
Lors de l’entretien sur le plateau de la RTN
Quelle appréciation faites-vous de la situation sécuritaire d’avant les évènements du 26 juillet 2023 ?
Merci à vous pour l’occasion que vous nous offrez, certainement de nous entretenir avec nos concitoyens sur les grandes lignes de la mise en œuvre de notre lettre de mission. De prime abord, je voudrais rendre grâce à Dieu qui a rendu cela possible aujourd’hui pour qu’on puisse vraiment rendre compte au peuple nigérien de ce que nous sommes en train de faire depuis bientôt deux ans. Mes remerciements aussi vont au Chef de l’État qui a placé cette confiance en nous, en ma modeste personne pour animer les activités au niveau de ce Ministère régalien. Je présente en ce début d’année 2025, mes vœux de nouvel an à la population du Niger et à l’ensemble de l’espace AES. Je présenterai aussi mes condoléances aux victimes civiles et militaires, car nous savons effectivement que cette situation a causé beaucoup de désolation dans notre pays et dans notre espace AES. Et enfin, je salue la résilience du peuple, de la population au sein donc de cette confédération AES.
Pour revenir à votre question, la dégradation de la situation sécuritaire et la mauvaise gouvernance dans la gestion des affaires publiques étaient les préoccupations majeures qui ont conduit le Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie (CNSP) à prendre le pouvoir le 26 juillet 2023. Je voudrais justement, pour qu’on puisse un peu cerner cette situation, essayez de parler de la question sécuritaire d’avant juillet 2023 et de ce que nous sommes en train de faire d’aujourd’hui. La situation dans laquelle nous étions avant le 26 juillet était une situation de sous-traitance sécuritaire. Pourquoi de sous-traitance sécuritaire ? On va le voir. Cette sous-traitance se situe à deux niveaux. Premièrement entre nos Etats et la France, parce que là il faut vraiment dire de qui il s’agit, terre à terre bien entendu. La France qui considère que nos armées locales ne peuvent plus résoudre le problème d’insécurité et qu’il faut absolument sa présence dans cet espace. C’est ainsi qu’elle a très vite déployé les méthodes politiques, diplomatiques pour finir par convaincre l’élite d’antan qu’il fallait qu’elle s’installe dans l’espace AES, dans l’espace ouest-africain, dans le Sahel pour soi-disant lutter contre le terrorisme. Le plan de la France doit paraître réaliste, parce qu’il faut faire comprendre aux gens à première vue qu’il est réaliste. Donc, vu le nombre de militaires annoncés qui devraient occuper l’espace AES, il semblerait qu’il y a eu un couac. Il fallait que la France, pour rendre ce plan réaliste, fasse à appel à d’autres pays de l’Europe, à ces autres pays de l’OTAN, pour venir occuper notre espace, s’installer et sous-traiter notre sécurité. Parce qu’en ce temps, ce que nous avons dans notre espace était très dommageable alors que nous pouvons justement circonscrire à temps utile.
Nous le savons, tout a commencé au Mali où vous vous souvenez très bien de l’intervention de la France où le peuple malien avait applaudi en son temps la France qui est venu soit disant traiter le problème d’insécurité qui était à l’ordre du jour.
