Depuis plusieurs années, le Niger connait malheureusement des crises alimentaires récurrentes doublées d’un climat d’insécurité. C’est ainsi que des jeunes et des vieillards quittent les milieux ruraux pour les centres urbains à la recherche de leur pitance. Une fois arrivés en ville, ces personnes vulnérables deviennent souvent des sans abri, et occupent les marchés et certaines places publiques où ils s’adonnent à la mendicité. Avec le temps et le goût du gain facile, elles en font une activité génératrice de revenus. Sans le savoir, elles s’exposent à plusieurs dangers sociétaux, notamment le viol pour les femmes et les jeunes filles, et la délinquance pour les garçons. Pourtant, la religion musulmane interdit fermement cette pratique, sauf dans certaines conditions précises.
La mendicité peut être considéré comme un fait social lors duquel une personne, dans des lieux publics ou privés, demande publiquement de l’aide sous forme de charité, comme de l’argent, de la nourriture ou d’autres objets matériels de grande ou de petite valeur. Le sociologue Alou Ayé souligne que quatre raisons fondamentales expliquent le nombre de plus en plus croissant ou accru de mendiants dans la communauté urbaine de Niamey. Ces raisons sont notamment, les problèmes socioculturel, économique, sécuritaire et religieux. « La société nigérienne d’une manière globale a tendance à accepter, sinon à encourager la mendicité » a-t-il dit.
En effet, indique le sociologue, du fait que les musulmans ont le devoir religieux de donner, de partager avec leurs frères. A chaque instant que cette volonté s’exprime, il y aura toujours une main tendue qui sera là pour recevoir ce que l’autre a décidé de donner. Aussi, la paupérisation de la communauté est un élément qui pousse beaucoup de personnes (hommes comme femmes) dans la mendicité. « Une fois dans la ville, il y a beaucoup de mendiants qui sont confrontés à de sérieux problèmes. Je pense particulièrement aux femmes et aux enfants qui sont victimes d’agressions, de viols, de vols, etc. Les enfants se retrouvent malheureusement embarqués dans des groupes de gangsters où ils sont utilisés dans le trafic de stupéfiants ou parfois dans la prostitution des mineurs », déplore le sociologue.
Pour pallier cette mendicité, selon Alou Ayé, il faudrait procéder à la réinsertion de ces jeunes mendiants en les intégrant soit dans l’enseignement général, soit dans l’enseignement professionnel pour qu’ils puissent acquérir un savoir, apprendre un métier qui leur permettra véritablement de se prendre en charge. C’est pourquoi, le sociologue interpelle l’Etat dans son rôle régalien de prendre de véritables dispositions pour interdire systématiquement toute forme de mendicité aux personnes qui sont en bonne santé, aux enfants qui sont mineurs, mais également à la femme qui constitue le pilier de la cellule familiale.
Oustaz Moustapha Ahmadou explique que la religion musulmane n’a pas autorisé à qui que ce soit, quel qu’en soit son âge, de mendier. La mendicité est réprimée en Islam, sauf dans trois conditions. « La première des conditions, c’est quand la personne se retrouve dans l’extrême pauvreté ou si elle ne mendie pas elle peut perdre sa vie où même risque d’avoir des problèmes de santé. Dans ce cas il lui est autorisé de demander la charité, mais dès qu’elle gagne ce qu’elle va manger, elle ne doit pas continuer à faire de ça un métier. La deuxième condition, c’est quand on est extrêmement endetté ; on peut mendier pour payer cette dette afin d’avoir la paix avec les gens. Et la troisième condition, c’est ce qu’on appelle le prix du sang ; c’est à dire des gens qui ont un certain nombre de biens avec toi et te menacent à mort, là tu peux mendier pour sauver ta vie, surtout quand il te faut un prix de dédommagement. Voilà les trois conditions dans lesquelles la mendicité est autorisée en Islam », a-t-il expliqué.
Toutefois, l’islam interdit la mendicité des enfants et des femmes parce que c’est des personnes à charge qui ne devraient pas mendier, elles sont prises en charge par le chef de famille. « Si le père est vivant, c’est à lui de se battre pour les nourrir. Quant à la mère, elle est appelée à assurer l’éducation de ses enfants en étant à la maison. La religion musulmane lui interdit strictement de se promener dans les rues », a-t-il souligné. Oustaz Moustapha Ahmadou ajoute par ailleurs que même pour faire l’aumône, ce n’est pas permis de donner aux mendiants qui ne sont pas handicapés. « Le prophète (SAW) a même dit que c’est ‘’haram’’ pour celui qui mendie alors qu’il a de quoi manger ou a la possibilité de faire du commerce pour se nourrir», souligne l’Oustaz.
Malheureusement, la mendicité est devenue ces derniers temps comme une sorte d’imposition. « Le mendiant te suit jusqu’à ce que toi-même tu aies peur de lui », affirme-t-il. C’est pourquoi, Oustaz Moustapha dit qu’il est interdit de donner aux mendiants qui osent le faire, car cela encourage la paresse et l’oisiveté.
Salima Hamadou Mounkaila (ONEP)