Quand on fait de la passion son métier, ça donne l’occasion de combiner plaisir et travail tout en gagnant de l’argent. C’est le cas de M. Ibrahima Diori qui a décidé de vivre de sa passion. Agé de 34 ans, M. Ibrahima Diori est titulaire d’un master en Relations Internationales option Gestion des Conflits, étude de Sécurité et politique de paix obtenu à l’Université Abdou Moumouni de Niamey. Eleveur de pigeons locaux depuis son jeune âge, comme la plupart des jeunes, il a par la suite arrêté cette activité pour se consacrer aux études. Après cette longue période d’arrêt et passionné par cet oiseau très attachant, Ibrahima s’est relancé en 2017 dans l’élevage et la vente de pigeon, mais cette fois-ci, pour de bon en s’intéressant aux pigeons de race. Il a actuellement chez lui, dans son pigeonnier, environ 80 pigeons toutes races confondues, mais des mondains en général.
Le jeune homme qui passe pratiquement le plus clair de son temps avec ses pigeons s’est dit fier de vivre de cette passion onéreuse et prenante. Parlant de ses pigeons, il explique qu’ils sont des oiseaux très «intelligents» car ils sont assez «expressifs» ou démonstrateurs. «Ils montrent très vite leur préférence alimentaire selon les périodes, la disponibilité de la nourriture ou de l’eau dans leurs mangeoires et abreuvoirs. Dès qu’ils sont malades ou blessés, ils prennent des positions et arrêtent de nourrir leurs progénitures afin de ne pas les contaminer. Les pigeons sont aussi très affectueux, protecteurs», a expliqué ce spécialiste.
La pratique de l’élevage des pigeons (ou colombophilie), est basée, selon M. Ibrahima Diori, sur la passion d’abord puis sur la recherche du bénéfice. En effet, dit-il, c’est une activité qui génère beaucoup de revenus lorsqu’elle marche pour l’éleveur. Par contre, a expliqué M. Ibrahima, il faut savoir que le gain dépend de certains facteurs subjectifs (liés aux pigeons) notamment la race, la couleur, la forme et le gène. «Ces facteurs déterminent la valeur d’un pigeon car pour deux pigeons de même race et même forme, la couleur en association avec le gène peut justifier une différence de plus de 600.000 FCFA» a-t-il fait savoir.
M. Ibrahima affirme qu’avec la vente de pigeon de race, il arrive à prendre en charge tous les besoins de sa famille. Même si le gain est aléatoire et dépend de la quantité de sujets dont dispose l’éleveur, il fait savoir que cela peut aller de 200.000 FCFA à 5.000.000 de FCFA par mois pour certains éleveurs. «Personnellement, ce que je gagne va de 180.000 F à 400.000 FCFA par mois», confie-t-il. Cependant, a-t-il précisé, «ça peut arriver qu’on gagne exceptionnellement moins ou plus en fonction des aléas». Ibrahima a plusieurs sources d’approvisionnement. «J’achète mes pigeons auprès de nos amis éleveurs d’ici, du Mali, du Sénégal, de la France et de la Hongrie», confie ce passionné des pigeons.
Comme dans toute activité, ceux qui s’adonnent à la colombophile rencontrent de nombreuses difficultés, certaines prévisibles et d’autres imprévues. Celles qui sont prévisibles, a-t-il expliqué, sont la période de repos des pigeons qu’on appelle «pause» qui est une période de mue où les pigeons changent de plumage. Il y’a aussi des variations climatiques (hausse d’humidité, excès de chaleur) et les périodes de variole, une maladie dû à la piqure des moustiques. Au titre des difficultés imprévues, le jeune homme affirme qu’elles sont multiples et vont des maladies aux vols. «L’élevage des pigeons est sensible aux différentes maladies qui touchent la volaille. En dehors des cas de maladies courantes, il y a les épidémies qui ravagent plus de la moitié des sujets et qui sont incurables. Néanmoins des vaccins existent pour la prévention de certaines maladies graves telles que la maladie du Newcastle qui fait beaucoup de victimes chaque année» a-t-il dit avant de parler de l’autre volet des difficultés que sont les vols qui ne font que se multiplier ces derniers temps.
La gestion de la santé des pigeons dans la volière se fait de deux manières : la prévention et le traitement curatif. La prévention est faite, selon ses explications, contre les maladies et les épidémies qui touchent les pigeons, elle est faite en général à une courte durée et s’effectue en des étapes bien précises (l’entretien des lieux, la désinfection, l’administration des produits vétérinaires pour prévenir les infections généralement sur une durée de 3 jours). Le traitement est quant à lui effectué sur une durée de 3 à 7 jours pour les infections intestinales généralement et de 1 jour ou 2 pour le déparasitage.
«En dehors de cela, on peut ajouter les mesures de précaution pour éviter la contagion en cas de maladie. Il s’agit de l’isolement des sujets malades et de la désinfection des mains pour éviter de transmettre la maladie aux autres pigeons surtout les plus jeunes qui sont les plus vulnérables», conseille l’éleveur de pigeon qui ambitionne de réaliser une ferme dans la perspective de se professionnaliser davantage.
Contrairement à ce qu’on aurait tendance à croire, cette activité ne s’était pas développée au Niger par le passé. Elle continue d’enthousiasmer les Nigériens, et beaucoup de jeunes pratiquent l’élevage chez eux. Tous les amateurs le disent : «l’amour que l’on porte pour ces pigeons n’a pas d’égal. Le jeune colombophile M. Ibrahima, partage ce point de vue lorsqu’il affirme que personne au monde ne réussira à détourner un éleveur de pigeons de sa passion».
Aminatou Seydou Harouna (ONEP)