La deuxième sous-traitance, comme je le disais, c’est entre la France et les pays européens. Donc vous vous souvenez très bien qu’à l’époque, nous avons tout le monde ici à part donc les pays de l’Otan comme je l’avais dit. Nous avons des pays pas des moindres qui étaient tous ici invités dans le Sahel pour pouvoir soi-disant lutter contre le terrorisme. Malheureusement nous connaissons la suite. Tous ces pays réunis n’ont pas pu donner la garantie sécuritaire qu’il nous fallait en ce temps pour pouvoir vaquer à nos occupations et permettre à nos populations de pouvoir travailler, de pouvoir se déplacer dans la quiétude qu’il fallait. La suite, nous la connaissons. Les Présidents Ouest-africains ont parcouru le monde avec la France comme mentor pour aller chercher qui des soutiens, qui des appuis un peu partout dans le monde. Et avec des résultats aussi que nous savons pertinemment. Des mises à disposition des fonds, des soutiens ont été manifestés par certains pays qu’on n’a d’ailleurs jamais vu. Souvenez-vous un peu des sommes d’argent astronomiques qui avaient été promises et qui avaient été justement gérées par la France qui, malheureusement jusqu’au moment je vous parle aujourd’hui, nous avons juste constaté au Niger quelques matériels désuets qui ont été mis à notre disposition à l’époque pour qu’on puisse lutter contre ces bandits qui, nous savons aussi avec le temps, étaient entretenus justement par la même France. Nous avons en exemple ici la situation à Chinagoder, on ne l’a pas oublié, les tueries d’Inatès, nous avons en mémoire la saison agricole 2023 où c’était des gens qui mouraient dans l’Anzourou pour le simple fait qu’ils sont allés au champ. Donc tout cela, nous les avons en mémoire. Au niveau national, nous avons constaté à notre corps défendant que nous ne pouvions rien faire. Nous avons avec nous des acteurs qui se permettaient tout, qui souvent, quand on demandait leur aide précisément à des endroits précis, à des attaques précises, ces gens ne bougeaient pas. Ils nous narguaient carrément, ils nous faisaient savoir souvent que la cible ne valait pas le prix de la munition qui allait être utilisée. Ils nous disaient que non les messieurs qu’on est en train de voir, n’ont pas des armes apparentes. Donc finalement, c’était des subterfuges, tous les arguments étaient possibles pour ne pas agir. Nous l’avons compris, nous l’avons vécu et très mal vécu justement dans notre fort intérieur pour que nous puissions réagir un 26 juillet. Ce partenaire était en train d’agir comme la souris, comme on dit généralement, qui te mord et qui souffle sur la blessure. En termes imagés, voilà ce que nous pouvons dire de cette coopération que nous avons justement avec ce partenaire français qui a fini par créer la désolation dans notre espace. Nous avons en mémoire, comme je le disais, les tueries d’Inatès, de Chinagoder, avec beaucoup de désolation dans nos contrées, dans nos régions qui, malheureusement, ont fini par décider l’armée d’intervenir et d’arrêter ce désordre.
La France, non contente de cette situation, s’était exclamée : un coup d’État de trop. Qu’est-ce qui était le trop ? Qu’est-ce que cela pouvait bien vouloir signifier ‘’un coup d’État de trop’’ ? Nous étions dans une situation où nous étions en train de perdre ce que nous avons de plus cher qui est notre pays, il fallait agir. Malheureusement, cette réaction n’a pas été du goût de la France. Elle a été chassée du Mali, puis du Burkina et elle devait être chassée du Niger tout naturellement puisque c’est le même espace. Souvenez-vous du sommet de Pau parce qu’aujourd’hui, il faut le dire, moi j’ai en bonne mémoire que c’est à ce sommet de Pau que la cible avait été indiquée. Parce qu’en ce temps, nous ne savions pas ce qui se passait au niveau de la zone des trois frontières. Il aurait tout simplement fallu que le Président français déclare la nouvelle cible pour que tout s’embrase au niveau du Liptako Gourma que nous connaissons très bien. C’est pour dire que tout ça, est orienté. Et aujourd’hui, on a fini par définitivement comprendre que non seulement la France est aux abois, mais la France, au lieu justement de se raviser, elle applique ce qu’elle a toujours su faire : une politique française, très française comme le dit Sankara. Elle s’allie encore à de nouveaux partenaires qui, malheureusement, sont nos voisins avec qui nous avons une histoire commune, une géographique commune, qui aujourd’hui sont en train de donner de l’eau au moulin de la France pour pouvoir nous déstabiliser. Donc, la situation que nous vivons en ce moment se voit ajouter d’autres menaces pas de moindre, parce que lorsque c’est ton voisin lui-même maintenant qui se présente comme un cheval de troie et qui permet à certains de venir t’atteindre, là tu es obligé d’être vigilant à plus d’un titre. Donc, nous constatons maintenant qu’il nous faut redoubler de vigilance. Pour que la situation soit contenue, il faut faire preuve de vigilance. Des exemples vous ont été donnés ici à travers toutes les interventions de ce qui est en train d’être manigancé contre notre pays. Voilà la situation en ce qui concerne la sécurité.
Sur le plan économique, on n’en doute pas un instant que des efforts sont en train d’être faits pour nous empêcher notre plénitude économique. Je salue la résilience de ce peuple nigérien qui a compris les enjeux qui sont là ; qui sont les nôtres. Ce peuple qui a compris l’objectif de cette lutte, qui est, ni plus ni moins, une lutte de libération pour affirmer notre souveraineté et pouvoir nous développer avec nos propres valeurs. Et c’est de celà qu’il s’agit. Donc très vite, nous l’aurons compris et mieux ça vaut. Voilà la situation dans laquelle nous sommes en ce moment. Et compte tenu de cette situation, nous avons les orientations et la vision du Chef de l’État, le Président Tiani qui se déclinent en quatre axes qui sont notamment le renforcement de la sécurité et de la cohésion sociale, la bonne gouvernance, le développement des bases de production et la souveraineté économique et l’accélération des réformes sociales. Conformément à cette vision, des lettres de mission ont été assignées aux différents ministres.
