alimentaire pour leur survie.
Pour parler de systèmes alimentaires, agricoles et commerciaux en Afrique de l’ouest, a poursuivi M. Nassirou Ba, il est nécessaire d’analyser les forces économiques, technologiques et sociales qui soutiennent l’agriculture et la croissance agricole, ainsi que le changement structurel dans le système agro-industriel en Afrique de l’ouest. Le chercheur identifie ainsi cinq (5) forces majeures qui soutiennent le changement structurel dans l’agriculture ouest-africaine. Il cite «les changements démographiques, les changements inégaux mais continuels de l’économie dans la région, les variations dans le développement du revenu des ménages et sa distribution, la vulnérabilité économique et politique persistante, et le changement mondial et technologique».
M. Nassirou Ba a également rappelé que les systèmes alimentaires ont un impact négatif considérable sur le changement climatique car, ils constituent la plus importante source de dégradation de l’environnement, de perte de biodiversité, de pollution et de déforestation. A l’inverse, a-t-il ajouté, le changement climatique pose aussi des risques significatifs à la performance du système alimentaire. «Il y a une grande chance que cela s’intensifie. Ce qui va affecter les petits fermiers et les communautés pauvres ou marginalisées. Les femmes et les enfants font face à de grands risques qui les exposent aux chocs environnementaux», a-t-il regretté.
Durant les discussions qui ont suivi l’exposé de mise en scène, Mme Madaka Tumbo de l’Université de Dar Es Salaam (Tanzanie) a relevé que le changement climatique a eu un impact en Afrique de l’ouest non seulement sur la production alimentaire, mais aussi sur la sécurité alimentaire. Pour sa part, M. Divine Ntiokam, fondateur et directeur exécutif d’une entreprise d’adaptation intelligente au changement climatique, a indiqué que les Organismes génétiquement modifiés (OGM) et l’agriculture intelligente d’adaptation au changement climatique ne sont pas compatibles, coupant court aux lobbyistes qui sont en faveur de l’introduction des OGM pour lutter contre la faim en Afrique de l’ouest.
M. Philip Kilonzo, responsable du plaidoyer, de la communication et des politiques à PACJA, a regretté que les Etats commencent à abdiquer de leurs responsabilités au profit du secteur privé ce qui, insiste-t-il, est un sérieux problème pour le secteur. «Les cultures vivrières ne reçoivent plus l’attention qu’on devrait leur porter et parallèlement, l’attention est portée sur les cultures de rente exportées vers l’Europe et les Amériques», a fait savoir M. Philip Kilonzo. «La gestion des ressources naturelles est une obligation. Sans une bonne gestion de l’eau, on ne peut pas avoir de l’agriculture», a-t-il déclaré.
Les discussions ont aussi porté sur la part d’énergie utilisée dans l’agriculture et sa provenance, les possibilités d’exportation hors du continent pour couvrir les besoins de la diaspora africaine, la gestion rationnelle des pertes de produits frais et la priorisation des coopératives paysannes dans la privatisation du secteur agro-alimentaire en Afrique de l’Ouest. Les participants à la session ont également fait cas de la problématique complexe que posent l’expansion physique des villes africaines et la pollution plastique qui réduisent considérablement les aires agricoles. De même, ils se sont interrogés sur la place du genre dans le développement véritable de l’agriculture et de l’agro-industrie dans l’espace ouest africain.
Actuellement, a affirmé M. Nassirou Ba, le commerce interafricain de produits agricoles et dérivés ne représente que moins de 20% du commerce agricole total en Afrique. «Le commerce régional alimentaire est essentiel pour le développement agricole et la transformation, la sécurité alimentaire et nutritionnelle, la résilience aux chocs et une plus large intégration régionale et continentale», a-t-il expliqué. M. Nassirou Ba salue la mise en œuvre de la ZLECAf qui constitue, selon lui, une occasion unique de travailler au développement et à l’intégration aux niveaux régional et continental en Afrique.
Souleymane Yahaya(onep)