Au Niger, environ 60% de la population fait encore recours à la médecine traditionnelle pour leurs besoins en soin de santé. Une situation qui s’explique à la fois par la place de cette médecine dans la culture mais aussi par le niveau des revenus de la majorité des Nigériens ainsi que le coût élevé de certains produits de la médecine moderne. Ce qui ne permet pas à de nombreuses personnes de se soigner correctement. C’est pour pallier cette difficulté que certains professionnels ont osé faire le pas, en s’investissant dans la valorisation des connaissances ancestrales en pharmacopée. C’est le cas de Dr. Ousmane Mamadou Arima, pharmacienne de formation qui s’est investie depuis plusieurs années dans la production de ce qu’elle appelle ‘’Médicaments traditionnels améliorés (MTA)’’
Cette initiative consiste à associer les connaissances de la médecine moderne pour valoriser la pharmacopée traditionnelle en vue de produire des produits de meilleure qualité, plus sûrs et accessibles aux populations.
Cette pharmacienne de formation exerce avec enthousiasme cette activité. Elle justifie sa motivation en ces termes : « Je me suis rendue compte qu’il y avait beaucoup de produits qui n’étaient pas accessibles à notre population et c’est pourquoi je me suis lancé dans les MTA. Je prépare les MTA en plusieurs catégories. La première catégorie, c’est des produits qui sont simples. On prend juste la plante, qu’on va bien laver, sécher à l’ombre surtout pour préserver les vertus thérapeutiques et emballer dans un sachet tout en expliquant sur une notice le dosage. Au niveau des autres catégories, ces médicaments sont plus élaborés comme les sirops. En effet ces sirops sont vraiment des produits qui sont préparés en suivant exactement le même processus que les produits classiques de la pharmacie moderne. Et ces produits n’ont pas besoin d’être mis au frais, on peut le garder pendant des mois, un an et même plus », explique Dr. Ousmane Mamadou Arima.
L’objectif même des médicaments traditionnels amélioré (MTA) est de fournir des produits qui puissent être efficaces et surtout moins chers et accessibles à la population. « Les prix des produits varient de 1000 FCFA, 2000 FCFA, 3500 FCFA et le plus cher de nos produits coûte 5000 FCFA. Étant dans le domaine de la pharmacie et le remède naturel, j’ai pu faire la comparaison. Par exemple pour un traitement anti hémorroïdaire, la médecine classique va vous prescrire un anti hémorroïdaire ; un produit laxatif. Vous pouvez vous retrouver avec une ordonnance qui va vous coûter près de 40.000 FCFA alors que l’anti hémorroïdaire que nous avons mis au point est un cocktail de plantes qui prend en charge tous ces différents symptômes et qui coûte 3500 FCFA. Donc même pour un traitement complet qui nécessite trois flacons vous dépensez 10500 FCFA », a-t-elle confié.
Dans le cas de la prise en charge de l’asthme, d’après Dr. Ousmane Mamadou Arima, ceux qui ont des enfants asthmatiques le savent et peuvent témoigner. « Vous allez à chaque fois faire plusieurs inhalations, mettre de l’oxygène et beaucoup de choses qui coûtent extrêmement cher. Le produit que nous proposons coûte seulement à 10500 FCFA. La majorité des patients qui ont suivi le protocole peuvent faire des années sans faire des crises qui vont nécessiter une hospitalisation », a-t-elle affirmé.
En fin, Dr. Ousmane Mamadou Arima, conseille cependant de trouver les bons produits. En effet, tout comme la médecine moderne, la médecine traditionnelle est actuellement confrontée aux problèmes de médicaments de la rue et aux phénomènes de ceux qu’on appelle les charlatans qui, malheureusement circulent de maison en maison, de fada en fada avec des mesures qu’eux-mêmes ne comprennent pas très bien. Car en majorité ce sont ces gens-là qui provoquent les différents accidents qu’on voit actuellement. En général dans chaque quartier, les vrais tradi-praticiens sont bien connus. « Ils ont souvent les mêmes points de vente depuis des années et parfois la personne a même hérité la place de son père qui vendait à cet endroit. C’est pourquoi, il faut cherchez ceux qu’on connaît dans le quartier parce qu’un tradi-praticien c’est quelqu’un qui maîtrise vraiment bien les dosages, il a reçu le savoir transmis de générations en générations », a-t-elle conclu.
Parmi les produits de la pharmacopée valorisés par Dr. Ousmane Mamadou Arima figure le kinkéliba ou cassia occidentalis. D’après cette pharmacienne, le kinkéliba est une plante très riche en vitamine C et en fer. Pour Dr Armima, la présence de la vitamine C peut expliquer la raison pour laquelle le Kinkéliba est utilisé dans des situations de stress et de fatigue et aussi ses vertus pour la santé. L’infusion des feuilles est réputée soigner divers maux en Afrique, explique la pharmacienne et tradi praticienne. Cependant, relève-t-elle, il existe deux types de plante Kinkéliba. En effet, la majorité du temps la plante qu’on trouve sur nos marchés appelée kinkéliba et qui vient du Mali est une plante odoriférante, une espèce de lupia utilisée traditionnellement dans les cas de fatigue comme plante rafraîchissante. C’est pour cela que les gens consomment souvent cette plante à la rupture du jeune de ramadan.
« A côté de cette plante, il y a celle qu’on appelle le Cassia occidentalis ou en Haoussa ‘’Sanga Sanga’’ qui est le vrai Kinkéliba, qu’on trouve au Niger et qui pousse assez facilement », explique-t-elle. « C’est une plante qu’on voit avec des fleurs jaunes et il y a eu beaucoup d’études scientifiques qui ont prouvé ses effets antipaludiques aussi bien In Vivo ou in-vitro (au laboratoire). Elle est aussi utilisée comme le Cholagogue par exemple dans le trouble du foie. Quand il y a une toxicité ; on peut prendre une tisane de cette plante pour nettoyer le foie », a Dr. Ousmane Mamadou Arima.
Cette pharmacienne et tradi praticienne recommande d’infuser quinze (15) grammes de la plante dans un litre d’eau et de prendre un verre surtout le soir avant de se coucher. Il faudrait préciser que même si le Kinkeliba est important, certaines catégories d’individus doivent faire attention au produit. « Il est préférable de consommer le kinkéliba sous la forme fraîche pour pouvoir bénéficier au maximum des substances nutritives de cette plante. Pour le cas des femmes enceintes, il n’y a pas eu d’étude pour savoir si la plante kinkéliba (Cassia occidentalis) est nocive ou pas, mais en général les différents produits sont conseillés à partir de mois (6) mois de grossesse pour éviter tout risque », précise la pharmacienne et tradi-praticienne.
Abdoussalam Kabirou Mouha (Stagiaire)