Pour ce qui concerne l’Intérieur, nous en avons une qui comporte 11 points clés pour lesquels nous nous efforçons tous les jours à travailler au quotidien depuis ce 26 juillet 2023 pour pouvoir rendre viable notre pays, pour pouvoir s’acquitter de la tâche, pour pouvoir refonder ce pays, transformer ce pays au bénéfice de la population nigérienne.
Monsieur le ministre d’Etat, vous l’avez un peu ébauché, cette question de la mise en œuvre des lettres de mission. Pour votre département, il est question du renforcement des capacités d’intervention opérationnelles des forces de sécurité intérieure à travers des actions de recrutement, de formation de personnel en qualité et en quantité, d’acquisition de moyens matériels et logistiques et du perfectionnement du système de renseignement intérieur, où en sommes-nous aujourd’hui par rapport à toutes ces questions ?
Effectivement votre question répond d’ailleurs au premier point de notre lettre de mission. Par rapport à cet objectif, mon département ministériel a engagé et réalisé plusieurs réformes et activités qui ont permis de renforcer les capacités opérationnelles de nos forces intérieures. Sans être exhaustif, en termes de ressources humaines en 2024, nous avons recruté 3595 jeunes au profit de la Garde Nationale du Niger et de la Police Nationale, tous grades confondus. ça c’est du jamais vu ici au Niger. Vous allez vous référer à ce qui s’est passé dans les années antérieures, jamais un tel chiffre n’a été atteint au cours d’une année. Cela démontre réellement les efforts consentis par l’Etat et cela en dépit de la situation conjoncturelle où nous sommes sous embargo économique. C’est dans cette situation que les partenaires qui, un à un, ont cru devoir s’en aller au lendemain du 26 juillet. Aujourd’hui, certains, on ne peut pas dire qu’ils sont revenus, c’est justement une position ambiguë qu’ils entretiennent. Ils sont partis et il y en a même qui en partant, nous ont demandé de les rembourser ce qu’ils avaient investi. C’est le cas de l‘Agence Française de Développement (AFD) qui malheureusement s’est crue devoir nous envoyer des lettres pour nous demander de leur rembourser les quelques millions qu’elle a investis ici au Niger pendant ces quelques années. Si c’est l’AFD, toujours française, qui ose demander de la rembourser, allez donc savoir.
En termes de formation, nous avons renforcé les capacités de plus de 8000 de nos agents, tous grades confondus, dans la gestion des frontières, la lutte contre le terrorisme, le renseignement, la cybercriminalité. Pour cette année 2025, nous avons l’ambition de recruter plus de 3000 jeunes qui vont servir dans les Forces de Défenses et de Sécurité, notamment la Police et la Garde Nationale. Très vite d’abord, pour la Police Nationale, dans quelques semaines le concours sera organisé et plus de 3000 vont être recrutés. Ce qui est du jamais vu encore une fois de plus. C’est pour vous dire les efforts qui sont en train d’être faits dans le renforcement et dans le recrutement du personnel. Pourquoi cela ? Parce que nous avons compris une chose. Nos intérêts stratégiques doivent être défendus, et tant que nous ne défendons pas nos intérêts stratégiques, cela veut dire que nous perdons des ressources. A quoi nous assistons depuis un certain temps ? C’est des attaques sur le pipeline parce que justement des bandits sont là en train de récupérer l’or, les richesses de ce pays un peu partout sur tous les points cardinaux. Vous voyez ce qui se passe dans la zone des trois frontières, dans la zone de Maradi, dans la zone d’Agadez, ce sont des zones dans lesquelles aujourd’hui tout le monde sait qu’on produit de l’or, mais qu’est-ce que ça rapporte concrètement à l’Etat Nigerien ? Ça fait belles lurettes qu’on dit que le Niger produit de l’or. Aujourd’hui vous qui êtes les journalistes, on peut définir concrètement ce que ça rapporte à notre vie économique. Non, cela veut dire qu’on ne maîtrise pas ce secteur. Pourquoi on ne maîtrise pas ? Nous avons compris que c’est parce que nous n’avons pas le personnel et la technicité qu’il faut. Pour ce qui concerne le personnel, on s’en charge. Ce sont les enfants du Niger qu’on va former pour pouvoir contrôler cet espace, pour que l’État puisse avoir les dividendes et les ressources qu’il faut dans la perspective d’impulser un véritable développement du Niger. C’est cela l’enjeu.
