
Les acteurs de la santé s’adressant à la population
Amener l’ensemble des populations à comprendre la nécessité de fréquenter systématiquement les formations sanitaires au besoin est un défi majeur à relever. Aujourd’hui encore, seulement 43% des femmes de la région de Tillabéri accouchent dans les formations sanitaires pour pouvoir être assistés par un personnel qualifié. Et Les 57% des femmes accouchent où ? A domicile sans aucune assistance par un personnel qualifié ? Continuent-t-elles d’accoucher dans les mains des matrones hors des centres de santé ?
L’importance de fréquenter les formations sanitaires surtout pour les enfants et les femmes n’est pas très bien cernée par les populations. Malgré les difficultés et l’insécurité qui sévit dans la région de Tillabéri, l’Etat du Niger et ses partenaires ont créé les conditions nécessaires pour rapprocher les formations sanitaires des populations. Mais dans la pratique, cette population n’accorde pas assez d’importance aux services de santé. Les conséquences qui en résultent sont multiples et multiformes. Des vaccins acquis à grand frais périment dans les formations sanitaires, les taux de fréquentation des formations sanitaires restent peu élevés, les maladies évitables par la vaccination continuent de faire des ravages et les indicateurs relatifs à la vaccination sont au rouge.
M. Issa Alassane est du village Doulgou. Il vit avec sa famille en tant que PDI (Population déplacée Interne) sur un site de réfugiés qui accueille 15 villages, dans le département de Gothèye depuis plus de 6 mois. Ce polygame, avec son visage émacié interdit strictement à ses femmes de se rendre dans les formations sanitaires. Pour cause, l’insuffisance de ses moyens financiers. Quel drame ? Quand on sait que l’essentiel des questions liées à la santé de la mère et de l’enfant sont entièrement prises en charge par l’Etat et ses partenaires. « Nous n’avons pas assez de moyens pour pouvoir payer les soins dans les centres de santé. Ces centres sont faits pour ceux qui ont suffisamment d’argent », déclare ce déplacé interne, qui reste encore retissant quant au sérieux et l’intérêt de fréquenter les formations sanitaires.
La réticence de certaines femmes à fréquenter les formations ne dépend pas de leur volonté. Beaucoup d’entre elles sont bloquées par leurs maris. « Dans notre société la femme ne peut rien faire sans le consentement de son mari. Il y a encore des maris qui empêchent à leurs femmes de fréquenter les formations sanitaires pour pouvoir bénéficier de tous les services SR, Santé de Reproduction. Dans nos villages, il y a beaucoup de femmes qui accouchent à la maison sans aucune assistance », déplore salamatou Issifi.
Pendant que certains empêchent à leurs familles de fréquenter les formations sanitaires, d’autres ont compris l’intérêt et montent des initiatives tendant à sensibiliser les populations sur la nécessité de se rendre dans les formations sanitaires à tout moment et pour n’importe quelle question sanitaire. M. Abdouramane Hama du village de Tchalougou, est également un déplacé interne. « Nous avons participé à une campagne de sensibilisation où on nous a expliqué les dangers de rester avec les problèmes sanitaires à la maison. Les femmes ne doivent plus rester accoucher à la maison. Elles doivent se rendre dans les formations sanitaires dès les premières semaines de la grossesse. Faire régulièrement les consultations prénatales et néonatales, etc. Je fais de porte à porte pour expliquer cela à tout le monde. On ne veut plus enregistré des décès pour un accouchement non assisté. Beaucoup de femmes meurent lors des accouchements à domicile. Ce n’est pas bon ! Il ne faut pas accepter cela. Ce genre d’accouchement ont des conséquences graves pour la société » regrette M. Abdouramane Hama.

Compte tenu des efforts de l’Etat et de ses partenaires dans le secteur de la santé, il n’y a aucune raison que des populations ne fassent pas des services de santé un premier recours notamment en ce qui concerne les indicateurs de la santé de reproduction telles que les consultations prénatales, les accouchements assistés, les consultations nourrissons, la planification familiale, les différentes vaccinations des enfants de zéro jusqu’à 23 mois. « Les indicateurs de la santé de la reproduction (accouchements assistés, CPN, CPON, GN) ne sont pas reluisants. Cette situation met en danger la santé de la femme et de l’enfant. C’est pour toutes ces raisons sus évoqués que la Direction régionale de la santé publique, de la population et des affaires sociales de Tillabéri a inscrit dans son Programme Annuel d’Activité de l’année 2023 la sensibilisation des populations de la région de Tillabéri sur l’importance des soins postnataux, les accouchements assistés par un personnel qualifié, les soins prénataux, la planification familiale, les consultations nourrissons et les maladies évitables par la vaccination », a expliqué M. Abdoulaye Aghali, communicateur régional à la direction régionale de la santé publique de la population et des affaire sociale de Tillabéri.
A tout point de vu, les communications et les sensibilisations sont les seuls moyens de convaincre les populations de s’approprier des formations sanitaires. N’est -t-il pas possible de mener une grande campagne de sensibilisation de routine afin d’améliorer les performances de qualité dans le domaine particulièrement en matière de santé de la reproduction ?
Abdoul-Aziz Ibrahim, ONEP Tillabéri