Depuis les prémices de l’hivernage 2023, les femmes du quartier Kirkissoye ont mené plusieurs tentatives, selon leurs propres mots, auprès de la municipalité, afin de trouver une solution au sujet d’un caniveau qui leur rend la vie difficile. Malgré l’annonce du curage des caniveaux faite par les municipalités de la ville de Niamey, la situation demeure encore difficile dans certains quartiers en cette saison des pluies.
En effet, selon Mme Chantou Saïbou, présidente des femmes du quartier Kirkissoye, leurs innombrables appels à la rescousse auprès de la municipalité et des conseillers de l’arrondissement communal Niamey 5 sont restés lettres mortes. Une sourde oreille que dénoncent ces femmes qui se demandent pourquoi une telle indifférence de la part de leurs élus locaux face à leur malheur.
Dans ce quartier populaire, le principal souci de centaines de mères de familles est un caniveau à ciel ouvert longeant les habitations sur plusieurs centaines de mètres. Ce grand caniveau est un gite géant pour l’éclosion des moustiques, occasionnant des maladies, notamment le paludisme mais aussi des cas d’accidents et de noyade chez les enfants qui s’adonnent à des jeux aux abords de cette voie d’évacuation. « Il nous occasionne beaucoup de désagrément à commencer par les moustiques qui viennent, et le paludisme. Nos vies sont entre les mains de Dieu, nous n’avons ni eau, ni électricité. Nous n’avons pas de route non plus, mais ce qui nous rend la vie impossible, c’est ce caniveau », déplore Mme Chantou Saïbou.
Malgré les innombrables recourt des femmes, dit-elle, la situation est restée au point mort, car aucune réaction de la municipalité n’est à enregistrer dans la résolution de leurs préoccupations. « Nous avons porté notre cri de cœur aux autorités municipales, nous avons interpellé tous les conseillers de la commune 5. Ils étaient venus s’enquérir du problème. Aucun ne nous est venu en aide », dénonce-t-elle. « La dernière fois que les services de la mairie ont curé convenablement ce caniveau remonte à dix ans, parce que maintenant ça fait trois ans qu’ils ne sont pas venus constater la situation du caniveau comme si aucune âme humaine ne vit à côté », ajoute-t-elle.
Dans cette histoire de manque d’hygiène et d’assainissement, les principales victimes restent et demeurent les enfants, car ils sont exposés à des dangers de noyade en cette période de fortes précipitations et à des maladies liées aux odeurs nauséabondes qui se dégagent des eaux stagnées. « Quand il pleut, on a tous les problèmes du monde avec les enfants, parce qu’ils courent jouer aux abords du caniveau, beaucoup sont tombés dedans et ont été emportés par le courant. La femme ici derrière moi a vu son fils emporter par les eaux jusqu’au niveau du grand ravin. N’eut été les gens qui étaient là en ce moment le pire serait arrivé », s’inquiète Mme Chantou Saïbou.
Aïchatou Hama la mère de l’enfant en question raconte comment elle avait vécu la plus grande frayeur de sa vie. « Quand mon fils était tombé dans le caniveau, j’avais eu de sérieux problèmes, parce que je ne savais pas qu’il était sorti et on était venu m’alerter en criant, que mon fils est tombé dans le caniveau. Et en ce temps, nous étions en pleine inondation, nous étions abrités dans un petit hangar. J’étais arrivée en courant, sans y réfléchir, je m’étais jetée dans le caniveau pour essayer de retrouver l’enfant ; par chance, j’ai pu le sentir et les gens sont venus m’aider à le sortir », raconte-t-elle.
En outre, comme pour ne rien arranger à cette situation, est venu se greffer, l’absence de l’eau et de l’électricité ; non pas à cause des coupures récentes, mais plutôt par une absence totale d’installation du réseau de la Société d’exploitation des eaux du Niger (SEEN) et de la Nigelec. « Il n’y a aucun poteau de la Nigelec, ni de tuyau de la SEEN parce que s’il y en avait, on aurait tous fait une déviation vers nos maisons. Dans tous ces blocs, il n’y a aucun tuyau dans un secteur dans lequel vit plus de deux cents personnes, la vie est dure. Sans eau, malgré la proximité de notre quartier, c’est inconcevable », estime, scandalisée, la présidente Chantou.
En effet, nonobstant les efforts d’une bonne volonté qui a pu installer deux poteaux, les ménages de ce quartier seraient restés dans le noir total. «Les deux poteaux que vous voyez, sont l’œuvre d’un jeune du quartier qui s’appelle Illiassou. Il a voulu faire l’effort d’en mettre d’autres, mais faute de moyens, il n’a pas pu. Nous le remercions tout de même. Et vous voyez, c’est à partir de ces deux poteaux que chacun a fait des branchements pour avoir de l’électricité, mais là aussi à nos risques et périls, car récemment un enfant s’est fait violemment électrocuter. L’État n’a jamais pensé à nous, mais nous fondons l’espoir que les militaires eux le feront », a-t-elle souhaité.
Face à ces préoccupations, la présidente des femmes de Kirkissoye a émis un appel pressant à l’endroit des nouvelles autorités pour y remédier. « Nous implorons les autorités de nous venir en aide pour évacuer ces eaux parce que nous sommes vulnérables à différentes sortes de maladies. Nous sommes des personnes modestes, les ordonnances sont chères donc nous ne pouvons pas nous acheter les médicaments. C’est pourquoi nous implorons les nouvelles autorités à penser à notre souffrance. L’eau, c’est la vie, nous ne l’avons pas. Sans eau ni électricité, on ne peut pas dire qu’on vit décemment, car nous sommes constamment dans la saleté. S’ils parviennent à nous faire évacuer ces eaux, nous leur en serons éternellement reconnaissantes », plaide Mme Chantou Saïbou.
Hamissou Yahaya (ONEP)