Face à nous, nous avons des gens qui sont décidés justement à ne pas nous permettre d’agir pour atteindre cet objectif qui est un objectif prioritaire pour le Niger. Donc forcément, il faut que nous puissions trouver la capacité et les moyens nécessaires pour pouvoir inverser la tendance. Tout naturellement, nous avons aussi comme on le dit, renforcé le cadre juridique relatif aux différents organigrammes, l’organisation de nos Forces de Défense et de Sécurité. Pour ce faire, des ordonnances ont été signées concernant la Garde Nationale du Niger et la Police Nationale dans leur organisation, tout cela pour les rendre beaucoup plus efficaces. Certains domaines de la police, nous avons un regard particulier pour pouvoir s’en approprier. C’est le cas, si vous avez remarqué ces derniers temps, nous sommes allés à développer la capacité amphibie de nos Forces de Défense et de Sécurité, c’est-à-dire la capacité à travailler sur les plans d’eau, sur le fleuve. Ce qui ne se faisait pas avant. Et si même cela se faisait, c’était de façon timide. Mais maintenant, nous avons compris les menaces et nous avons compris qu’il y a des voisins qui se sont déclarés et qui se sont ajoutés à cette menace.
Toute politique sécuritaire d’un pays s’évalue justement par rapport aux menaces. Donc face à ces nouvelles menaces, nouveau comportement, nouvelle attitude, nous allons renforcer justement ces domaines de la Police, de la Garde, de la Gendarmerie pour pouvoir y faire face. Nous allons revoir le maillage sécuritaire du pays à travers les implantations de nos unités dans l’espace qui est le nôtre. Cela va se traduire par la création des commissariats là où il n’y en avait pas, la création des escadrons polyvalents de la Garde Nationale là où il n’y en a pas et par la création aussi des compagnies de surveillance de frontières, les CMCF, qui ont montré leur plus-value dans notre architecture sécuritaire. A titre d’exemple, vous avez aujourd’hui les Escadrons Polyvalents de la Garde Nationale qui sont déjà construits sur fonds propres du Niger. Ce sont les escadrons de Dogon Kiriya, de Bonkoukou en cours de construction, à Kokorou dans la région de Terra, à Yelou et à Torodi. Vous voyez ces efforts qui ont été consentis par l’Etat.
Aujourd’hui, nous ambitionnons de rester là-bas. C’est quoi la vision ? Nous allons contrôler les zones et rester. Voilà pourquoi, il nous faut du personnel et des infrastructures.
Ce sera des postes fixes ?
Ils seront des postes fixes à partir desquels nous pouvons maintenant rayonner dans la zone. Ce que nous faisons jusqu’aujourd’hui, c’est aller faire des patrouilles, rester quelques temps et quitter. Nous nous sommes rendu compte que cette méthode est inopérante. Les bandits se jouent de nous de cette manière. Et maintenant, nous avons pris sur nous de rester. On restera aux côtés de la population, et ce faisant on permettra justement à la population de se sentir beaucoup plus à l’aise et à nos forces de défense et de sécurité d’être sur place afin de dominer l’environnement à travers une parfaite maitrise de celui-ci. C’est de cette manière que nous pouvons être beaucoup plus efficaces sur le terrain.
C’est aussi des compagnies de sapeurs-pompiers qui sont créées pour pouvoir être à côté de la population. Nous avons en mémoire les inondations de 2024. Au regard de tout ce que nous avons vécu dans ce domaine, il faut que nous puissions apporter cette sécurité, cette assistance à la population. Beaucoup de choses sont en train d’être faites à ce niveau. Il y a aussi d’autres actions qui ont été faites par rapport à la migration qui est aussi une menace même si par ailleurs les gens ne la perçoivent pas vite. A ce niveau, des actions majeures ont été entreprises au niveau de nos frontières. Lorsqu’on voit le nombre de cas de refoulés que nous recevons du coté de notre voisin l’Algérie, à Assamaka, ce sont des situations qui perturbent l’équilibre sécuritaire de notre pays parce que nous étions un pays membre de la CEDEAO. On se croit devoir reverser tout le monde au Niger parce que c’est juste le pays voisin qui est à côté. Et malheureusement, nous avons à faire à un nombre important, plus de 20.000 personnes ces derniers temps. Nous avons demandé justement à l’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM) et au Haut-Commissariat aux Réfugiés de se débrouiller pour faire rentrer chacun chez lui. Nous n’avons pas demandé à ce que ces gens-là soit reversé au Niger. On ne comprend pas, pourquoi ils vont rester au Niger et continuer à perturber notre sécurité ? Parce que c’est de cela qu’il s’agit. Il y a donc tous ces problèmes qu’il faut voir et auxquels il faut trouver une solution adéquate.
