Dites seulement ‘’Habou Ganda’’, et vous pouvez être sûr que vous réussirez à éveiller de vieux souvenirs dans la mémoire collective des Niaméens. Oui, ça fait déjà près de dix ans que le Petit Marché a été arraché à l’affection des habitants de la capitale par un cruel incendie, mais les souvenirs restent encore vivaces. On se rappelle en effet des moindres détails de cette nuit fatidique du mercredi 18 au jeudi 19 avril 2012, où les flammes d’une rare intensité ont réduit en cendres tout le marché, décimant condiments, fruits, poisson, des étals, toutes sortes de marchandises et d’importantes sommes d’argent, et avec eux, tout l’espoir des commerçants y tenant boutique, dont la plupart se sont retrouvés à jamais ruinés.
En vérité, cette tragédie n’a ébranlé que les commerçants officiant sur la place dudit marché et leurs clients. Car Habou Ganda était tout un symbole, celui de l’éclat de la vie à Niamey. Le marché était exigu, avec ces abords et ses labyrinthes encombrés de clients et autres petits voleurs à la tire toujours aux aguets, mais l’ambiance était tout de même plaisante. Ce qui, à l’époque, faisait du Petit marché une des places emblématiques de la capitale. On avait l’impression que les clients y affluaient non pas seulement pour s’approvisionner en condiments ou légumes, mais aussi pour y prendre un certain bain de foule, tout en savourant les ‘’assaisonnements’’ de l’atmosphère des lieux. C’était un melting-pot de turbulences et de symphonies orchestrées par les va-et-vient des commerçants, des clients et des badauds.
Cette ambiance se répand jusqu’aux abords du marché où s’offraient en spectacles des vendeurs ambulants, des charlatans criant à tue-tête les vertus des produits de la pharmacopée traditionnelle, des charmeurs de serpent, des étalagistes, etc. Bref, tout un ensemble d’images, de couleurs et de sons intégrant tous les ingrédients constitutifs du charme et des brillances du Petit marché. Et voilà pourquoi, jusqu’en 2012, Habou Ganda, centre d’affluence par excellence, était resté un véritable pôle d’attraction pour les habitants de la capitale. Une vie, un monde à part entière !…
Et aujourd’hui, les habitués de ce marché de passage en longeant cette même place où trônait sont saisis d’une irrésistible nostalgie. Et ils ne s’empêchent pas de se demander ce que, finalement, sera fait de ce vaste espace s’étalant sur, plus d’un hectare en plein cœur de la ville. En effet, depuis octobre 2020, suite à la pose de la 1ère pierre pour la construction du Mémorial des Martyrs, dédié aux éléments des FDS tombés sur le champ d’honneur, les travaux tardent toujours à démarrer.
Et en attendant, le Place du Petit marché, reste toujours ce gros meuble rempli de souvenirs, ce ‘’vieux sphinx ignoré du monde insoucieux’’, tel que décrit par Baudelaire dans son poème Spleen, in ‘’Les Fleurs du mal’’.
Assane Soumana(onep)