Le président du Comité International de la Croix-Rouge (CICR) a animé, le jeudi 10 février dernier, une conférence de presse pour marquer la fin de sa visite de travail au Niger. Dans les échanges avec les journalistes de la presse nationale et ceux des médias internationaux ayant intervenu par visioconférence, M. Peter Maurer est revenu sur plusieurs sujets d’actualité qui vont de la relation de son organisation avec les Forces Armées Nigériennes à la réunification des familles, en passant par les priorités d’actions du CICR au Sahel, les investissement ciblés pensés en faveur des populations pour faire face à leur double vulnérabilité, ainsi que la recherche de solutions innovantes, pérennes et propres au contexte sahélien. Le président du CICR était entouré lors de cet exercice, du directeur régional pour l’Afrique du CICR, M. Patrick Youssef et du chef de la Délégation du CICR au Niger, M. François Moreillon.
Le président du Comité International de la Croix-Rouge a reconnu que son organisation ne parvient pas à intervenir directement dans certaines localités vulnérables et isolées qui existent au Niger et a assuré explorer les voies et moyens qui permettront d’accéder «aux zones qui sont difficiles d’accès et où la négociation avec les acteurs armés pose des difficultés». Ce qui permettra d’élargir la surface opérationnelle du CICR sur le territoire nigérien. Dans ce contexte, le président du CICR salue l’importance et la positivité des relations avec les Forces de Défense et de Sécurité du Niger, particulièrement dans les domaines du dialogue sur le droit international humanitaire et les formations en droit international humanitaire. Ces dernières, souligne-t-il, «sont étendues pour permettre d’avoir des relations soutenues et approfondies sur des actions particulières, mais aussi sur la connaissance et la mise en œuvre du droit international humanitaire».
M. Peter Maurer explique qu’il est important pour une organisation humanitaire, dans le contexte sahélien marqué par de multiples crises, de clairement identifier ses priorités. L’approche uniformisée de la Croix-Rouge, a-t-il insisté, est d’essayer de construire une action humanitaire sur la base des besoins des populations et des communautés, et non sur des bases conceptuelles de tendances et de catégories telles que la migration et le changement climatique. «En échangeant avec les populations, une priorité s’établit par l’urgence des besoins même, et non pas par ces complexités de mettre ensemble les concepts de la migration, des conflits, du changement climatique», se réjouit-il.
L’approche adoptée par le Comité International de la Croix-Rouge est ainsi orientée vers la connaissance des besoins réels des populations. «Ce que je trouve toujours intéressant, précise M. Peter Maurer, en parlant avec les communautés, elles ne vous disent jamais qu’elles ont besoin de l’aide humanitaire, de l’aide de développement, de l’aide au changement climatique ou de l’aide à mitiger les effets d’une migration incontrôlée. Les populations vous disent toujours qu’elles ont des besoins de services élémentaires, ce qui établit des priorités assez claires dans le pays». De même, le patron du CICR a partagé les efforts déployés par son organisation pour retrouver les personnes disparues, malgré la particularité sahélienne, qui ne permet pas de savoir si ces personnes sont dans le pays, dans la région ou hors du continent, ou même décédées sur place.
S’agissant de la résilience des populations vulnérables, le président du CICR a affirmé que son organisation la voit sous un angle qui couvre le court, le moyen et le long terme. Cela va de la dépendance aux activités génératrices de revenus pérennes. Il a affirmé que le CICR, en collaboration avec certains instituts de recherche agronomique, a mis au point des semences qui s’adaptent plus facilement aux aléas climatiques. «On commencera cette année, ajoute-t-il, des projets pilotes qui concerneront les pasteurs en transhumance et permettront de trouver des axes et des formules pour renforcer ces résiliences liées à la transhumance».
M. Peter Maurer a indiqué qu’à cause des conflits armés et des situations de violence, ainsi que les aléas climatiques, de plus en plus de populations au Sahel vivent dans un espace restreint. Il a appelé l’ensemble des porteurs d’armes dans la région à préserver cet espace humanitaire qui est affecté de plus en plus. «Vous êtes conscients qu’à cause des situations conflictuelles et des différends politiques, l’espace humanitaire se rétrécit pare qu’il y’a des barrières aux frontières. Dans ce contexte, je voudrai encore réaffirmer notre détermination d’avoir des exceptions humanitaires sur tout régime de mesures contraignantes» imposées à des pays de la région.
En plus des activités qui l’ont amené au Niger, le président du CICR a indiqué que son voyage a aussi pour but de rappeler à la communauté internationale qui fait face à la multiplication des conflits dans le monde, de ne pas abandonner les populations du Sahel qui font face à de multiples crises humanitaires. «J’ai l’espoir que la conférence Union
Européenne-Afrique va permettre d’atteindre un autre pas de conscientisation et j’espère aussi des lignes de crédits, des moyens, pour vraiment répondre aussi, d’une manière plus significative, aux énormes défis auxquels on est confronté aujourd’hui. Il est important que les acteurs politiques et la communauté internationale soient conscients de ces écarts de vulnérabilité et d’y remédier», a-t-il déclaré.
Enfin, M. Peter Maurer a rendu un vibrant hommage à la Croix-Rouge Nigérienne et à ses volontaires qui «n’épargnent aucun effort pour arriver à des endroits et atteindre les populations où peut-être en tant qu’acteur international, nous n’avons pas la capacité». Il annonce que le CICR va accroitre son soutien à la Croix-Rouge Nigérienne pour qu’elle puisse élargir «son rayonnement de l’action humanitaire» aux autres acteurs internationaux. Il en va de même de ses volontaires, que le président du CICR apprécie particulièrement.
Souleymane Yahaya(onep)