On l’a assez souvent vu sans une franche collaboration des populations, il est difficile de lutter efficacement contre cette insécurité, est-ce que les populations collaborent aujourd’hui ?
Au regard de la complexité de la situation sécuritaire dans notre pays, nous avons adopté un nouveau paradigme en matière de sécurité intérieure, surtout en matière de gouvernance. C’est une stratégie que nous essayons de mettre en place pour répondre à cette situation complexe et asymétrique, à ce désordre que nous avons vu créé par les terroristes au niveau de nos campagnes. Mais il fallait maintenant que le citoyen s’approprie cela. Nous avons des comités de vigilance qui sont créés autour des villages, qui travaillent en étroite collaboration avec les Forces de Défense et de Sécurité (FDS) pour essayer vraiment d’apporter la sécurité. Il y a des patrouilles qui partent mais elles ne peuvent pas restées éternellement sur le terrain. Donc, il faut suppléer. Il faut ce mécanisme là pour pouvoir rester assez longtemps, pouvoir aussi alerter à temps utile parce que c‘est de cela qu’il s’agit. Plus nous sommes alertés très rapidement, mieux ça vaut pour les interventions. Ce sont des concepts sur lesquels nous sommes en train de travailler et que cela va avoir sa plus-value dans cette offre de sécurité que nous proposons aux Nigériens, surtout que le dialogue est franc avec les communautés. Le dialogue est franc parce que nous avons les religieux qui sont là, nous avons les chefs traditionnels. Ce sont vraiment des institutions sur lesquelles nous pouvons nous appuyer, nous pouvons demander leur contribution pour que cette offre de sécurité puisse être effective dans ce que nous faisons au niveau de l’amélioration des conditions sécuritaires.
Au stade actuel, êtes-vous satisfait de cette collaboration de la population dans la lutte contre l’insécurité de manière générale ?
Effectivement, cela a changé beaucoup de choses parce que la population intervient, elle prévient, elle informe les Forces de Défense et de Sécurité. Ensemble, nous faisons le travail qu’il faut pour que la population puisse être sécurisée. Vous avez vu cette année l’effort incommensurable qui a été déployé pour que cette population puisse aller au champ cultiver, ensuite pour récolter et engranger le fruit de leur dur labeur. La plus-value de cette collaboration est là. Aujourd’hui, vous sentez sur le front social l’accalmie qui règne et surtout le sens de la sécurité. Je pense, c’est vous qui avez le baromètre pour savoir si cela été rentable ou pas, s’il a été efficace ou pas. A notre sens, il y a une amélioration par rapport à ce que nous avons connu il y a quelques mois, quelques années où vous vous souvenez très bien dans la zone de Tillabéri avec les collectifs des populations qui qualifiaient les militaires de tous les noms d’oiseaux à l’époque. On sent que tout cela est derrière nous et que la confiance est revenue entre cette même population et son armée. Nous avons toutes les raisons de croire que ça va.
Monsieur le ministre, un mot sur la consolidation de la paix à travers la sensibilisation de la population sur la coexistence pacifique et la cohésion sociale. Qu’en est-il des actions de déradicalisation et de réinsertion socio-économique des repentis ? On a vu, au niveau de Goudoumaria, des repentis qui sont présentés, qu’en est-il de leur insertion socio-économique ?
