Le Tobey-Tobey en zarma, ou Tashé en haussa, est un élément de la culture nigérienne qu’organisent chaque année, les jeunes au cours du mois de Ramadan. En effet, après la première décade du mois béni, il est courant de voir des bandes de jeunes portant un accoutrement fait de loques, le corps maculé de poudre ou de cendre, défilant dans les rues, au rythme des chants et danses. Ils font le tour des maisons et appréhendent les passants pour présenter leurs numéros. C’est une pratique qui remonte loin dans le temps et à laquelle chaque génération s’accommode.
A la tombée de la nuit, après la prière d’Isha, les adolescents des différents quartiers de la capitale s’activent et s’organisent en équipes, en fonction de leurs affinités pour faire équipe, pour le traditionnel Tobey-Tobey. A cette occasion, chacun se déguise et se travesti à sa façon. En effet, c’est une pratique qui consiste pour les jeunes, à travers des parades chantantes et dansantes au rythme de sons de bouteilles, des applaudissements et souvent de tam-tam, à se divertir, à égayer les autres et également à souhaiter une bonne rupture de jeûne aux familles. En retour, ces dernières leurs offrent différents cadeaux (sucre, mil, sorgho, jus, argent etc.).
Au quartier yantala de Niamey, les jeunes ne sont pas en reste. A chaque coin de rue, des enfants rivalisent d’imagination pour se déguiser, paraître le plus drôle possible et faire la fête le temps d’une procession dans les rues, le tout dans une ambiance bon enfant. Rachid Abdoulaye, un garçon âgé d’une quinzaine d’années, est membre d’un groupe d’adolescents. « Nous avons trouvé nos grands frères pratiquer cette tradition et nous nous sommes accommodés de ça également. Nous évoluons à 10 dans notre groupe. On parcourt les rues et on visite les familles du quartier et chaque nuit, on peut gagner jusqu’à 5.000 F, des paquets de sucre et plusieurs mesures de céréales », affirme-t-il. Issa Tanimoune, un membre du même groupe souligne que c’est la toute première fois qu’il participe à cette pratique. « C’est vraiment amusant », dit-il.
Quelques ruelles plus loin, la même scène : des parades dansantes et chantantes. Parmi ces artistes en herbe, une coterie de jeunes filles. « Les filles participent activement également au Tobey -Tobey », nous apprend l’une d’entre elles. Pour Halima et Yayaha, une paire de la troupe, « c’est surtout pour nous divertir que nous participons à ce carnaval traditionnel ». Selon Moussa Agali, un passant, « le Tobey- Tobey est ancré dans notre culture. A chaque fois qu’on croise ces parades d’adolescents, ça nous rappelle notre enfance. Il faut les encourager par les petits cadeaux ». Dans un autre quartier de la capitale, l’ambiance est presque pareille. Des bandes de jeunes, déambulent dans les rues et sur les principales artères. « Je fais le Tobey -Tobey pour surtout apprendre aux jeunes les différents chants et les pas de danses car, chaque chant à sa signification et chaque pas de danses également. Il faut, dans chaque groupe, au moins un danseur qui doit se déguiser en fauve, lapin, ogre, vieillard, ou autre chose, un chanteur pour déclamer les chansons, des batteurs de tam-tam et des jeunes pour applaudir et encourager le danseur », souligne Saadou Habou, âgé de 19 ans, à la tête d’une équipe d’une dizaine de gamins. « On ne partage pas les cadeaux, on attend la veille de la fête pour le faire. Suite au partage des sommes collectées, certains arrivent à s’acheter des habits pour la fête », ajoute-t-il. Pour Hassana Issaka, une habitante du quartier, « le Tobey -Tobey a perdu de ses lustres d’antan. Les enfants ne savent pas bien danser et chanter. C’est devenu plus de la mendicité que de la distraction », s’exclame-t-elle. « A notre époque ce n’était pas que des ados, même des adultes participaient à ce carnaval traditionnel », souligne sa voisine.
Ousmane Nazir (Stagiaire)