L’organisation des mariages diffère d’une époque à une autre. De nos jours, les cérémonies de mariage impliquent un certain nombre de nouvelles pratiques fantaisistes qui contribuent à compliquer les choses. D’innovation en innovation, le mariage, cette institution bénie par toutes les religions et les traditions, est en passe de devenir la pratique sociale la plus sophistiquée et surenchérie.
Entre autres pratiques décriées dans la célébration du mariage, il y a le fameux ‘’rôti’’ qui consiste à préparer des dizaines et des centaines de volailles pour les amis des jeunes mariés. S’y ajoutent ensuite les ostentations du cocktail organisé pour donner au mariage une touche de bombance et d’extravagance.
Rabia Nassamou, une jeune dame habitante de Niamey, explique que le ‘’rôti’’ grève dangereusement le budget de la famille de la jeune mariée qui est appelée à en supporter les charges. Ce somptueux plat de 25 à 50 pintades (ou poulets) est destiné à l’accompagnement de la jeune mariée. « Il s’agit d’honorer la jeune mariée en faisant en sorte que son dernier repas de la maison soit grandiose», explique Rabia.
Mais en réalité, la célébration commence dès la veille avec le ‘’Party kaouyawa’’ qui rassemble les amies de la ‘’Amaria’’ et des membres de sa famille. Au cours de cette parties les amies s’habillent en mode typiquement villageois avec des habits traditionnels et du maquillage aux signes identitaires ancestraux, d’où son nom ‘’party kaouyawa’’. Ainsi, toute la soirée, ça chante et ça danse aux pas des sons traditionnels. Une véritable remontée du temps dans les traditions ancestrales !
Quant au ‘’Hanna’’ pratiqué généralement dans la socité Zarma, il tire sa source de nos traditions. A l’image du ‘’Lallé’’ ou la mise au henné pratiquée dans la société Haoussa, ce rituel est une sorte de séance de purification traditionnelle des futurs jeunes mariés, tout en les rendant plus beaux et rayonnants. Ce rituel officié par des anciens en présence de plusieurs invités constitue aussi une sorte de test pour mieux sonder le caractère de la future épouse.
Quant au ‘’wayma wayma’’, la bassine remplie de tissus, de pagnes, de bijoux et de cosmétiques offert en cadeau à la jeune mariée par les cousines et les sœurs par voie de cotisation.
La célèbre cantatrice et traditionnaliste, Tinni Bio gna, invitée pour agrémenter presque toutes les cérémonies de mariage à Niamey, se réjouit de constater que certaines de ces pratiques comme le ‘’Hanna’’ et le ‘’Party Kaouyawa’’ s’incrivent dans les efforts de promotion et de perpétuation de nos traditions ancestrales. Cependant, elle déplore le gaspillage qui les entoure. Car, rappelle-t-elle, à l’époque, le mariage était célébré dans la simplicité, sans tracasseries ni dépenses excessives.
Décrivant le déroulement du ‘’Hanna’’, Tinni Bio Gna explique qu’avant, il consistait à terrasser la jeune mariée avec force, l’immobiliser et lui attacher une sorte de foulard en sorte de bonnet. La nuit du ‘’Hanna’’, la jeune mariée est installée sur une natte blanche et les tam-tams et des chanteuses traditionnelles agrémentent la soirée aux pas de danse des amies de la jeune mariée.
Elle explique que s’agissant de la grosse bassine du ‘’wayma wayma’’, à l’époque elle se limitait à un panier qui ne demandait pas de tels moyens. « Le contenu était juste composé de calebasses, de deux ou trois tasses, du savon, de l’huile et bien sûr la couverture traditionnelle appelée ‘’kounta’’ ou ‘’Téra-Téra’’. Les sœurs qui emmenaient le panier recevaient en retour une grande galette de mil large comme une pizza qui est farcie en plusieurs parties, et chaque sœur recevait une part en guise de remerciement », rappelle la traditionnaliste. « Dans le temps, il n’y avait pas cette affaire de rôti où les gens préparaient des dizaines de pintades pour une seule soirée, mais il y avait la semaine des jeunes mariés qui se déroulait dans la fête mais sans un grand gaspillage. Durant la semaine, les amies de la jeune mariée préparaient du couscous de maïs, de la pâte de mil pour les amis des mariés », se souvient-elle.
A ce titre, Tinni Bio Gna lance un appel à la retenue dans les dépenses de mariage. « Les doigts de la main n’ont pas les mêmes tailles et il en est de même pour nous les êtres humains parlant de moyens. Chacun doit se marier selon ses moyens. Si tu n’en a pas beaucoup, il faut se contenter d’épouser quelqu’un de la même catégorie sociale pour célébrer son mariage selon ses moyens. Les mères des jeunes mariées doivent vraiment arrêter de se mettre dans des problèmes en empruntant de l’argent pour organiser un événement grandiose, quitte ensuite à se retrouver en prison », conseille-t-elle.
Par Assad Hamadou(onep)