Vous savez que la consolidation de la paix passe nécessairement par la cohésion sociale mais aussi une coexistence pacifique entre les différentes communautés. Malheureusement, certaines contingences rendent les choses difficiles. L’infiltration et la désunion sont des braises sur lesquelles les obscurantistes sont en train de souffler pour opposer les gens. Nous avons entrepris plusieurs actions ; c’est le cas des comités au niveau local pour des actions de sensibilisation, des foras sont organisées et des caravanes en collaboration avec la Haute Autorité à la Consolidation de la Paix (HACP), que vous connaissez très bien, où nous essayons effectivement de voir comment rapprocher ces communautés. Nous essayons aussi de rendre pratique l’appel du Président du CNSP, Chef de l’Etat, à l’endroit des jeunes qui se sont fait enrôler dans ces mouvements de revenir dans le pays, de revenir pour construire ce Niger qui est notre bien commun. Une autre satisfaction, c’est que nous nous rendons compte que ce message est en train d’être compris. Certains sont en train de revenir. Nous avons deux centres comme, vous l’avez dit, à Goudoumaria et à Hamdallaye. Je voudrais aussi vous faire remarquer qu’il y a quelques mois de cela, ceux qui étaient dans ce centre l’ont abandonné. Les mêmes partenaires qui, on ne sait pas pour quel intérêt, en tout cas un intérêt qu’on ne maitrise pas, ont décidé d’abandonner le centre.
Il s’agit de quels partenaires ?
Ce sont les organismes internationaux, tous ceux qui ont promis de donner de l’argent pour construire le centre ont ‘‘foutu le camp’’ à la queue leu leu après le 26 Juillet 2023. Nous avons décidé de prendre sur nous la construction de ce centre. Heureusement, certains d’entre eux sont revenus la tête baissée pour essayer de reprendre langue, de reprendre la main, et d’engager le processus. Cependant, ce processus en ce moment ne peut être qu’à notre manière parce que nous ne comprenons plus ce comportement mi-figue, mi-raisin. Nous avons plus de 500 jeunes repentis qui sont là, qui continuent de venir. Nous avons décidé de les former dans le domaine qu’ils comprennent le mieux.
C’est quoi qu’ils comprennent le mieux ? Quand tu apprends à un paysan nigérien l’agriculture ou l’élevage, tu l’aides véritablement. Souvenez-vous que le bétail a été volé dans ce pays. Ce sont nos économies locales qui ont été déstabilisées. Vous partez aujourd’hui dans nos campagnes à peine vous allez trouver une chèvre dans nos villages parce que les bandits ont tout volé. Il faut reconstituer ces économies locales. Au-delà de cela, il faut donner la possibilité aux gens de produire. Nous avons des plans d’eau, il faut les valoriser à travers l’agriculture, la pisciculture, l’élevage. Donc, en formant ces gens dans ces domaines précis, ils peuvent être utiles à leur communauté. Pour peu que maintenant quand ils vont produire, qu’on puisse transformer et qu’on puisse commercialiser. C’est cela aussi l’économie d’échelle. C’est en cela qu’on souhaite que nos grands intellectuels puissent contribuer pour pouvoir donner une véritable impulsion à ce que nos campagnes puissent être productives, à ce que nous puissions transformer, avoir de la valeur ajoutée à ce que nous faisons. Je pense que cela est extrêmement important. Au demeurant, nous pensons qu’il faut développer les routes. Parce qu’on a toujours pensé, qu’aujourd’hui si vous parlez d’Inates, c’est des vallées verdoyantes, c’est des plans d’eaux immenses qu’il y a là-bas. Il n’y a personne et la mobilité est compliquée. Voilà pourquoi nous avons un slogan dans nos opérations où nous disons que le développement passe par le développement de la route. Nous sommes convaincus qu’en traçant les routes, on peut transformer radicalement ce pays. Rien qu’en réalisant les routes, en rendant ces zones accessibles et permettant à ceux qui sont là-bas d’évacuer leurs productions, je suis persuadé qu’on peut faire beaucoup des choses.
On a souvent décrié la gouvernance locale, qu’est-ce qui est fait aujourd’hui pour améliorer la gestion des collectivités territoriales ?
La gestion locale est au cœur des objectifs de la vision du Président du CNSP dans son axe II qui traite entièrement de cette question. C’est dans ce sens que nous avions donné à chaque Gouverneur de région, à chaque préfet de département, un cahier de charges conformément à cette vision à travers les quatre axes stratégiques que vous connaissez. La mise en œuvre des actions soutenues dans le cahier de charges a permis un appui conseil et un accompagnement conséquent des collectivités territoriales. Après un temps d’observation qui nous a permis d’apprécier la gouvernance administrative et financière de ces communes, nous avons placé des Administrateurs Délégués avec des objectifs clairs. Ces Administrateurs Délégués sont assistés par une commission consultative locale. Cela voudrait dire qu’au niveau de la gouvernance de nos communes, nous avons une organisation qui puisse permettre à l’administrateur délégué et aussi à la population de travailler de commun accord à travers une commission consultative pour impulser le développement et travailler en étroite collaboration, dans l’esprit de la population locale. C’est tout le sens du développement, c’est tout le sens de ce que nous pouvons espérer faire de mieux pour que la population puisse bien se sentir beaucoup plus à l’aise. Pour nous, il faut, à travers cette gouvernance, de la transparence, et la reddition des comptes dans ce que nous faisons. Il faut que des missions d’audit et d’inspection puissent être diligentées au niveau territorial pour aller se rendre compte de ce qui est fait dans les années passées. Effectivement, j’ai quelques exemples ici de ce que nous avons pu faire au niveau du Ministère de l’Intérieur à travers l’Inspection générale où nous avons, au courant de cette année, diligenté quelques inspections dont nous avons les conclusions définitives. Nous avons plus d’une douzaine de rapports que nous avons en ce moment au niveau de nos fiches comme Abala, Tanout, Tahoua, Zinder, Niamey où des inspections ont été menées et où des irrégularités ont été constatées et des sommes sont à rembourser. Une fois que nous avons le retour de ces inspections, nous les remettrons à la COLDEFF qui va essayer de trouver la solution par rapport à cette situation.
Les rapports ne sont pas définitifs pour le moment ?
Parmi ces rapports, il y a des définitifs et des provisoires. Les définitifs ont été envoyés à la COLDEFF. C’est quand même hallucinant quand on voit l’état de précarité de nos communes et que certains indélicats se permettent de prendre à leur bon profit les caisses ou les efforts des populations. Je pense qu’à ce niveau il faut vraiment qu’on sévisse.
On a vu à ce sujet, M. le ministre d’Etat, dans certaines communes ce sont des mares et des collines qui ont été vendues. On peut expliquer ça ?
Tout cela c’est parce que c’était la politique politicienne qui prévalait.
Pour ce qui est des rapports définitifs, peut-on avoir une idée des montants détournés ou mis en cause ?
Vous avez ici Ourafane 169 millions de FCFA, Oléléwa 287 millions de FCFA, Ville de Zinder 355 .millions de FCFA, Ville de Tahoua 244 millions de FCFA. Ce sont là des montants à rembourser. Les gens ont cru faire des deniers publics ce qu’ils veulent. Je pense que nous sommes dans cette droite ligne de pouvoir rendre compte au peuple nigérien de ce qui est fait de ces deniers pour que nous puissions prendre le bon exemple et que les nouvelles autorités investies puissent travailler dans la droite ligne et dans l’esprit de la vision du Chef de l’Etat et une gouvernance vertueuse.
Il y a un débat sur le travail des ONG de développement au Niger, quelles sont les mesures prises pour recadrer et mieux coordonner les interventions de ces ONG et associations de développement au Niger ?
Effectivement, mon département ministériel a pris d’importantes mesures pour assurer le suivi et l’encadrement des ONG et organisations de développement. Nous avons, dans un premier temps, évaluer leur nombre. Nous étions surpris de voir que rien que pour les ONG nous avons dénombré 4.122 dont 332 étrangères. On a l’impression que c’est un fourre-tout. C’est un domaine dans lequel les gens se retrouvent et certainement pas pour travailler pour le pays. À titre illustratif, ces partenaires affirment avoir investi 130 milliards au cours de l’année 2023. Ce qui n’est pas sûr. Aujourd’hui, si l’on injecte cette somme de 130 milliards, cela pourrait changer la vie de la population nigérienne. Malheureusement, nous ne sommes pas convaincus de ces chiffres. Nous sommes en train de parfaire ces audits pour essayer de comprendre exactement ce qui se passe. De toutes les façons, les ONG n’ont jamais développé un pays, l’aide n’a jamais développé un pays. Si on veut se développer, il faut se développer de la bonne manière en comptant sur soi-même. Maintenant, comme nous sommes dans un système où les gens veulent bien aider, c’est une très bonne chose. On peut faire confiance et accepter cette aide mais il faut la canaliser. Il faut qu’elle soit orientée afin qu’elle puisse servir à bon escient. Nous sommes en train de travailler là-dessus pour que nous puissions faire travailler ces ONG dans la droite ligne et leur faire comprendre ce que nous voulons. Vous avez en mémoire le cas du responsable de l’Union Européenne, au moment des inondations qui a distribué un certain montant à quelques ONG sur des critères qui lui sont propres et à sa guise. On prend de l’argent au nom d’un gouvernement pour venir le distribuer à des ONG. Nos analyses et enquêtes nous ont permis de découvrir qu’il y a beaucoup d’ONG qui sont en accointance avec ces partenaires qui nous font la guerre à travers des missions de subversion, à travers des mauvais comportements, à travers des soutiens qu’ils apportent souvent aux terroristes. Nous leur exigeons l’escorte mais ils disent qu’ils veulent se déplacer comme ils veulent. Cela n’est pas possible. Nous prônons la souveraineté de notre pays, nous voulons organiser notre pays, pas de leur permettre de faire ce qu’elles veulent. Il faudrait qu’elles comprennent que le rythme a changé. Si elles veulent travailler, elles n’ont qu’à travailler dans l’esprit des autorités nigériennes. C’est n’est plus le moment de faire ce qu’on veut. Non, nous ne sommes pas d’accord avec cela. Elles vont faire ce que nous voulons. Pas ce qu’elles veulent. Le message est clair et net. Vous allez venir nous aider à notre manière. Il faut que cela soit compris de tous. Certaines ONG ont été fermées, expulsées, à juste titre parce que nous avons documenté des comportements peu orthodoxes dans lesquels elles sont. Nous n’avons pas besoin de déballer tout mais elles le savent. Nous les invitons à agir en fonction du besoin du Nigérien, dans l’esprit de cette refondation pour que nous puissions travailler ensemble. Nous avons constaté également à ce niveau que généralement dans les ONG, les responsables suivent leur argent. Vous allez voir des ONG qui n’ont même pas de comptes. Cela n’est pas normal. Nous allons les refonder ces ONG. Nous sommes en train de travailler pour les mettre dans une dynamique ou trajectoire où nous pouvons les contrôler et travailler en toute orthodoxie pour qu’elles soient au bénéfice de la population.
Monsieur le Ministre d’Etat, quel est votre mot de la fin ?
Nous tenons à rappeler et magnifier le caractère résilient du peuple nigérien qui, nous savons pertinemment les difficultés dans lesquelles il est depuis le 26 juillet 2023. Mais qu’il sache qu’ensemble nous allons sortir de l’ornière. Parce que tout simplement nous avons la claire lecture et la vision que nous allons sortir de cette situation et de la plus belle manière avec la victoire qui sera la nôtre. Face aux partenaires décadents qui manquent de vision, nous avons une grande vision. Déjà la création de l’Alliance des Etats du Sahel en témoigne et la sortie de la CEDEAO en dit long. Ensemble, nous allons consolider les acquis. Ensemble avec ces pays frères, nous allons apporter le développement qu’il faut pour nôtre espace AES. Nous avons au niveau du Ministère de l’Intérieur, plusieurs réformes dont celles relatives aux sociétés privées de gardiennage, les reformes sur les régimes d’armes. Imaginez, depuis 1963 l’ordonnance qui réglemente le port d’arme au Niger n’a pas été revue. Donc, c’est tout un chantier que nous avons en face. Il y a également la réforme sur le schéma national sur l’aménagement du territoire. Dans les pays AES, nous sommes le seul qui n’a que huit (8) régions. Avec l’immensité du territoire nigérien, nous allons revoir le redécoupage de cet espace pour que l’administration puisse être très proche de la population. Nous avons aussi participé à beaucoup de rencontres dans le cadre de la Confédération AES au cours desquelles nous avons validé certains documents de voyage. Bientôt, nous aurons notre passeport AES, nos cartes d’identité. Ce sont des démarches qui sont en train d’aboutir. Nous avons pris l’ordonnance sur l’entrée et le séjour au Niger qui vient renforcer notre surveillance du territoire. Nous appelons le peuple nigérien à être vigilant. Nous sommes dans une situation imposée par certains acteurs qui sont en train de nous regarder on ne sait de quelle façon ou de souhaiter l’apocalypse. Ils sont en train de nous ravir ce que nous avons. Je pense qu’ensemble en restant vigilants, nous pouvons faire échec à toutes ces tentatives et pouvoir refonder notre pays, le transformer et le mettre sur la trajectoire du développement.
Je voudrais rendre un vibrant hommage à nos martyrs civils et militaires, féliciter et encourager nos FDS.
Gloire au peuple souverain du Niger !
Script : ONEP